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Histoire Maritime du littoral du sud de la Vendée

10 mai 2023

PUBLICATION :L' HISTOIRE DES DUNES ET DE LA FORET DOMANIALE DE LONGEVILLE

 

  HISTOIRE DES DUNES ET DE LA FORET DOMANIALE DE LONGEVILLE

 

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Plantée au XIX siècle pour lutter contre l’ensablement des villages et des cultures, la forêt domaniale de Longeville forme une étroite bande boisée séparant l’océan de l’intérieur des terres.

 

 

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Elle s’étend sur 16,4 kilomètres de littoral entre l’océan et la plaine de Jard- sur- mer au nord et  les marais de la Faute - sur-mer au sud.

 

 

 

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D’une surface de 1 225 hectares elle est composée de plusieurs massifs forestiers entrecoupés de villages et hameaux.

 

 

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L’urbanisation s’étend parfois jusqu’au rivage . Les villages de Jard, St Vincent sur jard, Longeville, Les Conches, la Terrière, la Tranche, la Grière et la Faute la séparent en plusieurs secteurs

 

 

  1. HISTOIRE DES DUNES MOBILES DU SUD DE LA VENDEE

 

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Les dunes du littoral  sont formées par le dépôt des alluvions de la Loire poussés par un puissant courant marin de direction nord – sud entre les estuaires de la Loire et de la Gironde. 

 

 

Cyrille DELAIRE, historien local jardais, a imaginé l’évolution du profil côtier en réalisant  la synthèse des variations du niveau de la mer décrites par la géographe Madame TERS et les lignes des fonds marins des cartes de notre époque.

Les dunes 5500 ans avant J-C

 

5 500 ans avant J-C : Le niveau de la mer se situait de -12 à -8 mètres en dessous du niveau des plus basses mers actuellesUn cordon dunaire aurait relié le rivage jardais, les rochers des Islates, des Vendeurs, de la Marche à la pointe du Grouin en limitant à l’ouest une mer intérieure.

 

Migration dunaire 3500 ans avant J-C

 

3 500 ans avant J-C : La mer passa de la cote -8 à -4 mètres au-dessous du niveau actuel des plus hautes eaux. Sous l'influence du vent et des courants, une brèche serait née à hauteur du rocher des Islates créant une large communication directe avec l’océan.

 

 

800 ans avant J-C

 

 De 800 à 300 ans avant J-C : Le niveau de la mer continua à s’élever passant du niveau -1 mètre au niveau 0 actuel.  Après l’isolement des Islates, du rocher des Vendeurs puis de celui de la Marche, un vaste banc de sable commenca à se former et migra progressivement vers le fond du golfe.

 

Cette brèche (truncare en latin) pourrait être à l'origine du nom de la Tranche : Carvor Trunca,..Tranchéa… Trancha…? Dans cette hypothèse, la future Carvor serait devenue la capitale d'une île.

Situation des dunes 300 ans avant J-C

 

Au début de notre ère

Les rochers de la Marche et des Vendeurs sont immergés. Celui des Islates n’apparaît plus que lors de grandes marées. Les dunes mobiles nées des alluvions maritimes colonisent le rivage limitant l’estran à son niveau actuel.

 

 

La presqu'ile tranchaise au 12è siècle

 

Au 12è siècle

La Tranche aurait été implantée au centre d’une presqu’île dunaire orientée nord – sud séparée du continent par une mer intérieure, le futur golf des Pictons, qui s'étendait sur plus de 100 000 hectares.

 

Les documents historiques épargnés par les guerres successives sont peu nombreux.

C’est au Moyen Âge que l’on retrouve les premières traces de la création du village de La Tranche sur cette étendue  dunaire 

Jusque-là, la présence des occupants de la façade maritime était occasionnelle, limitée à des habitants des terres venus sur la pointe du Grouin pour pêcher poissons, crustacés et coquillages.

On peut estimer que c’est à partir du début du XIIe siècle, que commença la phase de colonisation agricole du littoral.

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C’est à cette époque que les massifs dunaires, considérés comme sans valeur et peu attractifs, furent donnés par le comte de Talmont pour y fixer des habitants.

Les premières informations concernant la menace générée par la mobilité des dunes sur les habitants du littoral  apparaissent la fin du XVè siècle dans les actes des cartulaires des abbayes .

L’ensevelissement par les sables mobiles de leurs habitations, de leurs terrains de culture et de leurs marais salants était un fléau fréquent , bien supérieur au risque de submersion marine.

  UN DANGER PERMANENT : LA MIGRATION DU SABLE

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Assimilées aux «vimères de guerre», périodes de famine induites par conflits armés, celles liées aux migrations dunaires  les "vimères de sable" étaient la hantise des habitants du littoral. Ces « paysans de la mer » dont la survie dépendait d’une double activité, agricole et maritime, redoutaient les «volemens de sable» qui recouvraient cultures et habitations.

L’hostilité de cet environnement explique le déficit du peuplement de la côte tranchaise.

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- Pour la période du Moyen-Âge, les seules informations concernant les massifs dunaires proviennent des actes des chartriers ou des cartulaires des abbayes de Saint Jean d’Orbestier et de Sainte Croix de Talmont.

Ces documents, dits «papiers mémoriaux», destinés à sauvegarder les titres de propriété suite à des donations de terres n’apportent pas de renseignements sur les conséquences de la mobilité des dunes dans le secteur de la Tranche.

 - En 1487 les livres de la trésorerie du comte de Talmont évoquent pour la première fois les drames des habitants de la côte.

Le receveur, Jean Goland y signale qu’il a dû baisser la "taille (l’impôt)des habitants de la paroisse de la Tranche" en raison de la famine provoquée par l’avancée des dunes sur leurs récoltes et leurs habitations. Il précise qu’il faudra prévoir de pérenniser cette mesure en raison de l’aggravation progressive du fléau.

1704 CARTE DE CLAUDE MASSE

 En juin  1704 le mémoire de Claude MASSE accompagnant sa carte du Bas Poitou présente pour la première fois un descriptif détaillé du territoire tranchais :

Le bourg de La Tranche était entièrement construit dans les dunes mobiles à la limite du marais inondé une grande partie de l’année surtout lors des grandes marées, les «malives».

 « Le village de La Tranche est situé entre une vaste étendue de dunes migrant sous l’influence du vent appelée « la Grande Parée » et la rivière de Saint Benoît nommée le Lay ».

Riche de 80 feux repartis en plusieurs hameaux derrière le cordon dunaire, le village  était entouré de lagunes qui convergeaient et se jetaient à la mer immédiatement à l’est par un vaste delta marécageux recouvert par les marées. 

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" Les terres ne sont que sable fin qui « mouve » (se déplace) dès qu’il fait un peu de vent.

 Il fait changer de place les petites montagnes ou dunes qui enveloppent presque toutes les maisons de 3 cotés et les ensevelissent insensiblement"

 

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Pour se rendre au marché de Longeville, les habitants de l’île de Ré qui débarquaient à La Tranche devaient …

«traverser 4 à 5 mille toises de dunes de sable par un mauvais chemin très sinueux». 

 

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Par ignorance et surtout par nécessité, les autochtones contribuaient à la mobilisation des sables dunaires.

La pauvreté et la contrainte de trouver des ressources pour survivre  les amenaient à piétiner quotidiennement les dunes pour accéder à l’estran. 

 

- Pour la pêche aux coquillages et crustacés, le mareyage de leurs « écluses » , le ramassage du goémon et le ramassage du bois d’épave ,ils créaient de nombreux chemins  générant des brèches ou s’engouffrait le vent.

 - Pour transformer des parcelles incultes en vignobles, ils arrachaient "la durane" pour en faire des balais ou se chauffer.

 - Pour nourrir leurs ânes et leurs mulets . Faute de pacage, ils les laissaient brouter la rare végétation qui fixait les dunes en croissant spontanément sur les bords de mer. 

Le XVIIIe siècle fut une période d’aggravation de la migration dunaire sur tout le littoral atlantique d’où naquit l’ambition de stabiliser les dunes.                    

Des 1713, près d’Arcachon, le seigneur de Ruat fut le premier à tenter de fixer les dunes de son domaine en semant des pins.

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Ces premiers semis landais furent détruits par les bergers qui utilisaient traditionnellement ces terrains incultivables  pour le pacage de leurs ovins.

Il délégua à son homme d’affaires PEYJEHAN, natif du pays et estimé de tous, la mission de conduire le chantier.

L’adhésion progressive des habitants ne suffit pas . La famille de Ruat dut abandonner le financement de tels travaux.

 

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Aucune décision ne fut prise par les administrations de l'Etat pour stopper l’invasion des terres  malgré les plaintes répétées des populations du littoral consécutives à l’ensablement de leurs villages par la  progression continue des massifs dunaires vers l’intérieur.

Ordonnées sous LOUIS XV par décision administrative, les rares tentatives de plantation de la forêt furent des échecs. 

 

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En 1741 l’ensablement de la Basilique de Soulac, important lieu de pèlerinage construit au XIIe siècle et l’obligation d’abandon du village par ses habitants  furent les facteurs déclenchant de la prise de conscience par l’État de la nécessité de protéger les populations de l’avancée des dunes.

 

 

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Dès 1788, soutenu par l’archevêque de Bordeaux décidé à restaurer la basilique, Brémontier, ingénieur des Ponts et Chaussées, arriva à convaincre le gouvernement de la nécessité de fixer les dunes des Landes en semant des pins maritimes.

Reconnue à Paris et suivie  par les autorités scientifiques, administratives et les investisseurs utilisateurs de résine, son initiative va enfin déclencher le processus.

Il proposa d’utiliser l’expérience tirée de la tentative locale de la famille de RUAT : des graines de pins maritimes, mélangées à des graines d'ajonc et de genêt furent semées sous une couverture de fagots de branchages qui maintenaient provisoirement les sables.

Au bout de quatre ans, le genêt atteignit  près de deux mètres de hauteur.

Ainsi protégé, le pin, d'une croissance plus lente, grandit et domina bientôt les autres plantes qui, en pourrissant, apportaient des éléments organiques.

 2 . LA PRISE EN CHARGE DE LA FIXATION DES DUNES MARITIMES PAR L’ÉTAT

 A)  UN DÉCRET DE NAPOLÉON Ier

Face aux plaintes répétitives des habitants du rivage victimes de l’envahissement des sables, Napoléon Ier décida de s’attaquer à ce fléau.

Le 14 décembre 1810 il prit le décret visant à la végétalisation pour fixer les dunes du littoral :

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En premier lieu, il ordonna une cartographie du cordon dunaire.

Pour évaluer la surface et la répartition entre dunes fixes et mobiles, le relevé cadastral de la totalité des dunes fut réalisé. 

Il  comprenait les propriétés de l’État mais aussi des parcelles appartenant aux communes et aux particuliers.

Que se passait – il dans les dunes du littoral du sud de la Vendée ?

- En ce début de XIXe siècle les ravages provoqués par des tempêtes de sable successives deviennent catastrophiques sur la bande littorale s’étendant de Jard à l’Aiguillon.

- Au sud le bourg de l’Aiguillon, initialement implanté à l'est d'une pointe de 7 kilomètres de dunes dépourvues de végétation, avait  déjà été déplacé de 4 kilomètres dans les terres. Il est à nouveau menacé d’être englouti.

- Les baux de St Michel en L’Herm disparaissent sous le sable. La route, les vignes et les prés sont recouverts et lors des grandes marées, la mer passe par dessus la dune.

 - À la Tranche et aux Conches, le sable recouvre les parcelles de vigne et les jardins, ensevelit  les récoltes et les maisons.

 - Le fléau s’étend à Jard, recouvrant des moulins et des vignes et certaines terres labourées 

La volonté de l’État de protéger ce territoire se concrétise enfin :

- En 1826 suivant la décision de Napoléon Ier, Beautemps- Beaupré établit les premiers plans cadastraux des dunes du sud de la Vendée.

- En 1827 est élaboré un nouveau code forestier pour «assurer la pérennité du patrimoine forestier et conserver ses potentialités pour les générations futures»…

En 1828 Consciente du danger sur la végétation du pacage des animaux et du piétinement, l’Administration des Ponts et Chaussées crée des postes de gardes-dunes préposés « à la conservation des arbrisseaux et broussailles ».

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 -  En 1836 les communes de Longeville et la Tranche furent choisies par l’État pour tester les techniques de plantation et d’ensemencements importées des Landes.

À cette époque, la commune de Longeville comptait 575 hectares de dunes mobiles et celle de la Tranche 484 hectares pour 1,5 hectare de dunes fixes.

Le préfet de la Vendée fit un rapport sollicitant une allocation annuelle de l’État pour la plantation, l’ensemencement et la conservation des dunes et proposa un règlement approuvé par la direction des Ponts et Chaussées.

Une allocation annuelle de 40 000 francs fut accordée.

La tentative de fixation des dunes du littoral du sud de la Vendée était lancée.

Commencèrent alors les premiers semis…

B) LES PROCÉDÉS DE FIXATION DES DUNES  

On différencie 3 zones dunaires :

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- 1. La dune littorale sur les parties nues et mobiles du pied de la dune, sur une lisière de 300 mètres de largeur au-dessus la laisse de mer.

 

 

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On y plantait des Oyats.

 Ce chiendent maritime aussi appelé « gourbet », ne progresse que dans la zone de sables mouvants proche du littoral . 

                                                                                                                                                          

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Il résiste à l’ensevelissement par le sable grâce à des racines très profondes et se caractérise par sa spécificité de se multiplier verticalement de proche en proche par « drageonnage» pour fabriquer de nouvelles touffes.

 

- 2. La zone d’ensemencement des pins maritimes.

C’est au-dessus de cette bande d’oyats que débutèrent les premiers semis de pins maritimes.

Brûlés par le vent salin ou dévorés par les lapins  ... les premiers résultats furent décourageants.

- En  1839 devant cet échec, le Conseil Général de la Vendée exprima le désir « que des conducteurs expérimentés pris dans le département des Landes soient envoyés en Vendée et chargés de faire exécuter les travaux sous la surveillance des ingénieurs ». 

Il fut décidé  que « l’ingénieur chargé spécialement de ce service soit envoyé visiter les localités ayant obtenu les meilleurs résultats pour étudier leurs méthodes d’ensemencement ».

Les techniciens landais lui firent découvrir les moyens de freiner le mouvement du sable en érigeant des palissades ou des clayonnages qui ralentissent le flux d’air provocant à leur pied une accumulation du sable et la formation d’une dune artificielle.

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-Soit par des palissades disposées parallèlement au rivage: elles bloquaient le sable volant et progressivement s’ensevelissaient.

 

 

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Soit par des clayonnages constitués de pieux de 2 mètres enfoncés dans le sol, enlacés par des branchages sur 50 cm de hauteur.

 

 

 

 -À partir de 1840, on applique en Vendée la procédure suivie dans les dunes mobiles des Landes .

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Au lieu de planter, on sème à la volée un mélange de graines de pins maritimes, d’oyats, d’ajoncs et de genêts  que l’on protège par une couverture de branchages.

Parmi les matériaux employés dans la couverture, les meilleurs sont le genêt et l'ajonc puis viennent les branches de pin.

La réussite des premiers semis se confirme enfin. 

 3. la zone du versant terrestre à l’abri de ces lignes littorales de défense.

A  croissance très rapide, les pins maritimes vont pouvoir s’épanouir mais demandent à être souvent et largement dégagés.

Vivant dans un sol pauvre, ils doivent pouvoir étendre leurs racines et bénéficier d’espace et de soleil.

Dès les premières années, ils vont bénéficier d’un débroussaillement enlevant les genêts, ajoncs et ronces, nuisibles aux jeunes pins puis viendra  le temps de limiter leur densité par des éclaircies. 

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Les pins de première ligne sur la façade littorale sont déformés par le vent et le frottement des grains de sable. Cette zone des « arbres martyrs » aux troncs ployés, aux racines partiellement découvertes assure le rôle tampon protégeant les lignes du versant terrestre des embruns et du cinglage.                                                                                                      

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 Ce premier rideau est souvent renforcé par des plantations de tamaris ...

 

 

 

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 ...ou de chênes verts dont les sommets arasés seront aussi modelés par le vent.                                                                                                                      

       

 

 C)  LA NAISSANCE DE LA FORÊT

Dès 1841, les autochtones sont convaincus de l’efficacité des travaux.

En 1844, un spécialiste local de la végétation dunaire, estimait qu’on obtiendrait « en moins de 20 ans des zones couvertes de bois touffus qui seront des abris tutélaires ».                                                             

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Quelques années plus tard cet avis fut confirmé par Cavoleau, secrétaire général de la préfecture de la Vendée : « on a tout lieu de croire que les sables mouvants des cotes de la Vendée sont consolidés et fixés de manière à empêcher l’invasion du sol productif. » 

Par la loi du 19 juin 1857, NAPOLÉON III imposa à toutes les communes de boiser leur territoire pour fixer le sable et de privatiser leurs terrains communaux sous condition que les nouveaux propriétaires garantissent des travaux de plantation sur ces sols.

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En raison de la réussite des travaux réalisés dans les communes test de La Tranche et de Longeville, l’administration autorisa l’ensemencement des autres dunes vendéennes.

- Entre 1836 à 1862 les Ponts et Chaussées boisèrent en Vendée 1 500 hectares, et l’Administration forestière 2 500 hectares :

-Le pin maritime, essence de fond, représenta 75 % du boisement.

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 -Le chêne vert (10 %) constitue le sous étage dans les zones de terrain caillouteux et aride du littoral jardais.

Il aurait été implanté depuis des siècles pour récolter le Kermès - cochenille, parasite servant à produire la teinture rouge écarlate des étoffes et des enluminures.

-Çà et là, 2 % de pin noir d'Autriche et 12 % de feuillus (Robiniers, peupliers, frênes, ormes, érables et acacias) vinrent interrompre la monotonie du massif. 

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La régénération naturelle des pins maritimes était assurée lors des coupes par l’abandon des houppiers chargés de cônes sur le sol.

Sous condition de débroussaillage des genêts, des ronces et des ajoncs, cette procédure simple suffit à provoquer un ensemencement et une levée spontanée.

 

 

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Afin d'éviter la propagation du feu d'une parcelle à l'autre et d'y accéder en cas d’incendie, les pins furent semés ou plantés en ligne et entretenus de grands pare-feu d’une trentaine de mètres de largeur.

  

Jusqu’alors sous occupé par les hommes en raison des dangers de la migration dunaire ou de la submersion marine, l’espace dunaire entre dans une époque de mutation économique à partir de la fin du XIXe siècle.

 LA FORÊT ET SA PLACE DANS L’ÉCONOMIE TRANCHAISE

La forêt va être à l’origine de tous les stades de l’évolution de l’économie tranchaise. 

1°LA FORÊT PROTECTRICE ET SOURCE D’EMPLOIS

La disparition du risque d’ensablement par la fixation dunaire va modifier la perception collective de ce territoire littoral.

A) - L’exploitation du bois

La gestion de la forêt du domaine public consistait à faire vieillir les pinèdes jusqu’à 75 ans pour récolter du bois d’œuvre en les éclaircissant tous les 5 ans.

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Surveillance et protection, semis, débroussaillage, abattage, débardage et transport créèrent de l’embauche et apportèrent des emplois nouveaux.

Les gardes forestiers étaient souvent d’anciens militaires engagés reconvertis dans le service des Eaux et Forêts.

Leur travail était très diversifié : pose de clayonnages en bordure du domaine maritime, plantation d’oyats, éclaircissement des semis et élagage des branches basses des jeunes pins, coupes de bois, surveillance, avertissements et procès-verbaux aux propriétaires d’animaux paissant sur la dune.

Pour des tâches ponctuelles, on embauchait quelques employés occasionnels.                                                                                                                           

Le 7 septembre 1866 le conservateur des Forêts autorisa la construction de la Maison Forestière de la Tranche au Corps de Garde.

« Je vous autorise à faire construire la maison forestière à la pointe du Chiquet sur la dune, derrière la caserne des canonniers garde-côtes qui est une ruine, ensevelie à moitié sous le sable. Ces matériaux doivent servir à la construction. » 

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Les pierres de démolition des fondations de cette ruine et la moitié de la couverture en tuiles de pays de sa toiture furent en effet utilisées pour cette nouvelle construction. « Je considère cette maison comme devant être affectée au logement d’un garde chargé de l’entretien des palissades. »

 

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On comptait alors deux gardes sur le territoire de la commune, dont un au hameau de la Faute.

Ils dépendaient d’un brigadier résidant à la maison Forestière du Rocher à Longeville.

Outre la création de ces emplois de fonctionnaires, tous les tranchais même les plus pauvres bénéficièrent de cette manne forestière.

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Munies d’une autorisation préfectorale, les veuves de guerre furent autorisées à ramasser le bois mort pour faire des fagots de bois de chauffage. 

 

 

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Rien ne se perdait, même pas les aiguilles de pins appelées «frétilles».

Elles étaient ramassées avec des fourches en bois puis vendue à l’hectolitre comme allume-feu.

 

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Les enfants grimpaient dans les arbres pour cueillir les pommes de pin vertes ou les ramassaient au moment de l’abattage.

 

 

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La collecte était rassemblée à la maison forestière de Longeville ou les cônes étaient étalés sur une vaste aire cimentée pour le séchage. Les graines de pins, les «pignons» stockées pour être semées étaient commercialisées sous contrôle strict de l’Administration des Eaux et Forêts.

Les jeunes récupéraient les cônes vides qu’ils revendaient pour allumer le feu.

 

Dans les parcelles privées la gestion était à plus court terme.

Les coupes à blanc dès que les pins pouvaient être commercialisés pour donner des étais de mines étaient fréquentes.

Elles permettaient surtout à ses propriétaires de couvrir leurs besoins en bois de chauffage, bois d’œuvre pannes et volige pour l’entretien de leurs maisons et pour celui de leurs lignes de bouchots. 

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Les scieries de la casse des Casserottes à la Terrière et de la Saligottière eurent des durées de vie éphémère.

Leur matériel fut racheté par des charpentiers locaux.

 

B) – Le gemmage

La collecte de la résine resta à la Tranche une activité marginale qui s’étendit de 1930 à 1950.

Les rares familles de gemmeurs tranchais étaient originaires des Landes, berceau d’une longue tradition de résiniers.

Elles  obtinrent des concessions situées à la lisière de la forêt, à l’emplacement du Parc des Floralies et de la plaine des Mourat.

"Pelage" de l'écorce avec un "écorci"

Quatre ans avant d’être abattus, les Eaux et Forêts marquaient d’une pastille ronde « E/F » les arbres les plus vieux qui devaient subir un «gemmage d’épuisement».

En février, le gemmeur effectuait avec un outil coupant, un «écorci», le «pelage» de l’écorce superficielle sur une hauteur de 60 centimètres la première année. Il était  élargi de 70 cm par an et atteignait 3 mètres à l’abattage.

 

 

Et au pied de l’arbre, il pratiquait une saignée de 10 centimètres, «la care» ou un pot de terre cuite était maintenu par une lamelle de zinc.

Un pin produisait 1 litre 5 à 2 litres de résine par an. La récolte était stockée dans des bidons métalliques avant d’être expédiée vers une distillerie pour être transformé en essence de térébenthine ou en colophane pour la fabrique de colles et de vernis.

Localement on utilisait aussi la résine mélangée à du saindoux pour fabriquer « l’Ingré » une crème pour se protéger les mains du froid lors de la récolte du goémon.                                                    

C) - L’activité viticole dans les enclaves forestières 

Avant la plantation de la forêt, quelques vignes survivaient dans les dépressions dunaires mais étaient périodiquement envahies par le sable.

Les "casses":enclavées dans la forêt

 

À partir de 1860 les Tranchais qui avaient participé à la plantation des oyats et aux semis des pins bénéficièrent de la part de l’État du droit de cultiver des enclaves surbaissées disséminées dans la forêt, nommées «casses» ou «conches».

 

 

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Elles vont représenter la moitié des terres cultivées communales.

En raison de la pauvreté du sol et de l’éloignement de la nappe phréatique, la vigne était la seule culture possible dans ces parcelles de sable chaud.

 

En 1885, la destruction des riches vignes de la plaine par le phylloxéra offrit à ces «casses dunaires» un atout économique.

Des cépages résistants et peu exigeants, le Noah, l’Othello ou le Baccho colonisèrent les « conches ».

En 1890, 65 hectares de surface viticole avaient été plantés.

La production familiale pour une surface moyenne de 40 ares pouvait atteindre 1 500 litres. 

Préparation de l'eau de vie par distillation

On distillait une partie de la récolte pour faire de l’eau vie utilisée comme désinfectant des plaies pour les hommes et les animaux, puis on préparait religieusement le célèbre pineau. 

 

L’excédent de la récolte était expédié par le port de l’Aiguillon à des négociants pour des coupages. 

 

Pressoir en action lors de la vendange

 

Agriculteur, artisan ou commerçant, chaque Tranchais possédait sa vigne et faisait un petit vin iodé et «acidulé », faible en degré.

La cave était le lieu de convivialité où l’on recevait ses amis et la période des vendanges, un temps fort de la vie du village.

 

À partir de 1930, la crise agricole mit fin à cette récente euphorie économique . 

La chute des exportations maraîchères et viticoles signa le début du déclin de l’agriculture tranchaise.

Débarquement du vin d'Algérie

 

Après l’effondrement du cours des oignons par la concurrence de la production syrienne, les vins d’Algérie et du midi, moins acides, supprimèrent les débouchés des excédents de la production locale.

 

 

Dispersées en forêt, difficiles d’accès et divisées par les héritages, les parcelles de vignes furent progressivement abandonnées en friche et elles furent  colonisées par les sapins et les chênes verts. 

Au nombre de 1 000 agriculteurs en 1900, il passa à 500 en 1939.

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Heureusement, dès 1850 des notables luçonnais attirés par l’ensoleillement et la luminosité exceptionnelle de la côte avaient découvert les richesses de ce paradis totalement isolé, qui proposait alors des vacances de rêve entre l’océan la forêt et les marais.

 

 

Traversée du LAY par le passeur

 

En revanche l’absence de réseau routier et les difficultés de traverser la rivière à l’Aiguillon en barque faute de pont ne favorisaient pas l’accès au village.

Se rendre à la Tranche relevait de l’expédition !

 

Pour conserver la forêt comme  moteur de l’économie locale, les tranchais  vont lui  trouver une nouvelle vocation…

 2° LA FORÊT SOURCE DE RECONVERSION : LES PREMIERS ESTIVANTS

Depuis 1850 quelques rares estivants étaient adeptes de séjours estivaux à la Tranche. 

Attirés par la douceur du climat, les premiers estivants vacanciers  avaient découvert la diversité des trésors tranchais : les bains de mer en cas de beau temps, l’abri sous les arbres de la forêt les jours venteux, les activités de pêche et de chasse des marais.

En revanche l’absence de réseau routier et les difficultés de traverser la rivière à l’Aiguillon en barque faute de pont ne favorisaient pas l’accès au village.

Se rendre à la Tranche relevait de l’expédition.

Partie de boules en bois du dimanche

 

Hébergés chez l’habitant, les estivants  louaient une partie de leur logement et accompagnaient leurs hôtes au rythme des sorties de pêche, de chasse et des traditionnelles parties boules en bois du dimanche. 

 

 

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Progressivement intégrés à la « famille tranchaise » ils apprenaient à débusquer les crevettes sous les rochers, à chasser lapins et pigeons en forêt ou à pêcher des anguilles dans les marais.

 

 

 1911: dernière etape de la construction du pont

Malgré la création de la ligne du petit train Luçon – l’Aiguillon, en 1901, il faudra attendre 1911 pour que l’ouverture du pont traversant le Lay ouvre la première voie d’accès permanente.

 

 

Premières villas de la "grande plage"

 

Cette même année, la mise en vente par le Domaine Maritime de la dune de la Grande Plage va donner à ces pionniers l’opportunité de réaliser leur rêve : Construire des chalets "vue sur mer".

 

 

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En 1926 la société immobilière LAME créé le parc de la Grière, premier lotissement de 15 hectares aménagé en forêt.

Le promoteur proposa la vente de 120 parcelles situées de chaque côté de voies transversales d’accès à la plage à travers la forêt et les dunes.

Le profil de ces notables « estivants » peu enclins  à partager leur paradis restera le même jusqu’en 1930.

Toutefois, la découverte des vertus thérapeutiques de la forêt va contrarier leur refus de partage.

La demande de ce patrimoine forestier sous prescription médicale va ouvrir la porte à un nouveau débouché pour l’économie tranchaise. 

3° LA FORÊT, PATRIMOINE SANITAIRE ET THÉRAPEUTIQUE

C’est l’état sanitaire déplorable des grandes villes qui fut à l’origine du boom économique du littoral.

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A cette époque la toxicité du milieu de vie était à l’origine de la plupart des maladies urbaines. Les rejets industriels, l’absence de récupération des eaux ménagères mélangées aux eaux pluviales polluaient le quotidien des populations urbaines et engendraient de multiples pathologies

Faute d’être entendu sur ses mises en garde et  sur l’amélioration de l’insalubrité environnementale, le corps médical incita les malades à choisir  des séjours loin de leurs cités polluées.

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En effet, le constat des vertus thérapeutiques du soleil, de l’air pur et les senteurs balsamiques de la forêt sur les convalescents et les enfants de santé fragile va faire la promotion des cures aux bains de mer sous prescriptions médicales.

 

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Cette mode toucha dans un premier temps les populations aisées, les aristocrates et la grande bourgeoisie.

Les premières stations balnéaires attirèrent des malades venus se refaire une santé. 

 

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De plus, de nombreuses agglomérations de grandes villes vont créer des centres aérés sur le littoral de la Vendée.

L’accompagnement des  enfants malades devint la raison de séjours familiaux à la côte.

 

En 1929, la municipalité de la Tranche, consciente de l’apport économique essentiel des bains de mer pour la localité,  va jouer la carte de l’accueil des centres de convalescence d’enfants pour des séjours thérapeutiques dans les pins. 

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En décembre 1931, 20 ans après l’autorisation de construction des chalets dans les dunes de la Grande Plage, la commune cède 3 200 m2 de la forêt de la Terrière à la ville de Savigny – sur – Orge pour implanter une colonie de vacances permettant aux enfants de familles modestes de découvrir les bienfaits du bord de mer. 

 

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Ce premier centre d’accueil ouvrira l’été 1932 accueillants 120 enfants puis 200 l’année suivante.

Après la vente de la parcelle boisée du  Parc de la Grière, c’est la seconde concession à la politique de défense de la forêt élaborée depuis l’époque des premières plantations.

 

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Puis suivra à la Grière, la transformation de l’hôtel Bellevue en Maison de Vacances des écoles publiques de la Vienne.

La politique d’urbanisation dans la forêt va se poursuivre.

 

 

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À la même époque, le centre de vacances de l’Alouette aux Conches suivis de la construction du préventorium de Longeville  votée par Conseil général pour combattre le fléau de la tuberculose sont construits et ouvrent dès juillet 1934.

 

Si la forêt possède toujours une fonction prioritaire de protection, la production de bois est devenue un objectif secondaire.

Il va falloir adapter la politique communale à une  nouvelle donne économique.

LA FORÊT  PATRIMOINE TOURISTIQUE 

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Le tourisme familial puis le tourisme social né des congés payés, vont à nouveau modifier le quotidien tranchais et parfois être source de conflits.

Cela  durera de 1935 jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.

 

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Le tourisme gagne du terrain au détriment de la forêt et des dunes mais redonne du travail aux bras souvent peu qualifiés libérés par l’agriculture en crise.

A ) Le tourisme familial

Les stations balnéaires naissent alors  sur tout le littoral Vendéen.

En 1931 La Tranche  recevait déjà 3 000 estivants dont 800 à la Faute.              

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Les estivants pouvaient trouver à louer des chambres chez l’habitant dans des maisons particulières pour des séjours d'une ou deux semaines.

Les pensions de famille  accueillaient des familles bourgeoises.

 

 

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Grâce au développement l'hébergement en camping qui à cette époque nécessite peu de matériel, le tourisme estival va prendre un nouvel élan.                                                          La légèreté de l'équipement convient à des familles populaires qui, faute d’avoir une automobile, se déplacent en train, en autobus ou à vélo.

D’abord en camping sauvage, dans les dunes ou en forêt : chacun plantait sa tente près d’un point d’eau et creusait des feuillets. 

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Pour éviter l’anarchie des implantations dans les dunes et la forêt les autorités imposèrent pour des raisons sanitaires la création d’emplacements municipaux aménagés : ainsi naquit le camping municipal du Vieux Moulin.

Le Syndicat d’Initiative créé en 1938 pour promouvoir la station, jouera un rôle prépondérant dans l’adaptation communale au tourisme naissant :

- La nomination des rues.

- Le ramassage estival des ordures ménagères et le nettoyage des rues. 

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 - La création d’un marché hebdomadaire assurant un débouché pour la production maraîchère locale

- Le bureau de poste. 

- L’aménagement de la voirie de déserte de la plage, de la forêt et des chalets du bord de mer.

Les décrets d'application de la loi sur les congés payés vont modifier l’avenir des communes du littoral.

B) Le tourisme social

La réduction du temps de travail laisse progressivement aux classes moyennes et populaires le temps de partir en vacances créant un mouvement de démocratisation du tourisme.

Les deux semaines de congés payés par an vont permettre à des centaines de milliers de personnes de prendre pour la première fois de leur vie des vacances.

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Les plages vendéennes jusque-là réservées aux bourgeois et aux notables voient affluer les salariés de la région parisienne bénéficiant des billets de congés payés à tarif réduit sur les chemins de fer.

 

 

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La jeunesse ouvrière et étudiante, peu argentée, se met à parcourir les routes, à fréquenter les plages, à vivre sous la tente et peut bénéficier de l'hébergement en auberge de jeunesse.

Pour satisfaire les exigences de ces populations urbainesles villes et les villages d’accueil durent s’équiper.

Les vacances sont un moyen d’ éduquer et de socialiser les jeunes.

Les organisations laïques, catholiques et communistes créent des mouvements de jeunesse pour encadrer la jeunesse des classes populaires.

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Ces jeunes, en raison de la concurrence des mouvements et de leur milieu social d’origine, se côtoient sur les lieux de vacances sans se fréquenter.

Encadrés par leurs moniteurs, ils se rendent à la plage en chantant des chants de marches militaires pour les uns, l‘Internationale pour les autres.

Dans les dunes et la forêt, pensions de famille, hôtels et cafés sortent de terre. 

Sous la pression touristique, les dunes, les casses et les parcelles forestières privées vont progressivement être urbanisées.

La déclaration de guerre va donner un coup de frein brutal à cette dynamique touristique.

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C ) le tourisme de masse

Après une période d’après-guerre difficile l'augmentation du nombre de semaines de congé annuel, l'élévation du niveau de vie et le développement du parc automobile vont entraîner un retour massif vers le littoral.

Paradoxalement, le tourisme balnéaire va contribuer à dégrader la qualité de l’environnement qui était à l’origine de son attractivité.

Les  Eaux et Forêts vont  céder des parcelles boisées sur lesquelles vont naître 5 nouveaux parcs résidentiels :

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- Le Parc des Nolleaux en 1951,

- Le Parc SAINTE -ANNE en 1954,

- Le Parc des Jards et le Parc de la Pointe du Rocher en 1956

- Et enfin le plus important, le Parc Clémenceau en 1957 sur une zone de trente hectares divisé en 314 parcelles.

L’espace construit se densifie le long des voies transversales  d’accès aux plages. Routes et constructions mettent en péril les surfaces dunaires et boisées 

Construction d'immeubles dans les dunes

 

Dans la décennie 1970-1980, le déferlement estival sur la forêt et les dunes va atteindre son apogée.

En  1970, le promoteur Merlin obtint  l’autorisation de construire dans les dunes de Saint Jean de Mont des immeubles de plus de 5 étages et des équipements, bars, discothèques, restaurants de plage et équipements sportifs,  destinés à satisfaire les besoins des baigneurs.

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Pour protéger la Tranche de l’ambition des promoteurs, le conseil municipal approuva un règlement d’urbanisme local  interdisant sur le territoire communal toute construction de plus d’un étage pour les maisons particulières et de 2 étages pour les résidences hôtelières.

Grâce à ce règlement, lorsqu’on survole  les 13 kilomètres de sa  façade maritime, on voit que c'est la seule commune du littoral  dont les immeubles ne dépassent pas la hauteur des pins.

La construction de nouvelles villas se développa donc sur le mode horizontal amenant à découvrir un autre inconvénient : l'étalement des zones urbanisées.

Le long de la route de la plage de la Terrière à travers la forêt, les vignes abandonnées des casses se lotirent. La casse à Poiraud et la casse d’Espagne  s’urbanisèrent.  puis, sur la route du  phare, la casse des Cabanes devient le  lotissement des Quichenottes.

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Le remembrement des parcelles privées disséminées dans  la forêt et la création d’Associations Foncières Urbaines de  la zone forestière du Phare en 1979  suivie de celle des Cabanes (futur lotissement des Quichenottes) vont rendre  constructibles des surfaces de  dunes et la forêt.

Sous condition de  conserver  50 % des surfaces en zone forestière,  et pour celle du Phare,de prendre en charge l'entretien de 35 hectares de dunes et les accès à la mer, les propriétaires  de parcelles obtirent  le droit de viabiliser et de construire.   

Sous l'influence des guides touristiques et des affiches publicitaires,  le flux des touristes augmenta sur la côte  durant la saison estivale au bénéfice de l’économie tranchaise.

La population de la commune passa de 2700 habitants en période hivernale à 120 000 au mois d’août. Les résidences secondaires représentèrent 80 % des habitations de la commune.

En 1994, les permis de construire délivrés atteignirent le nombre record de 380.

L’inadaptation des réseaux, notamment du traitement des eaux usées face la croissance  de l’urbanisation  et les conséquences de la fréquentation touristique sur une forêt encore fragile inquiétèrent les Eaux et Forêts.

La prise de conscience du risque de disparition de la forêt va entraîner une démarche collective :

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La loi Littoral  imposa le libre accès au rivage par la création d’un sentier littoral ouvert au public.

Le Conservatoire du littoral  encadre l'aménagement de la côte pour la protéger des excès de la spéculation immobilière et cherche à favoriser un tourisme rétro littoral.

La forêt associée à l’océan et aux marais devient un capital environnemental communal et se trouve intégrée en grande partie dans le site Natura 2000 du Marais Poitevin. 

Le rôle des forestiers a changé : l’entretien reste une part prépondérante de leur travail mais les objectifs principaux sont devenus la protection des milieux et l’accueil du public.

Depuis 2015 , après avoir estimé le potentiel de constructions annuelles à 80 logements, déla municipalité décida de freiner l’extension sur les zones boisées et les dunes en priorisant la restauration des maisons anciennes, en comblant « les dents creuses » et en encourageant la division parcellaire au sein du tissu urbain de la commune.

Créé en 2016 le Comité de Massif qui associe l’ONF, les collectivités territoriales et les associations propose une gestion forestière durable en différenciant des sites d’accueil et des zones protégées.

Plusieurs itinéraires parcourent la forêt entre Jard-sur-Mer et La Faute-sur-Mer :

- Le sentier côtier de randonnées,

- La piste cyclable de 19 km serpente entre plages et dunes boisées dotées de nombreuses aires de pique-nique.

- Le site de la pointe d’Arçay est devenu une réserve biologique et un outil pédagogique.

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Le risque d'érosion par piétinement dunaire reste en outre  le même que par le passé.

De fait, pour permettre de concilier la croissance de la fréquentation touristique et la préservation d'un patrimoine écologique fragile, le public doit accepter la contrainte d’être guidé à travers les 330 ha de la forêt domaniale par  des itinéraires balisés et délimités par des clôtures.

 

 

 

 

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5 mars 2023

SOMMAIRE

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PREFACE :GENESE DU PROJETde la...

PUBLICATION : L’AIGUILLON AVANT...

PUBLICATION :  ECLUSES TRANCHAISES

PUBLICATION : NAISSANCE POINTE D'ARCAY

PUBLICATION : JADIS LA TERRIERE

PUBLICATION : EXPÉDITION PAR  LE PETIT TRAIN

PUBLICATION:PREHISTOIRE DE L’ESTRAN  

 

PUBLICATION : VIE DE FEMME A LA TERRIERE...

PUBLICATION : LA RECOLTE DU GOUEMON

PUBLICATION :L'ESTRAN NOURRICIER

PUBLICATION LES BOUCHOTS DE LA BAIE...

SYNOPSIS DU CLIP N°2 : L’AIGUILLON...

SYNOPSIS DU CLIP N°4 : NAISSANCE DES...

SYNOPSIS DU CLIP N° 7 : LES COURTINES...

SYNOPSIS DU CLIP N°9 : BOUCHOLEUR DE...

SYNOPSIS DU FILM N° 2 : LA POINTE DE LA...

EXPOSITION N° 8 :LA FORÊT AU SECOURS DES...

SYNOPSIS DU CLIP N° 5 : NAISSANCE DU...

SYNOPSIS DU CLIP N° 1 L'AIGUILLON...

SYNOPSIS CLIP : LES ECLUSES A POISSONS...


24 février 2023

PREFACE : Genèse du projet de la collection « Les Tranchais et l’estran »

 Génèse de la collection : « Découverte de l’histoire du littoral du sud de la Vendée »

Né au village de la Terrière en 1946 dans la maison de ses grands-parents, l’auteur y passe toutes ses vacances scolaires jusqu'à son entrée à la faculté de Médecine.

Accompagnant, de jour comme de nuit et en toutes saisons, les anciens du village de la Terrière, les « villageats », il découvre les ressources de ce « garde-manger » naturel qui avaient fourni à ses ancêtres de quoi couvrir leurs besoins essentiels et permis de survivre en autarcie dans un environnement hostile et isolé.

Ces paysans de la mer l’initient à leurs techniques, jalousement transmises de bouche-à-oreille aux « membres de la famille ».

Il apprend à « lire l’estran » en fonction de la lune, des marées, des vents et de la forme des vagues.

Revenu habiter au pied du phare du Grouin, il assiste à l’extinction progressive des derniers porteurs de la culture maritime locale qui l’avaient éduqué.

Inquiet de voir disparaître ses « maîtres » sans qu’ils aient pu transmettre leur savoir aux générations futures, il fait le projet de créer un support pour léguer à ses petits-enfants l’histoire de ces figures emblématiques qui avaient marqué sa jeunesse.

En juin 1994, il contacte les témoins survivants et leur propose de participer à un travail de mémoire pour assurer la transmission de l’histoire collective du village avant l’essor du tourisme.

Cette démarche lui permet de rassembler une quinzaine des villageois qui l’avaient guidé durant son « apprentissage ».

Il commence en 2001 à élaborer son projet : enregistrements,  rédaction des  textes, collecte de cartes postales anciennes et réalisation des photographies de l’estran tranchais.

En 2011, ce concept prend un virage en bénéficiant d’un collaborateur informaticien, Patrice ANCIAUX.

Ainsi est née l’ambition de rendre accessible l’histoire des rapports des tranchais et de l’estran, en éditant des brochures largement illustrées de présentation ludique pour les enfants.

Le hasard des rencontres les met en contact avec Stéphane Geffard, responsable des Cinémas Bocage Côte Sud Vendée et directeur du complexe Agnès Varda de la Tranche- sur – mer qui a pour projet de créer une section « Patrimoine ».

Les textes sont convertis en films.

Ces films sont projetés sur grand écran,  dans des conditions techniques optimales, dans les salles de cinéma de la Tranche-sur – mer, de l’Aiguillon et de Jard.

À la surprise générale, chacune des 30 projections se déroule salle comble.

La découverte de l’histoire de leurs ancêtres passionne les autochtones mais aussi les vacanciers qui retrouvent dans ce mode de vie des similitudes avec celui de leurs propres familles.

En 2016, Michel DALMET, professionnel du cinéma nouvellement retraité à la Tranche met à disposition ses talents. Il prend en charge le montage et l’illustration musicale de cinq nouveaux films.

En 2019, en coopération avec la Municipalité, est créé le « Parcours du Patrimoine » constitué de 10 expositions permanentes disséminées entre l’Office de Tourisme, le Parc des Floralies, la place de la Mairie et celle de la Terrière.

 

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24 février 2023

PUBLICATION : L’AIGUILLON AVANT L’EPOQUE DES MOULES

 

  

 L’AIGUILLON AVANT L’EPOQUE DES MOULES

Port de l'Aiguillon

 

Port de commerce de l’évêché de Luçon et de l’abbaye de Saint Michel en L’Herm, depuis le Moyen-Age, L’Aiguillon assurait l’embarquement du blé, produit par la riche plaine de Luçon, le transport de bois et du sel.

 

Bateaux en attente de place à La ROCHELLE

 

En raison de sa rade abritée des vents d'ouest  et de sud-ouest et du tirant d'eau dans le  lit de la rivière, la baie de l'Aiguillon offrait un mouillage et un abri aux bateaux transitant vers le port de la Rochelle.

 

Traversée du Lay à L'AIGUILLON

 

En 1842 la rivière était  large de 437 mètres.Faute de pont pour accéder à LaTranche la traversée du Lay s’effectuait en barque grâce à des passeurs 

  

Quai du port de Luçon

 

 

Sous l’influence du port de Luçon, une intense activité  maritime commerciale apparut sur le Lay, elle atteignit  son apogée en 1869.

 

 

Port de L'Aiguillon

 

Son trafic s’était multiplié par 5 entre 1826 et 1869, année où plus de  600  navires de cabotage  y abordèrent  grâce à  ses estacades. 

 

 

Port de MORICQ

 

 

Moricq  était  le  plus important port de transit du département grâce à l'embarquement de céréales, de la production maraichère et de vin  des agriculteurs tranchais et de l'importation de  bois  et du charbon.

 

 

Tranchais livrant leur production

 

Faute de pont, un bac assurait à mer haute, la traversée des charrettes de pommes de terre, d’oignons d’ail et de  haricots.

 

 

Construction de la passerelle en 1904

 

 

Une passerelle transitoire en bois fut installée en 1905.

 

 

Passerelle franchissant le Lay

 

Elle permit aux Tranchais de traverser la rivière à pied et d’accéder à la gare de  L’Aiguillon- Port, créée en 1901.

 

 

Aiguillon : ponton d'embarquement

 

Dans cette époque d’euphorie commerciale, les élus locaux sollicitèrent en vain de l'État  l'aménagement d'un vrai quai d’embarquement.   

                                      

 

Le bac pour la traversée

 

Malheureusement l'envasement du lit de la rivière limita  progressivement  l'accès aux estacades et interdit  le chargement et de déchargement des bateaux de  plus de 3 m de tirant d'eau.Moricq devint inutilisable.

 

 Chenal du port des Sables

 

Le trafic se détourna vers  le  port des Sables qui devint le port de commerce de référence  de la Vendée.

 

 

 

Aiguillon : Barques à fond plat

 

Confrontés à la diminution de leur activité commerciale, les Aiguillonnais relancèrent pour survivre, leur tradition ancestrale de pêche de proximité au filet  sur des barques à fond plat.

 

 

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Puis en 1890 pour  suivre l’exemple de leurs voisins de Charron, Ils obtinrent de l’administration maritime des concessions  pour implanter des bouchots à moules dans l’embouchure du Lay  et devant la pointe d'Arcay.

 

 

 

Préparation des moules pour la vente

 

 La mytiliculture exige de courts délais de commercialisation.Par chance, l’Assemblée Départementale vota des crédits pour investir  dans de nouvelles activités économiques sur ce territoire :

 

 

Réseau ferroviaire port de Luçon

 

 

- La mise à niveau de la voie maritime par l’achèvement du bassin à flot et aménagement du port de Luçon.

 

 

Gare de l'Aiguillon

 

 - L'ouverture de la ligne ferroviaire du réseau  secondaire dit  « le petit train » de  L'Aiguillon raccordée au réseau national  à Luçon.

 

Traversée de St MICHEL en l'Herm

 

 

 - La voie routière départementale à grande circulation n°46  Luçon – L’Aiguillon.

 

 

Petit train en gare de l'Aiguillon

 

 

 - et surtout de la réalisation d’une voie secondaire des Tramways de la Vendée du port de Luçon à celui de l’Auiguillon.

 

Mise en sacs des moules pour expédition

 

La  mytiliculture moderne put s’implanter.

Les moules chargées  dans de grandes panières de 50 kg,  les« mannequins » purent être  expédiées  à Bordeaux, Poitiers ou Paris dans meilleurs délais suivant deux trajets :

 

Chargement des moules dans le petit train

 

 

Soit par  voie ferroviaire par le « petit train ». à partir  de la gare du Port.

 

chargement du camion vers les halles

 

 

 Soit   par voie  routière vers Nantes ou Bordeaux.

 

 

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Malgré la décision prise en 1900 par l’assemblée départementale de construire un pont sur le Lay, le projet resta virtuel pendant une dizaine  d’années. Les aléas de la traversée de la rivière en barque, bien que pittoresque, représentaient encore un frein à l’expansion d’un tourisme naissant.  

Ouverture du pont de L'Aiguillon

 

Le  pont en béton de 2,40 m de largeur attendit  1911 pour être ouvert à la circulation.                                                                                                             

Apparition des premiers touristes

 

Le port de commerce de l’Aiguillon n’était plus qu’un lointain souvenir.

Pour jouir de son ensoleillement et de ses plages de sable fin, les  premiers estivants accoururent vers les plages du sud de la Vendée.

 

 

  

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24 février 2023

PUBLICATION : LA NAISSANCE DE LA POINTE D’ARCAY

 LA NAISSANCE DE LA POINTE D’ARCAY  

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 Sous  l’action conjuguée de la dérive littorale,responsable d’une accumulation de sable venu de l’Ouest… 

 

 

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… et des alluvions nés des travaux de détournement du Lay ....

 

 

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  ….. va naître sur sa rive droite de la rivière, un dépôt de sédiments (une « batture ») créant progressivement une vaste étendue de laisse de mer.

 

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En cinq siècles  va se constituer une presqu’ile longue de 8 kms.

 

 

 Depuis le début du XVIIe siècle, la cartographie permet de suivre la progression de cette longue presqu’ile migrant sous l’action des vents, de la houle, des marées et des crues de la rivière.

-  En 1627, sur la carte de Visscher, la pointe d’Arcay n’existe pas.

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La pointe de l’Aiguillon nommée pointe de la Raque limite le rivage. Un vaste banc de sable celui de la « Grande Jument » est signalé à l’ouest.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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 -   En 1674, selon Epault des Parée :

Le profil côtier ne s’est guère modifié.

La sablière (« les Graves ») se situe en face des ruines du fort de  l’Aiguillon.         

 

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 -  En 1695, sur les cartes établies par Nicolas de Fer et en 1705 par Claude Masse :

La rivière de Saint Benoît, appelée le Lay, après un trajet tortueux ...

 

 

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... se jette à la mer au niveau actuel de la Belle-Henriette dans l’anse de Croy au lieu-dit la Conchette, par un large estuaire comprenant plusieurs bras.

 

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Au XVIIIe siècle , Claude Masse, ingénieur du roi Louis XIV, rédige un mémoire sur l’état du rivage et son éventuelle exploitation militaire.

Dans le cadre de sa coopération avec Vauban, commissaire aux fortifications, il réalise le relevé cartographique des côtes du Bas Poitou, des pays d’Aunis et de Saintonge en vue de la conception d’ouvrages défensifs ou  d’aménagements hydrauliques.

Il  fait des descriptions précises de l’estran, de ses ressources et des possibilités de débarquement des troupes.

Selon ses commentaires qui accompagnent la carte du territoire, dite « du Neuvième Carré » , la contrée a  peu d’intérêt sur le plan militaire . 

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A partir de 1720 l’embouchure du Lay commence nettement à se modifier :

Pour la première fois, on voit apparaître une ébauche de changement de direction de la rivière et un banc de sable sur sa rive ouest.

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Selon l’auteur :« L’hiver, il paraît comme une mer pour peu que la saison soit pluvieuse… »

 

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L’embouchure de la rivière :

 « est  une langue de terre formée de dunes très basses qui séparent la mer d’avec les marais

 Cette  côte n’est point accessible hormis l’anse de la Berge où la mer ne se retire que d’environ 150 toises… »

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Le cours inférieur du Lay, dépourvu de pente, est soumis à la marée.

 

 

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En raison des sables mouvants et de l’odeur de vase cet estuaire est appelé Maupas (passage dangereux) ou Port Puant.

 

 

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 « De cette rivière d’environ 250 toises (500 m) de large à son embouchure, il ne reste à mer basse qu’un canal de 50 toises de large.

 

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La rivière abandonne  son lit de la Belle Henriette, se dirige vers  la baie l’Aiguillon, laissant sur sa rive droite une lagune de dunes et de vasières.

 

 Ainsi va naitre la pointe de la Faute .

 

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 En partant de le pointe de la Roche (actuelle pointe du Rocher), les dunes mobiles, vont progresser en direction du sud.

(Schéma sur la carte de Cassini)

  

 

 

 

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- En 1750, ce massif dunaire appelé « pointe de "La Faute"atteind le  niveau du nouveau village de l’Aiguillon bâti sur la rive est de la rivière, 3 kms au-dessus de l’ancien village de la pointe de la Raque, abandonné après son engloutissement par les sables.

 

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A partir de cette latitude, les dunes prennent le nom de « Pointe d’Arcay ».

Celle-ci va s’étendre dans un axe Nord-Sud en progressant de 30 à 50 m par an.

 

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 -  En 1780 lors de la vente de « biens nationaux », la famille Chauveau, achète ce territoire de dunes incultes et de vasières issus de « lais de mer ».

 

pour extrations pour Marc

 

 

-En 1828, les propriétaires créent le premier village de La Faute.

 

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 En 1890sur la carte des  Dunes de la Tranche, d’Arçay et de l’Aiguillon » gravée par Jérome, la progression des sables vers le Sud se poursuit.

- Sur le cadastre napoléonien de 1918, la pointe dépasse la rive opposée de 2 kms.

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-  La cartographie satellitaire nous permet de réaliser la synthèse de l’avancée dunaire de 1730 à nos jours.

 

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Hasard ou don de la nature pour cette contrée dépourvue de ressources, les moules trouvèrent sur le nouvel estran,  les conditions optimales pour  naître et se développer.

 

 

Ecoulement des eaux

 

« Le doucin », eau douce issue de l’écoulement des marais dans la rivière assure :

 - une salinité moyenne constante de 25,5 g de sel par litre. 

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- un important apport de plancton et de matières organiques véhiculées par l’environnement vaseux.

 

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 S’associent à ces deux caractéristiques   

-  la stabilité de la température et à la qualité des eaux arrivant du large.

- L’absence de pollution industrielle et agricole en amont.

 

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Ces  4 facteurs représentent  les conditions idéales à la reproduction et à la croissance des moules.

La Mytiliculture sur le rivage de la pointe d’Arcay est devenue l’atout économique de  toute la baie de l’Aiguillon. 

 

 

 

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24 février 2023

PUBLICATION : LES ECLUSES TRANCHAISES

 

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  LES ÉCLUSES TRANCHAISES DU PHARE DU GROUIN DU COU

 

  

 

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En ce début du XXIsiècle, le promeneur qui circule à marée basse sur l’estran rocheux devant le phare du Grouin du Cou peut s’interroger sur l’origine des doubles rangées de grosses pierres triangulaires disposées parallèlement ou perpendiculairement au rivage et soigneusement emboîtées.

 

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Cette architecture élaborée, couverte d’algues et de coquillages, bien qu’à peine discernable des rochers avoisinants, relève manifestement d’une entreprise humaine. Il s’agit des fondations d’anciens murs de pêcherie poissons appelées« écluses ».

 

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Édifiées au Moyen Âge, quelques-unes sont encore entretenues sur les îles de Ré et de Oléron.

  

 

 

 

 

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la Tranche , "l'écluse des Denis",face à la maison du Corps de Garde a été restaurée de 2010 à 2013.

 

 

 Quel était leur principe de fonctionnement ?

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Ces enclos de pierres, semi-circulaires ou rectangulaires, d’environ 100 mètres de longueur et de profondeur, étaient construits sur l’estran rocheux à la limite du sable appelée « pet de caille » (le pied de caillou).

 

 

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À mer haute, les poissons, attirés par les crabes mous, les alevins et les crevettes venus se reproduire à l’abri des murs sous les algues fucales s’aventuraient pour festoyer.

 

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Conséquence néfaste pour eux , lors de  la mise à sec des pêcheries à mer descendante,...

 

 

 

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...ils se faisaient piéger derrière les portes de vidange à claire-voie.

 

  

Que sait-on de leur origine?

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 Les rares informations à notre disposition datent du Moyen Âge. Elles proviennent des cartulaires des abbayes de Talmont et de Saint Jean d’Orbestier. On peut estimer qu’à partir du début du XIIe siècle,commença la phase de colonisation agricole du littoral, par l’exploitation des terrains conquis sur la mer.

 

  

 À la fin du XIIe siècle :

Quatre documents permettent d’affirmer qu’il existait un village nommé la Tranche, une église et des écluses à poissons sur l’estran :

Capture  – Un legs rédigé en ces termes : « est donnée à l’abbaye, une terre dans les sables, près de La Tranche, pour construire une église et faire ce que conviendra tant en habitation qu’en culture. »

  – Un descriptif du village :« il est entouré de lagunes nées des ramifications du lit du Lay qui se jettent à la mer immédiatement à l’est ».

 

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 – Un registre de la même époque fait état « d’un don d’écluse à poissons reçu sur l’estran tranchais ».

– Une charte d’Avril 1227 : Savary de Mauléon aurait épousé en secondes noces sa concubine Amable du Bois, dans la chapelle Saint Nicolas de La Tranche située près de l’Anse du Maupas sur une parcelle de terrain léguée en 1120 par Etienne de la Jarrie au seigneur – abbé de Talmont.  

 

 

La survie des premières générations de « paysans de la mer » dans cet environnement hostile dépendait d’une double activité agricole et maritime. Ils construisirent leurs habitations derrière les dunes, à l’abri du vent, à proximité de leurs parcelles cultivées grâce au goémon appelé « sart », seul engrais à leur disposition pour amender ce terrain stérile.

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Dans un premier temps, ils plantèrent de l’ail, des oignons, des fèves romaines et des haricots adaptés au terrain sableux.

Puis, faute d’autre ressource alimentaire, ils exploitèrent l’estran.

 

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Outre le ramassage des crustacés et coquillages, ils édifièrent sur l’estran des pièges à poissons. Ainsi naquirent les premières écluses tranchaises du Grouin construites avec des pierres extraites du plateau rocheux.

 

59 bis

 

En 1681, l’ordonnance de COLBERT va lutter contre les conséquences des abus de la pratique de ces pêcheries sur la reproduction et la survie des alevins.Pour la première fois la loi codifie les caractéristiques des constructions autorisées et le maillage des portes d’évacuation en période d’alevinage :

« Les parcs seront construits de pierres rangées en forme de demi-cercle et élevés à la hauteur de quatre pieds au plus, sans chaux, ciment ni maçonnerie.

 

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Ils auront dans le fond, du côté de la mer, une ouverture de deux pieds  largeur qui ne sera fermée que d’une grille de bois ayant des trous en forme de mailles d’un pouce au carré, depuis la Saint-Rémy jusqu’à Pâques, et de deux pouces au carré de Pâques jusqu’à la Saint-Rémi ».

 Les écluses du Grouin au début du XVIIIe siècle:

Le mémoire de Le MASSON du PARC rédigé en 1728 est le premier document administratif qui fait état du nombre, de la localisation et du nom des propriétaires des 7 écluses tranchaises qui existaient à cette époque :

Deux étaient implantées de part et d’autre de l’embouchure de la rivière de Saint Benoît :

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* L’une à l’est, nommée la Grande Ecluse, abandonnée et en ruine.

* L’autre à l’ouest de l’embouchure appartenait à Perret et consorts.

 Trois autres étaient accolées entre la pointe de Grouin et la pointe de la Ribarde :

 – Celle du Gréant au-delà de la pointe.

 – L’écluse à Grolot mitoyenne à la précédente , suivie de celle de la Calogeat.

 

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– Plus au sud, celle de la Vieille Roche, propriété de Daniel Dupuis.

-  La dernière l’écluse du Port, construite à la pointe du Chiquet, appartenait à Pierre Bouchet.

 

 

 Après la Grande Guerre : les premiers témoignages photographiques :

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Pour faire face à la pénurie alimentaire qui suivit la « Grande Guerre », les survivants aidés par les veuves et les enfants reconstruisirent et remirent en état les écluses.

À partir du début du XXe siècle, la photographie apportera de nouveaux témoignages sur l’implantation des écluses.

 

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En 1920, la DDE maritime recense par voie aérienne les pêcheries du littoral.Ces documents sont conservés à la photothèque nationale.Huit pêcheries étaient implantées sur l’estran tranchais.

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Les quatre de la pointe du Grouin, face à la maison du Corps de Garde :

- Celle des habitants de la Terrière, « les villageats » au nord.

- Celles des familles Denis, Dupuy et Boisdet.

 

 

 

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– Les deux écluses hautes des Génerelles : celle de Cornil le gardien du phare et celle de Belloni, le sacristain.

 

 

 

 

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 - Les deux écluses de la pointe du Chiquet : celle de la République et celle du Port.

 

 

 

Quelles étaient les étapes de la construction des murs d’une écluse ?

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 Le choix du lieu d’implantation et sa conception supposaient une connaissance des mœurs du poisson et de la faune qui les attire et les nourrit.

Plus qu’une technique, il s’agissait d’un art résultant de données recueillies par des générations d’observateurs et transmises oralement.

Il était confié au flair et à l’expérience du chef d’écluse et longuement débattu avec les anciens.

L’utilisation de la topographie de l’estran était déterminante pour le futur rendement de l’écluse.

Toutes les particularités topographiques étaient exploitées :

 

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- Les variations brutales du niveau du sol liées à l’érosion  étaient utilisées à créer un axe de circulation du poisson.Leur abri favorisait l’implantation d’algues fucales où se dissimulaient les alevins, les crevettes et les crabes convoités par tous les prédateurs. 

 

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 - La présence de pholades, coquillages qui creusent la pierre, nommés localement « dailles », était un atout car les poissons en raffolent.

 

 

 

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Si le profil du terrain ne présentait pas d’excavation naturelle, on creusait par « débanchage » une dépression de quelques mètres pour la vidange.

En fonction de leur localisation, les écluses étaient plus ou moins « pêchantes ».Les meilleures écluses étaient les plus basses.

 

Elles se vidangeaient totalement au-dessus d’un coefficient de marée de 65. Les quatre étaient situées devant la maison du Corps de Garde. 

Les écluses hautes (celles de Cornil, de Belloni et celle du Port) asséchées par faible coefficient étaient moin rentables. 

CaptureLes étapes de la construction 

 

De forme variable, demi-circulaire ou rectangulaire, la construction devait s’adapter à la forme de l’estran.

 

 

 

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La pierre était extraite sur place par « débanchage » à la pioche ou à la barre à mine à l’intérieur du futur enclos.Les zones de prélèvements sont encore visibles sur l’estran dans les parties creusées pour les évacuations dites « vannes » qui accéléraient la vidange d’une dépression naturelle appelée la « basse ».

 

 

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 À la Tranche, l’administration tolérait le prélèvement de la pierre de mer destiné à la construction des maisons. Les pêcheurs les rapportaient à dos d’âne et les stockaient près de leurs habitations .Les murs des « collogeats » du village de la Terrière sont construits de ces pierres de banche reconnaissables par les trous creusés par les pholades.

 

 

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 - Les fondations :

Réalisées en « pierres froides »elles étaient ancrées sur la banche

– Soit par conservation d’une assise d’une quinzaine de centimètres de hauteur qui protégeait la fondation de l’attaque du flot.

 

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– Soit par création d’une mortaise, par des pierres verticales enfoncées dans le plateau rocheux.

 

 

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Les pierres de construction devaient avoir des arêtes saillantes pour se bloquer entre elles.

 

 

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 Les grosses pierres triangulaires dites « pierres à trois coins », une fois arrachées de la banche, étaient transportées à bras d’hommes, à la civière et mises en place pour constituer le parement extérieur. L’utilisation des pierres à arêtes vives, récemment extraites par « débanchage », était impérative pour assurer la stabilité de l’assise.

 

 

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L’espace entre les pierres extérieures, appelé « gouyau », était rempli de pierres roulantes ramassées de part et d’autre des fondations.

 

 

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Les écluses récemment construites restaient fragiles durant plusieurs mois, jusqu’à ce que le naissain de moules, les « nores » et les huîtres comblent les vides, réalisant un véritable mortier naturel souple et résistant qui consolidait la construction.

 

 

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  Les "croché " ou "bras" :

Les deux côtés de la pêcherie étaient constitués de deux bras appelés « crochés » ou « coués » d’une centaine de mètres de longueur. Ils s’étendaient du sable de la plage jusqu’au fond de l’écluse s’élevant et s’élargissant progressivement.

 

 

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Près du rivage, ils étaient limités à deux rangées de pierres, d’une trentaine de centimètres de hauteur sur un mètre de largeur.

 

 

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Ils atteignaient au fond, une hauteur de 1,70 mètre et une largeur de 2,50 mètres.

 

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 -  Le fond ou "la fonte" :

C’était l’endroit le plus profond de l’écluse, il s’ouvrait vers la mer par les portes de vidange appelées « boucheaux ».

 

 

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Les évacuations étaient fermées par des portes à claires-voies qui permettaient l’écoulement de l’eau.

 

 

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En fonction du profil de l’estran, certaines écluses possédaient plusieurs portes pour accélérer la vidange à mer descendante.

À la Tranche ces claies étaient construites par juxtaposition de barreaux en bois.

 

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Selon les anciens, ces troncs de jeunes sapins, coupés au printemps, devenaient imputrescibles . Points faibles de la construction face aux attaques de la mer, les claies étaient bloquées par des traverses pour s’opposer à la pression de la mer montante et des vagues. 

 

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Ces portes étaient renforcées par « les ailes de boucheaux », grosses pierres placées perpendiculairement au mur, mesurant trois ou quatre mètres de longueur destinées à « casser les vagues »

 

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Ces ailes se prolongeaient à l’intérieur sur une longueur de deux mètres pour protéger la claie à mer descendante.

 

 

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- Le "galeyage" Le point le plus creux de l’écluse était souvent pavé d’un dallage de pierres posées verticalement : le « galeyage ».

Disposé dans l’axe de l’évacuation, il avait pour but de guider le poisson vers une cavité naturelle pour le capturer.

 

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   "La crête" : Le rendement d’une écluse dépendait de la planéité du sommet du mur : « la crête ».Ce faîtage devait être rigoureusement horizontal sur toute sa longueur.Tout affaissement, de quelques centimètres, créait à mer descendante, un courant  d'évacuation appelé « la tire » que suivait le poisson pour s’échapper.

 

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 La signalisation : En raison des risques pour la navigation, l’administration imposa à partir du XIXe siècle, le balisage du mur le plus avancé dans la mer.

La balise devait avoir une longueur de trois mètres, à son extrémité devaient être affichés le nom de l’écluse et son numéro d’identification.

 

  

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À la Tranche, seules 2 écluses furent balisées :

- celle de la Petite Ecluse par un fer rond de 5 centimètres de diamètre à la porte sud.

- celle des Denis par un fer en U, visible sur cette carte postale,

 

 

 Quel était l’aspect général d’une écluse terminée ?

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La surface moyenne des écluses tranchaises était d’un hectare environ, modeste par rapport à celles des îles de Ré ou de Oléron. Elles avaient une profondeur et une largeur de 100 mètres.Ces écluses représentaient un volume de 1 200 m3 de pierres à extraire et à transporter à la main. La durée de la construction moyenne était de 15 000 heures de travail, assurées par les codétenteurs, propriétaires du droit de pêche. Le chantier était possible aux périodes de grandes marées et déserté pendant les vendanges et les tempêtes hivernales.

Pour rester dans les délais, il fallait parfois embaucher des journaliers rétribués sur la base de « marée d’écluse », comprenant le temps de travail à la mer et le temps de trajet.

 Comment fonctionnait une équipe d’écluses ?

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Les écluses tranchaises appartenaient à des agriculteurs ou à des commerçants souvent membres d’une même famille, qui les exploitaient et les réparaient eux-mêmes.

L’équipe était familiale, le plus souvent limitée à trois membres (l’écluse de la République).Le nombre maximum des équipiers ne dépassait pas six (pour la petite écluse).

Cet effectif réduit autorisait une rotation rapide du droit de mareyage : le rythme (de trois à six jours) selon les écluses était régulier.

Le chef d’écluse, seul créancier reconnu par l’administration, réglait la redevance et la répartissait auprès de ses équipiers codétenteurs.

Il attribuait à chacun, un tour de marée de 24 heures (une marée de jour et une marée de nuit).

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Le fonctionnement quotidien imposait un partage des heures de travail pour l’entretien et la construction.

En cas d’absence, l’équipier devait rétribuer, à ses frais, un remplaçant pour assurer sa part de travail.

Les contraintes d’entretien et de maintenance étaient pesantes surtout en période hivernale.Les tempêtes arrachaient les pierres de parement et créaient des brèches. Toute brèche négligée prenait rapidement de l’ampleur.

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En cas de brèche limitée, le détenteur du tour de marée réparait lui-même les dégâts.

 

 

 

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Si la brèche était étendue, il devait immédiatement prévenir le chef d’écluse et rassembler toute l’équipe pour poser des « clés ».

 

 

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 Ces clés étaient réalisées avec de longues pierres d’un mètre de longueur et d’une centaine de kilos, posées à plusieurs hommes, dans l’axe longitudinal du mur.En cas de dégâts importants, la réparation nécessitait une reconstruction complète. Elle imposait l’aide d’une charrette et d’un cheval.

 

Le coût moyen des réparations et de la maintenance représentait jusqu’à 15 % du prix de la construction en « marées d’écluses ».  

 Pour mareyer la nuit, il fallait s’éclairer.

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Jusqu’au XIXe siècle, on se contentait d’un baquet en bois muni d’une vitre pour protéger la flamme de deux bougies. Un coup de vent ou un coup de queue d’un mulet, sur la vitre suffisait à éteindre cette fragile source de lumière.

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À partir de 1930, apparaîtra la lampe à carbure qui sera perfectionnée après-guerre par l’utilisation d’un réflecteur de phare de voiture.

 

Quel était le rendement d’une écluse, la quantité et les espèces capturées ?

Pour être plus spectaculaire, comme pour le poids d’un nouveau-né, celui de la pêche était évalué en livres et non en kilos. Une écluse assurait l’approvisionnement de la famille et de son environnement immédiat. Le ramassage des crabes et des coquillages compensait alors la bredouille.

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Le panier de pêche quotidien était diversifié. Il comprenait quelques mulets ("meuilles"), bars ("loubinias" francs ou mouchetés), tacots, dorades ou chinchards.

 

 

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La « santé », sorte de petite sardine qui évolue par bancs compacts, se faisait souvent piéger en s’abritant près du rivage pour fuir les prédateurs. Si, à son arrivée, le détenteur de l’écluse découvrait le banc de sprats, il bloquait immédiatement l’évacuation de la claie.Il accumulait des algues fucales ou mettait en travers une treille, pour leur couper toute possibilité de fuite.

 

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La récolte pouvait atteindre 10 kg et nécessitait parfois la mise à l’eau du "sennia"Les poissons plats, soles, turbots, plies, raies torpilles appelés « trembles » ou raies pastenagues dites « terres » se péchaient dans la Petite Écluse, proche du platin sableux .

 

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En dehors de l’arrivée massive des bancs de mulets de vendange, en septembre, ou les prises pouvaient atteindre plusieurs centaines de kilos dans toutes les écluses, le rendement habituel moyen était de quelques kilos par jour.

Faute de maîtrise de la conservation par salaison et l’absence de réfrigération, les tentatives de commercialisation des pêches exceptionnelles ne dépassaient guère les limites géographiques des villages des Conches et de Longeville. 

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Entre le 15 avril et le 15 mai, débutait enfin la pêche aux seiches venues pondre devant le rocher de sainte Anne dans la fosse des Corres.

On en capturait à la fourche dans toutes les coursives de Sainte Anne et de la Grière et dans les écluses de Grouin. 

 

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Celles qui s’échouaient sur le rivage, amputées de leur tête par les marsouins, après avoir séjourné 24 heures dans l’eau de mer, étaient plus prisées que les seiches fraîches (car coriaces).

 

 Déclin et disparition des écluse :

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La culture maraîchère spécialisée et spéculative remplacera progressivement la production d’autosuffisance et libérera les tranchais des contraintes de l’exploitation des écluses.

 À partir de 1930, l’augmentation de la production des terrains agricoles protégés par la forêt plantée depuis 40 ans, leur permettra de créer une économie de jardinage.

 

 

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En 1936 les congés payés, l’amélioration de la desserte ferroviaire et routière, créèrent de nouvelles opportunités.

 

 

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La manne du tourisme était née et les écluses continuèrent à perdre de leur intérêt. La période de guerre de 1940 à 1945 porta un nouveau coup à leur destinée.

 

 

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À partir de 1943, l’estran fut interdit par les occupantsA la libération, signe  symbolique de la fin d’une époque, les troupes allemandes firent sauter le phare du Grouin lors de  leur retraite précipitée.

 

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L’exode rural massif de l’après-guerre  rompit  la chaîne de transmission du savoir-faire.

Les jeunes s’expatrièrent pour trouver du travail . En arrivant ,valise en main à Paris pour chercher du travail  ils  abandonnèrent les écluses à leur destin.

 

 

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L’arrêté de mai 1965 , interdisant la transmission des écluses  en cas de décès. rompit la chaîne patrimoniale.Les détenteurs de concessions  furent invités à détruire leurs murs.

Faute de motivation, la mer se chargea de cette mission .

 Le décret du 25 janvier 1990 mit définitivement fin « à la création et au renouvellement d’écluses à poisson en pierre, en maçonnerie ou tout autre matériau ».

 

 CONCLUSION

Pendant dix siècles, les écluses ont fourni aux Tranchais, un apport alimentaire régulier en poissons, qui leur a permis de survivre durant les périodes de famine.

Au début du XXe siècle, la création de voies d’accès a modifié le fonctionnement de cette société jusqu’alors repliée sur elle-même et vivant par nécessité en autarcie.

Les volontaires à se lever durant les nuits de tempêtes hivernales pour réparer les brèches des murs d’écluses se raréfièrent.

En s’expatriant, leurs descendants ont totalement perdu la connaissance accumulée et transmise oralement pendant des siècles sur les techniques de construction et d’entretien de leurs ancêtres.

Comme dans les iles de Ré et d'Oléron, certains retraités revenus au pays, nostalgiques de leurs souvenirs d’enfance, ont reconstruit une écluse suivant les techniques ancestrales.

 Bien qu’aidés par les progrès de la mécanisation pour la manutention, ils découvrent à chaque tempête les difficultés d’une telle entreprise.                                                                                                                                

                             LEXIQUE SUR LES ECLUSES 

- « Assette » : assise des murs.

 - « Basse » : point le plus bas de l’écluse restant rempli d’eau à marée basse où se rassemblaient les poissons piégés.

 - « Banche » : variations brutales du niveau du sol liées à l’érosion des strates du plateau calcaire pouvant atteindre cinquante centimètres.

 - « Bourolle » ou « Bourgne » : nasse en osier ou en filet tendue sur l’évacuation d’une courtine.

 - « Boutouillon » : panier de marée en osier.

 - « Boucheaux » ou « Bouchots » : murs de renfort disposés perpendiculairement aux portes d’évacuation pour protéger les claies.

 - « Callogeat » : dépendance des maisons.

 - « Casse » : dépression du sol de l’estran retenant l’eau à marée basse.

 - « Coutelle » : outil servant à soulever les pierres.

 - « Courtine » : entassement de pierres canalisant la vidange d’une casse vers un piège en osier ou en filet.

 - « Claie » : ouverture à claires-voies pour permettre l’évacuation de l’eau.

 - « Clés » : grosses pierres disposées en chaînage dans l’axe du mur pour réparer les brèches.

 - « Croché » ou « Coué » : murs latéraux des écluses.

 - « Crochet à banche » : outil utilisé pour extraire les tourteaux et les congres des trous creusés dans la banche.

 - « Crête » : sommet du mur d’une écluse.

 - « Débanchage » : extraction de pierres de banche à la pioche ou à la barre à mine.

  - « Écluse » : pêcherie à poissons en bois ou en pierre implantée sur l’estran.

 - « Fouëne » : fourche à quatre dents pour transpercer les poissons plats.

 - « Galeyage » : pavage du fond de l’écluse par des pierres verticales.

 - « Gouyau » : espace entre les deux rangées de grosses pierres parallèles du mur de l’écluse.

 - « Golfe des Pictons » ou « Lac des deux Corbeaux » : vaste mer intérieure qui couvrait l’actuel marais poitevin. Elle s’étendait de Longeville à Niort et était navigable.

 - « mareyer » : faire la pêche dans une écluse.

 - « Maison du corps de garde » : local des douaniers construit au sommet de la dune.

 - « Passerelle » : chemin d’accès au rivage entre deux écluses.

 - « Pet de caille » : frontière entre le sable de la plage et le rocher (pied du caillou).

 - « Pierres à trois coins » : pierres triangulaires utilisées de chaque côté de la base du mur.

 - « Pierres froides » : pierres de construction posées sans mortier.

 - « Planche » : parcelle de terrain agricole.

 - « Pholade » : mollusque marin creusant des trous dans la roche.

 - « Santé » : petit poisson ressemblant à la sardine vivant en bancs.

 - « Sennia » : filet de 5 mètres tiré par 2 hommes.

 - « Taille » : impôt.

 - « Terre » : raie pastenague.

 - « Tire » : courant favorisant la fuite du poisson.

 - « Treille » : filet muni de deux manches.

 -« Tremble » : raie torpille .

  « Villageats » : habitant du village de la Terrière.

 - « Vanne » : ouverture pour l’évacuation de l’eau.

 - « Vimère » : destruction. 

 

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24 février 2023

PUBLICATION : JADIS LA TERRIERE

JADIS LA TERRIERE

 

LA  NAISSANCE  DU VILLAGE  DE  LA TRANCHE  ET  DE  SES HAMEAUX :

Au début du XIe siècle, le Seigneur de Talmont, Guillaume le Chauve proposa aux moines bénédictins de  leur céder  une partie de ses privilèges  dans le but de créer un élan économique pour fixer la population sur le littoral.

Les massifs dunaires, considérés comme sans valeur et peu attractifs, furent donnés  à des paysans.

Dunes du GROUIN DU COU

 

On peut estimer qu’à partir du XIIème siècle, commença la phase de colonisation agricole du littoral.

Ainsi, s’implantèrent dans les dunes les premières générations de « paysans de la mer » dont la survie dépendait d’une double activité agricole et maritime.

 

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Ils construisirent leurs habitations  à la limite du marais, à l’abri du vent, à proximité de leurs parcelles cultivées grâce au goémon appelé «  sart », seul engrais à leur disposition pour amender ce terrain stérile.Dans un premier temps, ils  plantèrent de l’ail, des oignons, des fèves romaines et des haricots adaptés au terrain sableux.Puis, faute d’autre ressource alimentaire, ils exploitèrent l’estran.

1685 Carte de Nicolas De FER

 

Nous retrouvons les premières traces de la création de la « paroisse »  de La Tranche à la fin du XIIème siècle dans les cartulaires des abbayes de Talmont et de Saint Jean d’Orbestier.

Aucun document ne permet d’affirmer l’existence du hameau de la Terrière durant le Haut Moyen Age.

Les premières informations  sur les hameaux tranchais seront fournis par des cartes de la fin du XVII è siècle.

Celle  réalisée par Nicolas De Fer  en 1685  situe  le village de La Tranche  et l’un de ses  hameaux , la Grière :" Entre une vaste étendue de dunes migrant sous l’influence du vent appelée « la Grande Parée » et la rivière de Saint Benoît nommée le Lay, dont les multiples bras se jettent à la mer  par un vaste delta  marécageux recouvert  par les marées, à l’est de l’anse du Maupas ".

Hameau de Culet par Claude MASSE

 Les habitations du hameau de La Terrière alors nommé  "Culet"  seraient apparues vers le XIVe siècle.

 LA TRANCHE ET SES HAMEAUX  SOUS LE REGNE DE LOUIS XIV

 D’APRES LE MEMOIRE DE CLAUDE MASSE

En 1702, Louis XIV  charge  Claude MASSE, ingénieur des fortifications, de cartographier  les côtes du royaume pour  renforcer   les  défenses  maritimes.

Celui-ci  rédige un  Mémoire décrivant les postes de défense  du littoral du sud de la Vendée, ses ressources, son activité économique et ses  voies de communications.

Il y décrit le village de la Tranche, son port, le Corps de Garde sur la pointe du Grouin et les hameaux dépendant de la paroisse : la Grière et Culet, dénomination de l’actuel village de la Terrière qui n’en a gardé que le nom d’une rue.

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"A l’ouest de la rivière du Lay ce pays est séparé de la mer par une langue de petites dune ou se situe le bourg de la Tranche.C’est   une annexe de Longeville avec laquelle  elle fait une même communauté  pour la « taille  » (impôts).  Elle consiste en plusieurs hameaux qui sont bâtis  sur le bord  des marais et des sables qui avancent continuellement et couvrent petit à petit  les maisons.Le bourg de la Tranche est situé dans les dunes qui enveloppent presque toutes les maisons de trois cotes et les ensevelissent  insensiblement." 

"Cette paroisse compte environ 80 feux qui relèvent de la principauté de Talmont. A l’ouest et au nord du village, les dunes qui sont le long de la cote ne sont  pas hautes hormis sur le bord des marais, elles diminuent du côté  de la mer.Le fond des terres n’est que sable qui se déplace dès qu’il fait un peu de vent et qui fait changer de place  les  dunes.Cet endroit est  fort sec et aride et dénué de bois. Ne peuvent y croitre que quelques peupliers,  des  figuiers et les haies  de tamarins."

"Les richesses de cette paroisse consistent  aux légumes de leurs jardins ail et oignons.  Ils  vendent aux gascons  des fèves romaines, citrouilles, choux et  haricots qui viennent très aisément dans les sentines ou bas-fonds entre les montagnes de sable.  Ils les vendent pour avoir du pain, du vin et autres nécessité de la vie. "

  

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"Comme les habitants  ne peuvent pas vivre uniquement  des revenus de ces légumes, ils se sont avisés en 1698 de planter des vignes."

 

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"Les marais qui sont à l’est de ces dunes sont impraticables en toutes saisons, exceptées  par le chemin d’Angles ou des gens de pied ou de  cheval le traversent sur la fin de l’été si l’année n’est pas pluvieuse.

L’hiver, les marais de Longeville, d’Angles et de la Tranche  paraissent comme une mer pour peu que la saison soit pluvieuse." 

 

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"L’est et le nord de cette paroisse qui n’est pas de sable ne vaut guère mieux étant un marais inondé une partie de l’année par les eaux pluviales ou  le reflux de la mer, impraticable en toutes saisons faute d’écoulement des eaux "" il est peu probable que les ennemis y fasse jamais aucune descente parce qu’ils n’aborderaient que dans des dunes où  il y a quelques mauvais villages habités par de pauvres peuples, où il ne feraient pas grande fortune. "

 

Telle est a conclusion de CLAUDE MASSE de sa mission  d’évaluation des risques de débarquement ennemi sur le littoral tranchais .

    LA TERRIERE AU DEBUT DU XXe SIECLE 

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Isolés sur une étroite de bande de sable balayée par les vents, les « villageâts » étaient prisonniers entre l’océan et les marais inondés une grande partie de l’année.

 

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Leur environnement se limitait à un étroit territoire cultivable entouré d’eau.

 

 

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En dehors du boulanger, de l’aubergiste et du négociant en grains et légumes et du forgeron, ils étaient tous agriculteurs.

 

 

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Très individualistes, ils vivaient tournés vers leurs casses cultivées entre dunes et marais et refusaient toute dépendance  et influence extérieure.

Pour survivre, ils développèrent une économie de type insulaire basée sur l’autarcie.

 

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Ils organisaient leur emploi du temps entre leurs obligations professionnelles et leur seconde activité nourricière : la pêche à pied.

Les jours de grandes marées, les habitants de la Terrière, convergeaient vers la mer à travers la forêt :

 

 

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- pour aller pêcher sur le rocher du  Grouin. par la Casse des Citronniers et le chemin de la Cabaude . 

 

L'essie aux moines

 

 - pour gagner  l’estran sableux de la Casse d’Espagne par l’Essie aux Moines.

Tous les membres de la famille avaient une tâche précise dans la collecte alimentaire.

 

 

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Les très jeunes garçons étaient en formation. Ils accompagnaient les anciens qui, de génération en génération, leur transmettaient jalousement les secrets de l’estran. Formés par leurs aînés, ils maîtrisaient les techniques qui leur permettaient de participer à l’approvisionnement alimentaire de la famille.  L’estran était leur garde-manger.

 

Quels étaient les outils du mareyeur ? 

 

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« Boutouillon », « treille », « coutelle » et « crochet à banche » constituaient la panoplie indispensable du « villageat »  partant « mareyer » son écluse.

 

 

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 Le panier de marée ou " boutouillon "

De forme typique, il était fabriqué en osier sur une armature de châtaignier et de troène par certains habitants du village, ayant hérité d’un savoir-faire familial jalousement transmis.

 

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- La "treille"

Filet de 1 m2 de surface, à petites mailles, il était manié grâce à deux manches de bois indépendants qui permettaient de régler  l’ouverture en fonction de la topographie du terrain et de déloger des poissons, qui se dissimulaient sous les pierres et les banches.

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- La "coutelle" :

C’était l’outil de base de tous les pêcheurs de l’estran.

Elle était constituée d’une lame métallique incurvée emmanchée dans une poignée de bois.

Elle avait une double utilité :

         - soulever les pierres à la recherche des crabes.

         - assommer les poissons piégés dans l’écluse.

 - Le "crochet à banche" :

De 1,50 m de longueur, recourbé de 1 cm en son extrémité, il permettait d’extraire les « crabes rochers »les  « endormi » et les congres enfouis dans les trous de la banche .

   

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 - La fourche à quatre dents ou "fouëne"

Elle était destinée à transpercer les poissons plats dissimulés dans les trous de sable : soles, turbots, plies, raies torpilles appelées « trembles » et raies pastenagues dites « terres ». Ces dernières munies d’un dard venimeux sur la queue devaient être retournées sur le dos à la   fourche. Amputées de leur arme, elles devenaient inoffensives.

   LES ACTIVITES DE PECHE DES « VILLAGEATS » VARIAIENT AU RYTHME  DES SAISONS : 

     ° DURANT TOUTE L’ANNEE :

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Quelles que  soient les conditions climatiques, de jour comme de nuit, les hommes  « maréyaient » (péchaient les poissons capturés dans l’écluse)  et entretenaient les murs. Huit pêcheries étaient  implantées sur l’estran tranchais dont quatre à la pointe du Grouin, face à la maison du Corps de Garde.Celle des habitants de la Terrière appelée  la « Petite écluse » était la plus au nord, à la limite du sable.

Quel était  le principe  de ces écluses ?

 

 

 

écluse

 

Ces enclos de pierres, semi-circulaires ou rectangulaires, d’environ 100 mètres de longueur et de largeur, étaient construits sur l’estran rocheux à la limite du sable appelée  « pet de   caille » (le pied de caillou). A mer haute,  les poissons, attirés par les alevins et  les crevettes venues se reproduire à l’abri des murs, s’aventuraient pour festoyer.

 

 

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Conséquence néfaste pour eux, à mer descendante, ils se faisaient piéger derrière les portes de vidange à claire-voie, par la mise à sec des pêcheries

Le fonctionnement quotidien  imposait un partage des  heures de travail pour l’entretien et la construction.

 

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L’équipe était familiale. 

Le nombre maximum des équipiers ne dépassait pas six  membres. 

 

 

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 - A  PARTIR DE PAQUES :

C’était la saison  de la pêche aux crabes appelés  "chancres" .

 

 

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- Les étrilles ou  « bataillats », agressives mais les plus prisées pour la  finesse de leur chair. 

 

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-Les tourteaux dits « endormis », cachés sous la « banche de l’Ancre » ou sous les "pierres de taille" .

 

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 C’était  aussi la saison des seiches  venues pondre dans la fosse des Corres, devant le rocher de Sainte Anne.

 

 

 

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Elles  étaient  attaquées  par les marsouins qui leur mangeaient  la tête. Décapitées,  poussées par le vent,  elles s’échouaient  sur toute  l’étendue  du rivage entre la Faute et la Terrière après un séjour plus ou moins long dans l’eau de mer. Très prisées des tranchais, leur fraîcheur était jugée à  la souplesse du « manteau », la couleur nacrée du blanc et l’odeur…

 

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- FIN SEPTEMBRE :

C’était la période de l’arrivée massive des « mulets de vendanges » porteurs de tâches dorées de chaque côté de la  tête.

 

pour extrations pour Marc

 

On préparait  la « grande senne »   d’une trentaine de mètres de longueur et  de dix mètres de hauteur au centre.

Elle était tirée  par 4 équipiers à chaque extrémité le long du rivage.

 

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Les villageois (les « villageats »)  pêchaient en « basse-coté » sur l’estran sableux de la plage de la Terrière. En fonction  du rendement, la  zone de senne s’étendait sur 2 à 3 kms, de la « Casse au Matelot », dans le fond de l’anse, jusqu’ à la  limite  du  rocher du Grouin . Chaque trait, le «lan », pouvait atteindre  200 mètres. Ils pêchaient  soles,  turbots,  « rétiats » (raies) et  « loubinias » (bars). 

 

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  - EN OCTOBRE: 

Dans une mer agitée par les tempêtes, les bars venaient à la côte pour se gaver avant l’hiver. C’était la saison des lignes de fond et des lignes montantes. Fabriquées d’une corde de chanvre de 50 mètres sur laquelle étaient attachés  des hameçons, elles étaient tendues  à mer basse sur l’estran entre des piquets métalliques.

 

 

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 - EN HIVER :

Sur l’estran du Grouin, la pêche à pied se limitait auhuîtres,aux  " torgoules " (bigorneaux) ramassés « au nid » à pleines poignées 

 

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et aux "crabes - rochers" dissimulés dans les trous des "banches" ou dans les murs des écluses.

 

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Les « villageats » réparaient  leurs engins : sennes, "coules" et tramails.

Faute de pacage, l’élevage était réduit, pour les riches, à une vache pour fournir le lait et le beurre, à un porc, nourri de pommes de terre avariées, abattu chaque année à l’automne et à des volailles. Ils chassaient dans les marais quelques  canards colverts, des vanneaux rarement  des oies et en forêt  les lapins et les pigeons.

 

Ces apports  ne couvraient  pas les  besoins en nourriture  carnée  de leurs familles. Certains d’entre eux  fournissaient le village en viande.Les habitants du village achetaient des macreuses (canards  plongeurs) capturées  par quelques  spécialistes qui posaient des rets suivant une technique locale spécifique dite du « visour »

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LA CAPTURE DES MACREUSES :

Volant au ras des flots, les macreuses arrivaient en importantes colonies sur le l’estran  du phare à la Toussaint, et y séjournaient jusqu’au mois de Mars.

 

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Elles s’assemblaient sur leur lieu de pêche, plongeaient et nageaient sur le fond rocheux en avalant le maximum de jeunes moules pour se gaver. Installés au sommet de la dune, les pêcheurs repéraient à mer haute les bancs de moules en réalisant des visées pour déterminer la distance  et  la direction de la zone de plongée des macreuses.

 

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On peut s’étonner de la maitrise par les Tranchais de cette technique de mesure géométrique mise au point par les architectes Egyptiens. La tradition orale, a probablement été transmise par les moines arpenteurs, géomètres et les compagnons maçons-constructeurs des abbayes. Ils l’ont adaptée à la pêche.

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Deux données localisaient les meilleurs endroits pour tendre les rets :

 -A  mer haute,  un nœud dans les oyats de la dune situé à 40 centimètres du sol et  à 2 mètres du poste de visée permettait de réaliser un relevé  de  l’endroit où plongeaient les macreuses par une visée : « le  visour ».

 

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- A mer basse, un contrôle à pied confirmait la visée en localisant  les  zones où le sol était marqué par les coups de bec  sur les bancs de moules attaqués par les oiseaux.

 

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Ayant repéré « le mangion », zone où les macreuses allaient se restaurer, les Tranchais plantaient à basse mer  des piquets de 18 à 20 pouces (50 centimètres) appelés«pet de rets ou pots »La nappe ne devait pas être tendue mais  suivre le mouvement du courant, réalisant  un « berceau ».

 

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Lorsque la marée recouvrait les fonds, les macreuses qui s’attroupaient pour venir manger les coquillages, tombaient en plongeant sur le filet et se prenaient par le cou et les pattes et ne pouvaient pas remonter à l’air libre.

 

 

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La totalité de la pêche devait être vendue dans les 12 heures faute de moyens de conservation réfrigérée. Le pêcheur en gardait 3 ou 4 pour sa famille puis faisait du porte à porte dans le village,  les proposant à ses voisins. Les débouchés sur le village de la Terrière représentaient 20 à 30 pièces par marée.

 

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En cas de pèche abondante, il fallait prendre la route avec une brouette ou une remorque à vélo et  aller  « chiner » aux Conches, à la Faute ou l’Aiguillon, pour les vendre au modeste  prix de « un sou » la macreuse non plumée.

 

 

 

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 On tirait les filets et les cuisses des animaux invendus. Hachés et mélangés à du lard et à des aromates, la mixture était mise en bocaux stérilisés ou en terrines.

 

 LA  PECHE AUX MOULES A LA BELLE HENRIETTE

La densité du nombre de pieux augmentant la résistance à la houle, l’Administration Maritime avait accordé des concessions de lignes de bouchots à moules à des  non professionnels sous condition de maintenir la  totalité  des pieux.

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Certaines familles de La Terrière avaient obtenu pour leurs besoins familiaux des concessions de 2 ou 3  lignes de 50 mètres de longueurdans le secteur le  plus exposé des Roulières,.En mars ils  coupaient des sapins, à la « montée de la sève », pour  renouveler les bouchots   lors de la grande marée de printemps

 

 

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Contrairement aux  boucholeurs professionnels, ils n’avaient que 2 types de lignes :

   - les bouchots de grossissement dits  « bouchots miloins » situés derrière les lignes de captage :

Ils étaient constitués de 80 à 90 pieux par ligne séparés de 60 à 70 centimètres.

 

 

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Jusqu’en 1950, ces bouchots d’élevage étaient équipés  de supports sur lesquels étaient fixées les « poques » de naissain  (paquets de jeunes moules emballées  dans des morceaux de  filet). Ces poques  étaient plaquées  contre les pieux pour s’y fixer  par un « catinage »   réalisé avec des branches de tamarin attachées verticalement et cerclées avec de l’osier.

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- les «  bouchots d’amont », les plus près du rivage, accessibles à pied  et par faible coefficient de marée Arrachés par les tempêtes  ou rongés  par les parasites (les « tarets ») leur longévité était d’environ 3 ans ce qui  rendait la maintenance problématique.

 

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Les pieux  étaient plantés à la pelle. Après creusement d’un trou de 40 cm dans la vase, ils étaient enfoncés à force d’hommes qui se suspendaient à son extrémité tout en assurant un mouvement latéral de va et vient puis, terminaient l’opération à coups de maillet. On plantait au maximum 20 pieux en 3 jours de grande marée.

 

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Au printemps, faute de pieux de captage, on allait, en charrette, sur les banches du Grouin récolter  le  naissain pour  fabriquer les «poques »Le rendement d’une ligne  était variable suivant les années, les conditions climatiques et les lieux d’implantation.

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La récolte moyenne  variait de  15 à  40 kg par pieu et par an.  Les « villageats » se rendaient à leurs bouchots  4 à 5  fois par an pour la récolte. A chaque « marée de bouchots » ils rapportaient une cinquantaine de kilos de moules et d’huitres  dans des sacs de jute. La récolte était  entreposée au frais dans les caves.

Compte tenu de la distance et des coûts de la  maintenance, en imposant un quota de renouvellement annuel de pieux par ligne, l’administration amena  la plus part  à renoncer à leurs concessions familiales.

 

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Restent gravées dans la  mémoire des anciens  le souvenir des traversées odorantes de la lagune de la Belle Henriette sous le soleil de midi et des  longs retours à la maison, charrette chargée de sacs de jute pleins de moules et d’huîtres, avant la distribution à  la famille et aux voisins. 

 

 

EN DEHORS DE LA COUVERTURE DE LEURS APPORTS  ALIMENTAIRES, L’ESTRAN COUVRAIT AUSSI  LES  AUTRES BESOINS :

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Une production agricole leur  était  indispensable.

Le sol est en permanence  humidifié par l’écoulement de l’eau des sources sur la glaise imperméable. L’eau est visible dans les « raises » (petits fossés) qui séparent les parcelles.

 

 

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Le ramassage du « sart »  pour amender leurs terrains de culture faisait partie de leurs obligations hivernales et de printemps .Après un seul labour manuel à la pelle de forme typique «  la freil » et 200 kg d’algues répandues sur 100 m2 de surface cultivée, les « villageats » obtenaient des rendements exceptionnels.

 

 

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 Cet engrais avait  deux origines :

- le « goémon d’épave » qui s’échoue sur la côte arraché des rochers après les tempêtes.

Il est constitué d’un mélange hétérogène d’algues et de débris marins. Il  était collecté à la « limaïe » ( à l’échouage).  Son ramassage, son  transport et sa  vente étaient  autorisés à tous et en toutes saisons.

  

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 - le  « goémon de rive»  fixé sur l’estran  , accessible à marée basse.  La coupe n’était  autorisée qu’à la main et  à  la faucille.

Cette collecte  était réservée aux seuls  habitants de la commune et  durant les 3 jours fixés par le conseil municipal  lors  les  grandes marées de mars et d’avril.

 

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A la Tranche, l’administration  tolérait l’extraction de « pierre de côte » sur l’estran du Grouin. Ce droit de prélèvements de la pierre de mer était étendu à la construction des maisons. A chaque marée, les pêcheurs rapportaient à dos d’âne, trois ou quatre de ces pierres et les stockaient près de leurs habitations en vue de futurs travaux.

 

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Les murs des « collogeats » du village de la Terrière sont construits de ces pierres de banche facilement reconnaissables par les trous creusés par les pholades. (Mollusque marin bivalve creusant la pierre pour s’y enfoncer grâce à leur  coquille asymétrique.)

 

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 Les épaves  fournissaient enfin  le bois des charpentes  et le bois de chauffage.

Ainsi vécurent durant des siècles des générations de «  villageats » de la Terrière en exploitant toutes les ressources de  l’estran  pour survivre  dans un territoire isolé longtemps considéré comme «  le bout du monde ».

 

 

 

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24 février 2023

PUBLICATION : EXPÉDITION AUX BAINS DE MER A LA TRANCHE PAR LE PETIT TRAIN

 

 Le Petit train                       1907

EXPÉDITION AUX BAINS DE MER

A LA TRANCHE PAR LE PETIT TRAIN       

                         

 

Surveillant de baignade

 

  

  *  LA MODE DES BAINS DE MER

Née en Angleterre au début du XIXème siècle, la passion des bains de mer  va gagner  la France.

                                                                             

   

                      

Aristocrates à Dieppe

 

Selon la Duchesse de Berry qui en découvrit les bienfaits au cours de son séjour en 1822, « Dieppe est à la France ce que Brighton est à l’Angleterre : un lieu de récréation et de plaisir où la haute société parisienne puisse jouir  et se rencontrer à époque fixe. » 

Sanatorium :Cure de convalescents

 

Les publications médicales qui  se multipliaient sur les deux rives du «chanel », participèrent à cet engouement pour les villégiatures balnéaires .

 

Cure d'enfant anémié

 

On découvrait les vertus reconstituantes de l’air marin pour les convalescents anémiés et les enfants de santé fragile.

Cure marine 

 

 

On constatait les bénéfices du climat maritime et des forëts de pins.

Les médecins prescrivirent des cures de thérapie douce associant repos et bains de mer riches en sel et en iode.

 Bains d'algues

 

 

 

 

 

 

Cabines de bain tractées par des cheveaux

 

 

Ainsi, naquit sous cette tutelle médicale, une mode pour les séjours aux bains de mer très prisés par l’élite branchée de l’aristocratie et la haute bourgeoisie hexagonale.

Promenade des aristocrates sur le remblai.

 

Cette vogue attira les investisseurs. 

Des stations balnéaires naquirent sur tout le littoral .

LE DEBUT DES BAINS DE MER EN VENDEE  

Premier bain de mer en famille

 

Attirés  par la douceur de son  climat et ses plages de sable fin, les premiers baigneurs apparurent aux Sables d’Olonne en 1826.

 

Expédition de 6 jours via la Vendée

 

 

Ces pionniers mettaient 6 jours en diligence pour effectuer le trajet de Paris aux Sables.

 

Arrivée chez l'habitant

 

 

Ils louaient à leur arrivée  des chambres meublées chez l’habitant.

 

 

Premir bain sur la grande plage

 

Au début, leur présence ne fut pas toujours bien tolérée par les autochtones.Pour protéger l’ordre public, le maire des Sables dut interdire la baignade nue sur la grande plage .

 

 

Cabines de la maison Groleau

Afin  de sauvegarder les principes moraux, la maison Groleau construisit et installa sur la plage des cabines de bains roulantes tractées  dans la mer par des chevaux.

Cabines de Bain

 

 

 

 

 

   

 

Première publicité pour les bains de mer

 

Les retombées commerciales générées par l’hébergement et la manne financière issue des activités annexes (restaurants, régates et courses de chevaux) convertirent rapidement les opposants.

 

 

 Champ de course des Sables

 

 

 

 

 

 

Premières villas sur le remblai

 

Au nombre de 8 en 1826, les villas en bordure de plage se multiplièrent comme des champignons, atteignant la centaine en 1854.Tous les artisans sablais étaient débordés. 

 

 

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L’ouverture par la Compagnie d’Etat de la ligne de chemin de fer Nantes – Les Sables en 1866, fut le facteur  déterminant de l’avenir  touristique de la Vendée.

La voie du  succés  était entrouverte. 

 

Entrée en gare de la Mothe-Achard

 

 

Le premier « grand train »  en direction des Sables fit un arrêt en gare de la Mothe-Achard.

 

 

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Conscients des  débouchés potentiels, les dirigeants de la Compagnie des  Chemins de Fer de l’Etat décidèrent d’investir massivement.

 

Les touristes parisiens, tourangeaux et poitevins accoururent en Vendée.

Voyageurs arrivant à la gare des Sables

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Casino construit selon le plan d'Eiffel

 

En 1876, la Compagnie des chemins de fer fit construire, sur les plans de Gustave Eiffel, le premier casino à l’architecture métallique. 

 

 

 

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En 1900, la station Sablaise comptera 35 établissements hôteliers, disposant d’un millier de chambres.

 

 

Réseaux du petit train sur le littoral

Devant ce succès, la puissante compagnie, propriétaire des « Grands Trains », décida de créer une filiale : « les Tramways de la Vendée ». Son rôle fut  de construire et d’exploiter un réseau secondaire d’intérêt local, destiné à assurer le transport des voyageurs et des marchandises dans les territoires les plus isolés.

 

Gare de L'Aiguillon

 

 

Ainsi naquit la ligne à voie étroite Luçon – L’Aiguillon  inaugurée le 14 août 1901. 

 

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La même année, furent créées les  cartes d’excursions en Vendée.  Cet abonnement donnait pour un prix forfaitaire, le droit de libre circulation, valable 15 jours par an, de Pâques au 31 octobre, sur toutes les lignes d’Etat (le réseau principal) et sur le réseau secondaire (les tramways de la Vendée) avec 30 kg de bagages en franchise.

 

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Ce concept fut une énorme réussite relatée par tous les journaux de l’époque C’est ainsi que la vocation touristique s’étendit à l’ensemble  de la côte vendéenne.

 

 

pour extrations pour Marc

 

La construction des hôtels sur le front de mer des Sables  se multiplia.

Cet afflux modifia l’image de la station Sablaise qui perdit son caractère élitique.

 

pour extrations pour Marc

 

 

La première génération des aristocrates se sentit envahie par cette clientèle plébéienne.   

 

 

pour extrations pour Marc

 

Malgré le nouveau casino de la République et son hôtel « le plus moderne »,  les courses de chevaux sur la plage et les régates...

 

 

 ...ils migrèrent vers des stations plus huppées. Dieppe,  Pornic, La Baule, Royan, Biarritz, Deauville les accueillirent . 

 

pour extrations pour Marc

pour extrations pour Marc

 

 

 

 

pour extrations pour Marc

 

 

Fini pour la clientèle populaire, le spectacle des « gens biens » circulant en habits de soirée sur le remblai, en l’attente des soirées au casino.

 

 

chateau de sable des enfants

 

 

Les Sables s’inscrivirent alors dans le registre des stations balnéaires  familiales.

 

 

Alors que les estivants accourent vers les plages Sablaises, que se passe-t-il en ce début de XXème siècle sur celles du Sud de la  Vendée ?

Dés le XVIème siècle, Rabelais avait vanté le climat, l’ensoleillement et la luminosité du Sud Vendée.

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La Tranche, abritée des courants marins par l’île de Ré, possédait de longues plages de sable fin pour répondre aux désirs des nouveaux adeptes des bains de mer.

 

 

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Elle bénéficiait en outre, de dunes saturées de l’odeur des œillets sauvages, des immortelles et d’une magnifique forêt de jeunes pins maritimes, soigneusement entretenue.

 

 

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En 1900 , la commune comptait 965 habitants,répartis entre le village et les hameaux de La Terrière, de La Grière et de La Faute.

 

 

Eglise St Nicolas de La Tranche

 

 

Construite sur la rive maritime du Lay, elle  dépendait du canton des Moutiers.

 

 

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Riche de 165 habitants, la Faute  faisait partie du territoire communal tranchais qui s’étendait sur une longueur de 21 kms, des Conches à l’extrémité de la pointe d’Arcay. La création de la commune de La Faute, en avril 1954, amputa sa façade maritime de 8 kms.

 

 

 

CaptureFaute de ressources, la commune ne pouvait pas financièrement entretenir une voirie aussi étendue. En dehors, des exportations de leur production maraichère par le port de l’Aiguillon, les Tranchais vivaient en autarcie.

Les communications  étaient quasiment inexistantes.La Tranche était reliée à l’arrière-pays  par 3 accès, tous aventureux : 

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-à l’Est, via Angles : une voie dans les marais, inondée plusieurs mois de l’année, cheminait au sommet de digues argileuses, glissantes ou impraticables, qui longeait les fossés et les canaux.

 

 

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-au Nord, via Longeville : Un chemin dunaire dont l’empierrement était retardé par le refus des propriétaires de déplacer leurs limites parcellaires.

 

 

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-au Sud, par l’Aiguillon : La voie maritime restera,  jusqu’à 1911, date d’ouverture du premier pont de 2,40 m de large en béton, laseule voie d’accès régulière.

 Pour les rares vacanciers, venus se dépayser hors du temps, au rythme des marées, l’accès au paradis relevait de l’expédition au bout du monde.

  

 

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La gare la plus proche, celle de Luçon, restait éloignée de 30 kms et l'accès à la Tranche nécessitait,faute de route, la traversée du Lay en barque. Après le long trajet de Paris ou de Poitiers à Luçon, le plus dur restait à faire.  

 

 

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Une publicité pour les bains de mer Tranchais éditée en août 1866 nous permet d’évaluer les difficultés d’accessibilité . Pendant la saison des bains, Mr GALLOT cafetier propose 2 départs par semaine les jeudis et dimanches :

-départ de Luçon à 5 heures du matin,

-arrivée à La Tranche à 5 heures du soir .

 

 Soit un trajet de 12 heures pour une trentaine de kilomètres.  

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L’Aiguillon, implanté sur la rive continentale du Lay, était  le point de traversée sur  l’autre rive : « le continent ».

 

 

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Village côtier le plus peuplé et le plus actif, l’Aiguillon comptait en 1900, 1126 habitants et son trafic portuaire était le plus important de Vendée.

 

 

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Port de commerce de l’évêché de Luçon et de l’abbaye de Saint Michel en L’Herm, depuis le Moyen-Age, il assurait : l’embarquement du blé, produit par la riche plaine de Luçon, le transport de bois et de charbon ainsi que celui de la production maraichère et de vin  des agriculteurs tranchais.

 

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Il était aussi un abri par gros temps pour les bateaux en attente de déchargement qui se présentaient à l’entrée du port de La Rochelle.

 

 

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Malgré l’envasement progressif de la rivière, le trafic maritime grâce à l’activité du port de Luçon, connaissait une croissance constante. Son trafic s’était multiplié par 5 entre 1826 et 1869, année où plus de 600 bateaux  avaient transité.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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C’est à cette époque que les pêcheurs aiguillonnais obtinrent de l’administration maritime des concessions de bouchots à moules dans la baie et devant la pointe de La Faute et suivirent l’exemple de leurs voisins de Charron .

 

 

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La mytiliculture exigeait de courts délais de commercialisation. Après l’arrivée de la grande ligne de chemin de fer, elle bénéficia de 4 améliorations obtenues de l’Etat par la municipalité de Luçon pour désenclaver sa façade côtière :

 

 

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- une  voie routière départementale à grande circulation n°46  Luçon – L’Aiguillon,

 

 

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- la mise à niveau de la voie maritime par l’achèvement du bassin à flot et l’aménagement du port de Luçon.

 

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- la prolongation de la voie ferroviaire nationale des grands trains pour desservir les hangars à grains du port,

  

 

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 - et surtout, la création d’une voie secondaire des Tramways de la Vendée du port de Luçon à celui de l’Aiguillon.

 

 

Aout 1901 : Inauguration

 

 

L’inauguration en août 1901, de cette ligne du Petit Train donna au littoral Tranchais, sa première opportunité d’ouverture au tourisme.

 

 

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La clientèle se résuma dans les premiers temps à une fréquentation estival de la plage de La Faute par quelques familles aisées Luçonnaises et Fontenaisiennes, qui construisirent les premiers chalets dans les dunes.

                                                                                                                                                                                                                                               

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Les aléas de la traversée de la rivière en barque, bien que pittoresque, représentaient encore un frein à l’expansion d’un tourisme de masse.

     

 

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Celui-ci se limitait les dimanches d’été à des jeunes venus de Luçon ou de Saint Michel, qui venaient prendre une consommation à la guinguette de la plage pompeusement appelé "Le Casino" .

 

 

 

  

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 Ils regagnaient par le dernier train leur domicile après la baignade.

Malgré la décision prise en 1900 par l’assemblée départementale de construire un pont sur le Lay, le projet resta virtuel pendant plusieurs années.

 

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La traversée à marée basse n’était possible que dans la vase et  dépendait pour les dames, de la disponibilité sélective du passeur à les transporter dans ses bras.

 

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Une passerelle transitoire en bois fut installée en 1905. Elle permit aux Tranchais de traverser la rivière à pied et d’accéder à la gare de L’Aiguillon- Port, créée en 1901.

 

 

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Le  pont en béton de 2,40 m de largeur attendra 1911 pour être ouvert à la circulation.       

Le premier contingent de touristes tranchais, fut constitué de notables Luçonnais et Fontenaisiens.

 

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lls étaient attirés par le dépaysement et la sensation de liberté que leur procurait le partage de la vie quotidienne des gens du village : pêche sur l’estran au rythme des marées, chasse , vendanges et parties de boules en bois le dimanche.

 

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Pour passer leurs vacances dans ce paradis, ils étaient prêts à toutes les concessions : Se rendre  à La Tranche se méritait. C’était  un long périple qui supposait l’utilisation de 3 moyens de locomotion pour parcourir 30 kilomètres : 

-  le petit train de Luçon à L’Aiguillon

 

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- le bateau pour la traversée du Lay, 

 

 

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-  la carriole à cheval de La Faute à La Tranche à travers les dunes. 

 

 

                                         

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 Nous vous proposons de vous joindre à une famille Luçonnaise se rendant aux bains de mer à La Tranche en 1907

 

 

 

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En ce samedi matin de juillet 1907, jour de foire à Luçon, le Docteur Martin et sa famille préparent le grand départ. Convaincus par leurs amis liquoristes, les Vrignaud, fidèles adeptes de la baie du Maupas, les Martin ont décidé  de prendre un mois de vacances à La Tranche. 

 

 

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 Pour faire découvrir le chemin de fer à leurs enfants, ils ont choisi de prendre le petit train Luçon – L’Aiguillon dont la ligne est ouverte depuis maintenant 6 ans.

Les Vrignaud  les attendent dans leur  résidence estivale construite en front de mer depuis une quinzaine d’années.

 

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Les  malles et les bagages encombrants sont partis depuis 48 h. 

 

 

 

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Ils  ont été livrés à l’adresse de leur future résidence estivale: L’hôtel Franc-Picard, en plein centre bourg.

  

                                               

                              

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Les enfants et leur nourrice, toute heureuse de les accompagner durant ce séjour, sont impatients de prendre le train pour la première fois.

 

 

 

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Le jardinier qui gardera la maison durant les vacances, a attelé le cheval pour les accompagner à la gare.

Puis tout le monde s’est entassé dans la voiture à cheval. L’expédition est partie.

 

 

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Pour   retirer les billets il faut passer par  le bureau de la grande gare.

Il règne dans la gare, l’odeur particulière  de carton des billets, de papier carbone et  d’encre des tampons

 

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Suivant les horaires affichés, leur convoi doit partir à 14 h.

 

 

 

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Les voyageurs qui arrivent de Nantes par le réseau des grandes lignes, débarquent sur le quai, d’autres gagnent la navette qui prolonge la ligne jusqu’au port.

 

 

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On  décharge des marchandises. Certaines seront  transférées sur le petit train.

 

 

 

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Munis de leurs billets pour l’Aiguillon, acquis pour la modique somme de 1 franc 75 centimes par passager, toute la famille regagne le fiacre, direction le port.

 

 

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La place du marché est  animée en cette fin de matinée.

 

 

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Dans ce brouhaha, se mêlent caquètements des poules et cancanages de canards....

 

 

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Les paysannes venues de la campagne  écouler leur production d’œufs et de volailles, interpellent les derniers acheteurs en remballant les invendus, avant le voyage du retour.

 

 

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Les hommes sont déjà passablement excités par les multiples « canons »  ingérés pour conclure chaque transaction sur la vente de leurs porcs ou leurs bovins.

 

 

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Ils s’interpellent et s’invitent à boire un dernier verre dans les nombreux cafés qui bordent la place.

 

 

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Dernier regard à la statue de Richelieu, et on s’engage dans  la rue du port jusqu’au bassin à flot.

La famille est en avance sur l’horaire. En l’attente de la fin du marché, les quais sont encore calmes.

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Deux gabares sont amarrées le long des quais.

 

 

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Des matelots sont occupés à décharger  sel et  charbon qui arrivent par voie maritime vers  les entrepôts.

 

 

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 - Sur les berges du port, converge une double voie ferrée. Devant les bureaux du port  des plaques tournantes permettent l’accès  au quai nord, zone de transit des wagons détachés du convoi arrivant de Nantes.

  

Chargement des cages à volailles

 

Sur le quai d’embarquement du petit train, les paysans rechargent dans le wagon à bestiaux des cages en bois :

 -celles vides, des volailles qui ont été vendues,

 

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 et les plus grandes,  nommées « bazaines à gorets » occupées à l’aller par des porcs  adultes conduits à l’abattoir.

Elles abritent au retour 3 à 4 jeunes porcelets à engraisser, qui affolés, hurlent leur détresse.

 

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Les cheminots ont accroché un wagon supplémentaire, portant la rame à 6 wagons.

 

 

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Constitué habituellement de 3 à 5 wagons, le convoi a dû être rallongé. Il faut en effet faire face à l’afflux des arrivants du grand train et des jeunes voyageurs qui se rendent à La Faute pour se baigner et rentrer en fin de journée.

 

 

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La foule envahit les quais.

 

 

 

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Les femmes, riches du produit de leurs ventes,  ont acheté les produits de première nécessité qu’on ne trouve pas au village : ustensiles de cuisine, laine  ou rouleaux de tissus.

 

 

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Ployant sur le poids de leurs acquisitions, elles ont posé à terre cabas et paniers.

Epuisées, elles attendent l’autorisation du chef de train, pour monter s’asseoir à bord.

 

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Cette ambiance de fête est une bonne mise en condition  pour  les  vacances de la famille Martin.

 

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Le tintamarre est à la fois assourdissant et magique. Il mêle :

 - le sifflet de la machine en chauffe et les jets à vapeur qu’elle crache au voisinage des bielles avant le démarrage,

 

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 - le crissement du freinage à l’arrivée des wagons supplémentaires,

 

 

 

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-  le choc des tampons des wagons en cours d’accrochage,

 

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 - les interpellations des cheminots qui dirigent la manœuvre.

 Chaque membre de la famille Martin  a pris en charge ses objets personnels rangés dans des sacs légers.

 

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Au feu vert du chef de train, la foule s’agite, tout le monde veut grimper dans les wagons pour avoir une place assise.

 

 

 

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Le confort est très limité. Bien que le poêle à charbon situé au centre du wagon de voyageur, alimenté en hiver par une pelletée de braises prélevée dans le foyer de la locomotive, ait été démonté, les places manquent.

 

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Faute de pouvoir circuler entre les voyageurs entassés assis ou debout, le chef de train a renoncé à contrôler les resquilleurs.

 

 

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L’atmosphère de ces wagons surchargés de voyageurs est particulière. Malgré l’ouverture des vitres en raison de la température, il y règne une odeur différente de celle de la gare. Elle est faite du mélange de transpiration humaine,  de fumée de  locomotive et  enfin de celle de bestiaux chargés dans le wagon accroché en queue de convoi. 

 

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Le plus jeune des  enfants Martin émerveillé, s’est installé  sur la plate-forme arrière.

 

 

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Il ne veut  pas manquer la moindre manœuvre ni du mécanicien muni de sa burette, ni du chauffeur dont les vêtements sont imprégnés de poussière de charbon et d’huile chaude.

 

 

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Après un concert de coups de sifflet et de corne pour activer les retardataires, le frottement des roues sur les rails d’acier et le panache de fumée de la locomotive signent le départ.

 

 

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La silhouette trapue du petit train s’ébranle.

 

 

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Le trajet de 22 kms Luçon – L’Aiguillon doit sauf surprise durer 1h30, desservant les gares de Triaize et Saint- Michel en l’Herm.

La voie étroite et unique, chemine sur la gauche  de la route.

 

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Première étape : Triaize . Avec arrêts  à la demande devant les fermes longeant la route :

-  la Marguerite

 - les Fontenelles

 - la Maison Neuve

A l’arrière, la flèche de la cathédrale s’estompe lentement dans le paysage.

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Des paysans  tentent d’équilibrer au mieux leur chargement pour éviter de le  renverser en cours de voyage.Puis, les charrettes prennent la route départementale. Les bœufs hautains et stoïques se laissent dépasser par notre bruyant équipage.

 

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Brutalement, le convoi  ralentit avant l’arrêt des Fontenelles. Un vacarme  met fin à la quiétude qui s’était installée  parmi les voyageurs après ce départ tumultueux : bruit  strident  des freins,  puissants jets de vapeur lâchés de la locomotive et  coups de sifflet. Les habitués ne semblent pas s’inquiéter.

 

 

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Des vaches ont profité de l’assèchement des fossés pour sortir de leur pré et  paissent entre les rails.

Les intruses sont repoussées hors de la voie mais ce ralentissement a fait baisser la pression de la machine.

 

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Fulminant contre les perturbations qui font chuter la moyenne, le mécanicien recharge le foyer et la chaudière progressivement reprend son rythme.

 

Le convoi progresse vers l’ouest.

 

 

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Dans une petite exploitation voisine de la voie, une faucheuse javeleuse coupe les tiges de blé.

D’un mouvement circulaire régulier, actionnée par une commande à pédale, le conducteur  laisse tomber une brassée tous les dix mètres.

 

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Dans la ferme suivante on charge le pailler .  Moisson et battage demanderont  3 semaines de travail pour 3 hommes.

 

 

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Le clocher de Triaize apparait à l'horizon.

 

 

 

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Des enfants attendent sur le bord de la voie le retour  de leurs parents. Ils espèrent que ceux-ci n’ont pas oublié d’acheter les rituelles friandises qu’on ne trouve qu’au marché.

  

 

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A l’entrée du village, dans un pré, voisin de la route, hommes et femmesparticipent à un curieux ballet :ils écrasent des excréments de vache et les mélangent à de la paille humidifiée en dansant pieds nus dans ce magma malodorant. 

Puis ils remplissent un moule arrondi muni d’un manche pour façonner des galettes de 30 centimètres de diamètre qu’ils laissent sécher au soleil.

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Dans ce pays dépourvu de bois, ces excréments de vache appelés «  bouses », serviront après séchage au soleil, au chauffage durant l’hiver.

 

 

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Le petit train entre en gare de Triaize pour un arrêt programmé. Le bâtiment est un local modeste de 6 m sur 3 m, comprenant une salle d’attente munie d’un banc de bois, reliée par une porte à la salle de délivrance des billets.

 

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Plusieurs femmes descendent, libérant des places pour les jeunes luçonnais restés debout depuis le départ.

 

 

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Les paysans qui reviennent du marché  déchargent  le wagon de queue de leurs cages à poules et de  leurs « bazaines ».

 

 

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Le transbordement réveille les porcelets endormis. Ils  se remettent à hurler lorsqu’on les transporte sur une charrette pour gagner leur nouveau lieu de résidence : une ferme isolée dans le marais appelée « cabane ».

 

 

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Voici déjà plus d’une demi-heure que le convoi est parti de Luçon. 

La durée théorique du trajet Luçon – Saint Michel était de 37 minutes mais l’exactitude et le souci des horaires ne sont pas primordiaux.

Le «  tortillard  », comme l’appellent péjorativement les touristes de la ville, prend le rythme de la campagne.

 

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Malgré le retard, cheminot, mécanicien, chauffeur et chef de train déshydratés par le déchargement, s’accordent quelques minutes pour répondre à l’invitation d’un voyageur Triolais à prendre « un godet » au café de la gare.

 

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Habituée au cérémonial de réciprocité, la serveuse a déjà préparé sur le zinc, une double  rangée de verres pleins pour être sûre de répondre à la demande de « remise de tournée » dans les meilleurs délais.

 

 

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Après cette pause, le petit train, dans un bourdonnement de ferraille, reprend son chemin à travers le marais.

 

 

 

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Quatre  arrêts sont prévus sur le trajet entre les gares de Triaize et Saint- Michel en l’Herm pour desservir les fermes suivantes :

– Le Vigneau

– Le Bourdeau

-  La Dune

– Les Chauds

 

 

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La silhouette trapue du convoi tortueux règle, comme le carillon du clocher, les horaires des paysans.

 

 

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La vie agricole suit son cours, rythmée le long de la voie par le passage de 6 convois quotidiens.

  

 

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Dans la cour de la ferme La Dune, la batteuse est en action.

 

 

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Elle est alimentée par des briquettes de charbon et  consomme beaucoup d’eau. Compte-tenu du prix horaire de location, ce prototype des temps modernes, mobilise 2 équipes de batteurs qui se relayent, pour que le chantier  soit terminé à la tombée de la nuit, et que la machine soit opérationnelle dès l’aube dans une autre ferme.

 

 

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Elle avale des gerbes et crache le grain immédiatement mis en sacs et chargé par les porteurs.

 

 

 

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Le monte-paille déverse en continu, la paille sur le faitage du pailler où les hommes la répartissent.

 

 

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La seconde équipe fait une pause pour déjeuner avant de prendre la relève.

 

 

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Cahin- caha, le convoi arrive au lieu-dit « Les Chauds ».

La ligne d’horizon du marais est brutalement rompue par trois collines qui semblent anachroniques dans ce paysage uniformément plat.

 

 

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Il s’agit des buttes huitrières de St Michel en l’Herm. D’une dizaine de mètres de hauteur, elles sont disposées en S sur un longueur de 800 mètres.

 

 

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Connues et décrites au XVIe siècle par les premiers naturalistes, leur volume est estimé à 400 .000m3. A raison de 10.000 huitres par mètre cube, elles représentent un nombre de 3 à 5 milliards d’huitres.  

 

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Elles ont été minutieusement etudiées par l’ingénieur géographe de Louis XIV, Claude MASSE en 1715 au cours de son relevé des côtes du Bas- Poitou.

L’énigme, posée sur leur origine, fera polémique parmi les scientifiques pendant quatre siècles et suscitera d’incroyables controverses.

 

 

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-S’agit-il d’un dépôt naturel résultant de courants marins sur un territoire immergé jusqu’à la fin du XIIIe siècle ?

-S’agit-il de vestiges d’une jetée de port, d’une digue ou d’un barrage ?

  

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En ce début de XXe siècle, elles sont  exploitées par des petites carrières, pour l’empierrement de chemins et la production de chaux.

 

 

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Nous  atteignons le deuxième « bourg-étape » de notre périple : St Michel en l’Herm.

A l’entrée du bourg, la voie quitte la route au niveau du calvaire pour se diriger vers la gare. 

 

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Deux édifices dépassent le faitage des maisons du village:

à l’est le clocher de l’église :

 

 

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 - à l’ouest la cheminée de la« beurrerie »

 

 

 
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Sous le hangar de la laiterie, les équipes de ramassage livrent la collecte de la matinée.

 

                                                                                               

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Le petit train entre en gare.

Un panneau en lettres rouges sur fond blanc est fixé au-dessus du bureau.

 

 

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La salle d’attente, fermée de trois cotés est ouverte sur la voie et  communique, comme à Triaize, avec le guichet.

Elle est munie, dans le fond, d’une unique banquette en bois.

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Une bascule occupe le centre de la pièce.

 

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A une vingtaine de mètres, voisine de la maison du chef de gare, se trouve la halle à colis.

 

 

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Un quai est élevé dans la direction de Luçon pour  donner accès au convoyage des bestiaux. L’équipement de la gare est rudimentaire, constitué des aiguillages et de 3 voies : une pour la circulation du train, deux autres pour le stationnement des wagons .

 

 

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Deux sont  chargés :

   -  un de paille dans un tombereau découvert.

 

 

 

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l’autre d’un  mélange de cendres de bois et de bouses, expédié aux maraîchers nantais comme engrais.

 

 

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Le long du quai, un roulier de la laiterie de Saint-Michel transporte d’étranges colis, de forme conique, entourés d’un lattis de bois d’où émerge dans leur partie supérieure, une touffe de paille utilisée pour la manutention.

 

 

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Il s’agit de bourriches  de beurre de 10 kg conditionnées et expédiées annuellement par la laiterie par centaines de tonnes.

 

 

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Suivant une procédure codifiée, le roulier a le monopole du chargement et la responsabilité, tel un banquier, de cadenasser le wagon qui doit rester fermé tout le long du voyage pour éviter les vols.

 

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Dernier débarquement de «bazaines  » : les cris de détresse des porcelets couvrent le bruit du moteur.

 

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A la demande d’un voyageur, un nouvel arrêt est prévu au lieu-dit« le Beau Manteau », station située à la sortie du village.

 

 

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Le mécanicien  profite de la «  prise d’eau », pour  refaire le remplissage de la chaudière.

 

 

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Après le traditionnel « godet vite fait » le petit train redémarre.

 

 

 

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Est-ce la récente mise en eau de la chaudière, le dernier verre du chauffeur ou la pente descendante de la voie ..

 

 

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... le petit train semble doté d’une énergie nouvelle.

  Le retard n’est que de 20 min sur l’horaire…

 

 

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Tout va bien, d’autant plus, que dans ce sens, la pente est favorable et le trajet jusqu’à L’Aiguillon  rectiligne contrairement à celui de la route.

 

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Tel un cheval à l’approche de l’écurie, le rythme s’est accéléré.

 

 

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Le paysage défile au moins à 15 kms à l’heure jusqu’au virage de la « Grande Cote ».

 

 

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A l’approche du village, dans la dernière ferme, suivant la tradition séculaire on bat les fèves.

 

 

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Le convoi se rapproche de l’Aiguillon doté   de deux gares :

                                  -L’Aiguillon –ville

                                  -L’Aiguillon –Port 

 

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On atteint les premières maisons du village .

 

 

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Les enfants Martin qui commençaient à somnoler sont réveilles par l’odeur du port et  le vent marin .

  

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On aperçoit  l’église, puis on longe le pré communal  jusqu'à la station L’Aiguillon-ville.

 

 

 

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C’est la plus grande gare du trajet, elle est surmontée d’un étage et munie d’un quai. Les autochtones, qui reviennent de la foire, descendent.Le rituel «arrêt rafraichissement» du conducteur  pendant la descente des voyageurs permet de découvrir la gare :

 

 

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Sur  la voie de triage, un convoi de bois pour les boulangers est en attente de déchargement.

 

 

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Le convoi redémarre lentement suivant les rues du village vers le port.

 

 

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Nous  atteignons la deuxième gare : L’Aiguillon- Port, terminus de la ligne sur la rive continentale du Lay.

Tout le monde descend.

 

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Des gabares chargent oignons, ails et tonneaux de vin sur des goélettes amarrées dans le lit de la rivière. Elles repartiront à mer haute vers  l’île de Ré ou Oléron.

 

 

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Des vapeurs de la compagnie rhétaise déchargent du charbon sur l’entrepôt du port.

L’odeur du  port,  mélange  subtil de   vase et de  goémon, emplit les narines.

 

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Elégantes, chapotées et en robes longues, les femmes de la ville font sensation en circulant sur la cale.

 

 

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Coiffés de leur canotiers,les hommes se rapprochent pour assister au débarquement de la pèche .

 

 

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Sur  la voie de triage du petit train, le convoi de retour se prépare.  Le départ est prévu dans une heure. Contrairement à  l’aller, la rame est limitée à un wagon de voyageurs et 2 wagons de marchandises :

 

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-Un de moules, qui sera  embarqué vers Poitiers et Bordeaux, en gare de Luçon.

-Un autre, chargé de blé, d’avoine et de fèves, stockées dans les greniers des courtiers.

 

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Dernier obstacle avant l’accès au paradis : la traversée de la rivière.

 

 

 

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Pour être du premier convoyage, les habitués se sont précipités sur les barques des passeurs stationnés le long des estacades.

 

 

 

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Le fiacre du père Jarny   prend en charge la famille Martin pour la dernière étape du voyage. Il vient de déposer un chargement de colis à la gare et doit embarquer sur le bac pour regagner la rive tranchaise.

 

 

 

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Pour éviter de s’embourber, la traversée du véhicule, «  la patache  », est fixée dans 2 heures, au moment de la haute mer.

 Les enfants ont hâte de jouer dans le sable.

 

 

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La famille décide de se rendre à pied à la plage  de la Faute et de faire une pause à la guinguette. Chacun  se désaltérera, et  les enfants gouteront pendant que leur véhicule traversera la rivière. Enfin tous  embarquent. Des jeunes venus se baigner se joignent à eux. 

       

 

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Après un débarquement périlleux,  nos aventuriers prennent  le « chemin de la plage ».

 

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Ils  longent  les chalets que  des pionniers fontenaisiens et luçonnais   ont récemment construits   derrière la  dune .

 

 

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Le dernier obstacle franchi . C’est le premier contact avec l’océan. Le temps est  splendide,  la mer calme. On fait  une timide incursion dans l’eau pour  évaluer la température.       

 

 

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Puis les parents Martin s’installent à la buvette du casino.

 

 

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Les enfants   filent vers les jeux.

 

 

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Les jeunes luçonnais  qui les accompagnaient dans le petit train, ont mis leur maillot de bain et  courent vers l’eau.

 

 

 

 

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Leur « chauffeur », le  père JARNY rejoint ses passagers à la plage. Tout le monde se rassemble autour du vieux fiacre brinquebalant attelé à un cheval. La mère, les enfants et la nourrice embarquent dans la cabine fermée.Leur père, faute de place dans l’habitacle, s’installe sur le siège avant, à côté du conducteur.

      

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Les sabots  du cheval rythment cette dernière étape.

En raison du fort coefficient, la mer haute attaque le pied de la dune.

 

 

Anse de la Belle Henriette

 

Le marais n’est plus séparé de l’océan que par une centaine de mètres. En cas de tempête on risque de voir la mer inonder les prés.

 

 

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Un quart d’heure plus tard, c’est la traversée des vignes des Jards.

Il faut une demi-heure pour atteindre la Belle-Henriette.

 

 

 

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Dans les prés, les femmes, assises sur des tabourets à trois pieds, font la traite du soir.

 

 

 

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Leur travail terminé, elles transportent les sceaux pleins sur leurs épaules à l’aide d’un" jouc".

 

 

 

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La  charrette, garée sur le bord de la route, est prête pour le retour à la maison. 

 

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 La collecte de la coopérative laitière se fera  demain matin à l’aube.

 

 

 

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La patache arrive au calvaire livrant une vue panoramique sur l’anse du Maupas.

 

 

 

 Enfin après plus de sept  heures de trajet, le clocher de l’église de la Tranche apparait  enfin à l'horizon. 

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 On  suit au pas la rue principale.

 

 

 

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 La carriole se gare enfin dans la cour de l’hôtel Franc-Picard, terme de l’expédition.

Monsieur Chauveau, le propriétaire et le personnel attendaient l’arrivée des voyageurs.

 Le chef de famille  se  fait confirmer l’arrivée des bagages. Chacun  s’attribue  une chambre. 

 

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Après avoir abandonné les vêtements  de ville pour une  tenue estivale, la famille Martin  se dirige vers le domicile de leurs amis  qui   les ont invités à diner ce soir.

 

 

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A la sortie de l’hôtel, on longe l’église et le cimetière jusqu'à la pointe du Chiquet.

 

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La  villa des Vrignaud , construite face à la mer sur la dune est en vue .

Épuisés par la partie de pêche du matin, les hommes de la famille se reposent allongés sur le sable.

 

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Après une visite à leurs voisins du Maupas, les Phélippon , les femmes rentrent tranquillement par la plage.

 

 

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Bronzés, cheveux décolorés par le soleil, leurs enfants  sont pleins d’énergie et jouent dans l’eau.

Malgré l’heure tardive ils  proposent  aux jeunes arrivants un premier bain tranchais avant le diner.

 

 

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Les tenues de bain enfilées, tout le monde se retrouve à l’eau.

Après ce premier contact avec les bains de mer, on rentre se changer avant de diner.

 

 

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Sont prévus au menu :

-Des crevettes : ce matin, les enfants  sont allés pêcher des « boucots » avec leurs «  treillots » devant la maison.

 

 

 

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les étrilles ramassées  par les hommes sur le rocher de l’Aunis

 

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-  des tranches du «  touil  » (requin peau bleue) capturé à la ligne par leur oncle maternel, cuites sur un  feu de sarments.

 

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Pour terminer cette soirée du 13 juillet, le programme élaboré par leur hôte prévoit d’assister sur la place au concert de la Lyre Tranchaise. 

Les vacances commencent bieN;

 

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Pêche, jeux de plage, bains et balades en forêt dureront un mois, et  rythmeront  le quotidien de ces vacances aux bains de mer.

 

 

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Au grand regret de ces pionniers, peu enclins à partager leur paradis, le désenclavement communal va s’accélérer et ouvrir le village au tourisme de masse.

 

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Apparaitront successivement :

- Le franchissement du Lay en 1911 par un pont en béton à voie unique, d’une largeur de 2 mètres 40, cordon ombilical avec l’arrière-pays.

 

 

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- L’empierrement du chemin dunaire de Longeville à la Tranche par les Conches et la Saligottière et la création d’une route en 1924. 

 

 

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La voie tramway Luçon-Talmont via Longeville le 8 juin 1930

 

 

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La voie routière d’Angles à la Tranche à travers le marais.

 

 

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L’isolement des tranchais disparait mais la réussite du petit train dérange.

 

 

 

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 En 1931, les transporteurs routiers, appuyés par les compagnies pétrolières, sollicitent dans un premier temps dans leur « Bulletin des Transports » que tout véhicule automobile soit prioritaire sur les tramway aux passages à niveaux.

 

 

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 La même année, le président de la puissante Fédération Nationale des Transporteurs demande au département de la Vendée de supprimer son réseau vicinal, solution, selon lui, de « bon sens » ,et de laisser l’ensemble du trafic voyageurs et marchandises à la route.

 

 

 

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Malgré ces pressions, la ligne du petit train Luçon- l’Aiguillon restera florissante et son budget équilibré jusqu’à sa fermeture.

 

 

      

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 Ce  petit train disparaitra  le 31 novembre 1949 et sera  remplacé par les Autobus Vendéens.

 

 

 

                                                                               EPILOGUE

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Ceux qui ont fréquentée cette ligne  jusqu’à sa fermeture , ont été témoins de la modification du paysage à Saint Michel en l’Herm : les buttes huitrières ont disparu et l’horizon du marais est redevenu plat.

 

 

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L’exploitation industrielle de cette montagne de coquilles pour produire de l’engrais et des aliments  pour les volailles a duré de 1924 à 1975.Elle va résoudre l’énigme de l’origine des coquilles en les faisant disparaitre.

  

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La découverte dans les cribleuses de nombreux objets (40 pièces de monnaies de XIe, XIIème XIII siècles, de 4 couteaux et de pierres de drague permettent d’affirmer son origine artificielle.Puis la datation au carbone radioactif 14, situera la fin de vie de ces coquilles vers 1050  après J-C.

 

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Ces milliards d’huitres auraient donc été ouvertes à la main, par écaillage sur le lieu de production pendant 3 à 4 siècles par les moines de l’Abbaye de St Michel,  pour fabriquer dans de la saumure et du vinaigre un condiment alimentaire appelé « garum ».

 

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La localisation du gisement et sa topographie en S, suit   les méandres d’un ancien bras du canal dénommé « le chenal vieux » où devaient se faire le débarquement des huitres récoltées dans la baie de l’Aiguillon.

 

                 

BIBLIOGRAPHIE 

BEDON Maurice 

- « La Vendée disparue » Mémoire en Images

- « La côte vendéenne de Château-d’Olonne à La Faute- surmer  Editions  SUTTON

BELSER C. « Mémoire de Vendée, le train ».Editions C M D. 1999.

BROCHET Louis « La Vendée à travers les âges ». Res Universis. 1902.

Bulletin de la société Olona n°153.1995.

CONGRETAL S .  « Les années 1900 aux Sables d’Olonne ». Imprimerie Doré. 1978

FOULADOU Lucien « Mémoire d’Hier La Vendée 1900 -1920 »  De  Borée EDITIONS.

HAROUY Michel « La Vendée des petits trains » Editions Cenomane1987

JOANNE Paul  « La Vendée au XIXe Siècle » Les chemins de la mémoire Editeur.

MERRIEN Jean « Le Livre des côtes de France ». Atlantique. Editions Robert Laffont.1960.

M.G. Alexis  « La Vendée ». Editions du Bastion. La France pittoresque de l’Ouest. 1986.

RATONNAT J.f « La Vie d’autrefois en Vendée ». 2004.

ROBUCHON Jules. 1840-1922. « Imagier de la Vendée et du Poitou. L’Horizon chimérique ». 1999.

ROUILLE Joseph. « La Vendée autrefois ». Editions Horvath. 1988.

TRANCHANT Mathias « Les origines des Sables –d’Olonne »Geste Editions 2012

TRANCHANT Mathias «  le commerce maritime de la Rochelle à la fin du Moyen Age » Rennes , Presses universitaires de Rennes 2003

ROY Pierre «  SI l’Aiguillon m’était conté »1992                  

SOULARD Isabelle « Les Sables D’Olonne ». Geste Editions. 2005.

 

 

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24 février 2023

PUBLICATION: PREHISTOIRE DE LA TRANCHE

  L’ESTRAN DU GROUIN DE LA PREHISTOIRE 

 EVOLUTION DE LA TOPOGRAPHIE DU TERRITOIRE

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- 5 500 ans avant J-C :  Comment se présentait le futur rivage tranchais de cette époque ? Le niveau de la mer se situait de -12 à -8 mètres en dessous du niveau des plus basses mers actuelles. En 1970, Cyrille Delaire, instituteur Jardais et historien local, a imaginé le profil côtier en suivant les lignes des fonds des cartes marines actuelles.

 La Tranche (Carvor) aurait été implantée au centre d’une presqu’île orientée nord – sud séparée du continent par une mer intérieure qui s'étendait sur plus de 100 000 hectares et prendra plus tard le nom de golfe des Pictons. 

 

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 -3 500 ans avant J-C : Le niveau de la mer va passer de la cote -8 à -4 mètres au-dessous du niveau actuel des plus hautes eauxProgressivement sous l'influence du vent et des courants, le profil côtier va se modifier.La brèche initiale atteint le rocher de la Marche en créant une large communication directe avec l’océan.

 

 

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- De 800 à 300 ans avant Jésus-Christ : Le niveau de la mer évolue de -1 mètres au niveau actuel 0. Après l’isolement du rocher des Islates, du rocher des Vendeurs puis de celui de la Marche, un vaste banc de sable commença à se former et migra progressivement vers le fond du golfe. Cette séparation (truncare en latin) pourrait être à l'origine du nom de la Tranche : Carvor Trunca,..Tranchéa... Trancha...? Dans ce profil, la future Carvor serait devenue la capitale d'une île. 

 

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- Au début de notre ère : Le profil côtier continua à se modifier : les dunes mobiles colonisèrent le nouveau rivage limitant l’estran au niveau actuel.

Les rochers de la Marche et des Vendeurs furent immergés. Celui des Islate n’apparaît plus que lors de grandes marées.

 

 

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En arrière du cordon dunaire, un vaste marais inondé toute l’année s’étendait jusqu'à la limite de la plaine.

  

 

 

  

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LES PREMIERS OCCUPANTS

En janvier 1974, Michel Boiral, tranchais passionné d’histoire locale, parcourait l'estran du Grouin après une nuit de tempête, à la recherche de preuves de l'implantation des batteries de défense de la côte aux XVIIIe et XIXsiècles.

 

 

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Une forte marée associée à un vent violent avait balayé le sable de la plage découvrant, tel un livre d'histoire, des strates superposées.

 

 

 

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- De larges plaques calcaires du jurassique riches en fossiles : rostres de bélemnites (aïeules des seiches) et ammonites (escargots préhistoriques).

 

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– Sous ces plaques apparaissaient trois couches d'argile superposées qui se prolongeaient sous la dune :

- Une noire : vestige d'un ancien marécage comblé, contenant des débris de bois. 

 

 

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- Une bleue verdâtre : le « bri » constitué d'alluvions marines et fluviales.

 

 

 

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- Une troisième brune noirâtre d'une quarantaine de centimètres d’épaisseur, au-dessus d’une couche de cailloutis.

 

 

 

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En explorant le contenu de cette dernière couche, Michel Boiral découvrit plusieurs fragments de poteries grossières dont la surface présentait des empreintes régulières et alignées résultant manifestement d’une production humaine. Prolongeant les investigations de cette couche de terre graveleuse, il mit au jour :

 

 

Capture * Un silex taillé, suivi de 7 autres dispersés à proximité.

 

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 * Une anse de poterie, des ossements et des morceaux de bois calcinés.

 

 

 

Il confia ses découvertes à Roger Joussaume, archéologue et chercheur au CRNS, et à Mme Ters, géologue, spécialiste des variations du niveau marin du littoral atlantique durant la préhistoire.

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 De quels moyens scientifiques disposaient les chercheurs ?

 1. Les caractéristiques de poteries découvertes sur le site furent longtemps la seule source d’information permettant de dater les foyers d'occupation.

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2. La cartographie des fonds marins et la connaissance des variations du niveau de la mer en fonction de la température du globe permettent aux géographes de localiser le rivage à une période précise.

  

 

 

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 3. La datation par le carbone radioactif (14 C) découverte en 1952  révolutionna l’archéologie. Le Carbonne radioactif absorbé pendant leur vie par les organismes vivants, plantes ou animaux, se désintègre après leur mort sans pouvoir être renouvelé. Connaissant la durée de vie de cette molécule, il suffit de mesurer la quantité de 14C résiduel dans les fragments d’os ou de bois collectés sur les sites pour déterminer la date de leur fin de vie.

 

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 4. L’apport très récent de la génétique par prélèvement d’ADN dans les ossements humains recueillis sur les sites. La convergence des critères de l’analyse de ce matériel recueilli dans la glaise par notre archéologue amateur permit aux scientifiques d’affirmer une présence humaine sur le rivage de la pointe du Grouin entre 5500 et 5100 ans avant Jésus-Christ.

 

poteries neolithique de bellefonds

Les caractéristiques des tessons de céramiques trouvés sur le site de la pointe du Grouin par Michel Boiral répondent aux critères morphologiques des poteries du Néolithique ancien dont certaines ont été mises au jour en parfait état de conservation à Bellefond, dans la Vienne:

- Récipients à fond rond.

- Texture grossière

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 – Décors primitifs par empreintes de doigts ou de coquillages, stries en bandes et pointillés à la baguette (d'influence méditerranéenne).

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 - Anse de préhension à perforation horizontale collée sur la paroi d’un vase.

 Ce diagnostic sera confirmé par datation au carbone radioactif de fragments de bois calcinés recueillis dans la couche graveleuse de l’environnement des poteries.

Cette découverte bouleversa les connaissances acquises, faisant de l'estran du Grouin du Cou le premier lieu connu d'implantation humaine de la période du Néolithique ancien sur le littoral atlantique.

  • D'où venaient ces hommes ?
  • Quel était le motif de leur présence ?
  • Leur installation était-elle permanente ou occasionnelle
  • Étaient- ils les premiers occupants du site ?
  • Selon les scientifiques, les premiers occupants du littoral européen étaient des autochtones descendants du Mésolithique.

Cette population est estimée entre 15.000 à 20.000 individus.

Leur vie quotidienne était une lutte permanente pour couvrir leurs besoins alimentaires et survivre dans un environnement hostile et sauvage.

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Ces autochtones sont des prédateurs : chasseurs, pêcheurs et cueilleurs. 

La chasse et la cueillette sont la base d’une économie opportuniste de subsistance.

Ils utilisent depuis des millénaires l’épieu et le propulseur pour chasser.

Ils maîtrisent le feu, fabriquent leurs outils à partir de pierre, de bois et de cornes d'animaux.

 

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Ils chassent l’ours, le renne et les petits mammifères avec des arcs en if et fixent sur l’extrémité de leurs flèches des silex taillés. 

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Ils consomment des mollusques, comme les escargots, et des coquillages.

Pour adapter l’épieu à la pêche aux poissons, ils le modifient en créant des harpons taillés dans de l’os, de l’ivoire ou des bois durs. L’apparition d’un climat plus tempéré, le remplacement des animaux polaires, ours ou rennes, par des cerfs, des chevreuils et des sangliers modifièrent les stratégies de chasse.

 

 

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La présence de cette faune non migratrice favorisa l’implantation de groupes voisins qui se réunirent pour échanger des techniques et des denrées. Ces rencontres favorisèrent une exogamie et générèrent une croissance démographique. Après le feu, l’arc pour les chasseurs, l’invention principale fut la domestication des plantes puis celle des animaux.

   

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Ce sont les nouveaux arrivants, les colons venus du Proche Orient, des rives du Tigre et de l'Euphrate, qui apportèrent cette domestication de la nature. Elle amena de profonds changements de la vie (sédentarisation, augmentation des ressources, échanges) . Ces populations avaient progressé de découverte en découverte pour exploiter leur environnement et avaient créé un vaste territoire cultivé : « le croissant fertile ».

L’élevage et l’agriculture marquent le début du Néolithique.

L'amélioration de leurs conditions de vie entraîna une croissance démographique nécessitant une organisation collective de cette société.

Cette concentration des populations et la modification des rapports entre les individus créèrent des conflits d’intérêts. Cette nouvelle donnée leur imposa de rechercher de nouveaux espaces de vie.

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 Ainsi naquit la première conquête de l’ouest par ces agriculteurs venus du Proche – Orient à la recherche de nouveaux territoires libérés par le réchauffement climatique : elle dura 2 000 ans. Parties de Mésopotamie, 7 500 avant Jésus-Christ, les premières générations de colons mirent 2 millénaires pour atteindre la façade atlantique.

Outre le niveau initial du savoir de leurs pays d’origine, ils apportèrent les acquis culturels et les connaissances accumulées au contact des populations des pays traversés pendant leur longue migration. Il n’est pas certain que beaucoup de ces gens aient atteint la côte atlantique. Plus que les hommes, ce sont leurs connaissances qui se sont déplacées.Cette colonisation de l’Europe suivit deux voies d'accès :

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 – Le courant du sud, parvoie maritime, longeant le pourtour nord - méditerranéen traversant l’Italie avant d’atteindre le sud de la France. Ayant débarqué, ils remontèrent les vallées du Rhône et de la Gironde et se dirigèrent vers l’ouest.

 Le courant du nord, plus tardif, par voie terrestre par les rives du Danube à travers l’Allemagne puis le bassin parisien.

 

Ces deux sources ont évolué de façon indépendante sous l'influence des milieux traversés.

C’est de la fusion de ces deux courants et probablement de leur rencontre avec des autochtones du Mésolithique que se fera la néolithisation de l’Europe.

Que venaient faire ces colons sur le rivage du Grouin : s’y implanter ou l’occuper temporairement pour pêcher ?        

L’hypothèse d’une installation temporaire sur l’estran pour la pêche est probable.

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Ce constat poussa Michel Boiral à élargir son champ d'investigation à la totalité de l’estran tranchais, au rythme de la migration hivernale du sable. Le matériel collecté sur les sites du Grouin, des Génerelles, des Grandes Loges est hétérogène mais non mélangé. Il résulte d'occupations humaines successives trouvées par niveau d’occupation.

 

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Ce qui est certain c’est que parmi les tessons du site du Grouin ont été découvertes des poteries plus élaborées que les précédentes et présentant les caractéristiques de la période du néolithique moyen .

 

 

 

 

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- En pâte fine, façonnées à la main et décorées d'incisions linéaires, de pointillés ou de triangles.

- Arrondies, à bord éversé et à lèvre ourlée. munies d’anses prismatiques perforées

 

 De 2 200 à 750 avant Jésus-Christ : l'âge de bronze. Que se passe-t-il à cette époque sur l’estran tranchais ?

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La datation au Carbone 14 des bois trouvés aux Génerelles, dans l'argile flandrienne, permet d'affirmer l'existence en ces lieux, de forêts vers 2 300 avant J-C .

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 Les empreintes de bovidés, de moutons et de porcs, découvertes à proximité, sont de la même époque.

 

Certains tessons mis au jour sur le site du Grouin en portent la signature :

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 - Décor de lignes parallèles horizontales, obliques ou verticales en pointillé.

- Paroi dotée d’un épaulement.

 

– Une planche de bois ouvragéepièce exceptionnelle découverte et photographiée en 1979 par Michel Boiral sur le site du Grouin, était posée de chant et maintenue par un piquet de bois enfoncé dans la vase.

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De 1,47 mètre de longueur et 44 centimètres de largeur, elle présentait des mortaises et des tenons créés avec un outillage métallique.

 

 

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Son origine a été datée au Carbonne radioactif entre 1 530 et 1 310 ans avant J-C, époque du bronze moyen : c'est la plus ancienne pièce de bois travaillé découverte dans l'ouest de la France.

 

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 – Des pieux et des clayonnages « en fascine » pouvant répondre à des vestiges de pêcheries à poisson.

 

 

L’âge de fer : 750 avant J-C.

La transition bronze- fer se fit progressivement.

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La densité des vestiges du début de l'âge de fer (Ragnette à Jard, le Rocher de Longeville, les Conches, la pointe du Grouin, les Génerelles) traduit l'importance de l'occupation humaine tout le long du rivage sur ce versant du golfe.

 

 Au IIIe siècle avant J-C : la sédentarisation des Pictons.

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Les populations Celtes se sédentarisent. Pictons et Santons contrôlent l'espace de l'actuel Poitou et de la Vendée et apportent leur culture.

Le peuple des Pictons s’installe sur la zone littorale s'étendant de l'embouchure de la Charente à celle de la Loire.

Le pays des Pictons devient un carrefour où se mêle la culture celte, orientale et méditerranéenne.

Jusqu'à cette époque la traçabilité historique reposait exclusivement sur l'analyse des vestiges et surtout celle des céramiques seuls vecteurs permettant aux scientifiques de dater un foyer d'occupation, et d'imaginer en fonction du niveau de la mer, le profil géographique du territoire, et le mode de vie de ses habitants.

En l’an 57 avant J-C, Jules César impose l'expansion romaine à toute l'Europe sous le prétexte de soumettre les peuplades barbares qui ont osé saccager Rome en 397.

 Les récits de la campagne militaire en Poitou dans la "guerre des Gaules", sont les premiers documents écrits sur ce territoire.

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Le Golfe des Pictons va connaître encore bien des évolutions à travers la christianisation, les invasions barbares et les conflits féodaux.

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE 

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BENETEAU G., Les alignements des menhirs du sud de la Vendée, Ed. Anthropologica, 2000, 363 p.

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BOIRAL M. et JOUSSAUME R., La Tranche-sur-Mer avant notre ère dans son contexte régional, Ed. M. BOIRAL, 1990, 141 p.

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CHAUVET A.,  RENARD J., La Vendée. Le pays. Les hommes, 1978, 246 p.

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24 février 2023

PUBLICATION : VIE DE FEMME A LA TERRIERE EN 1900

 

VIE DE FEMME A LA TERRIERE EN 1900 

 

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En ce début du vingtième siècle,  aucun homme n‘aurait envisagé de prendre en charge une exploitation agricole sans femme.

Bien que l’économie en milieu rural ait été inconcevable sans elles, le code civil  les considérait à cette époque comme des mineures, placées d’abord sous l’autorité de leur père puis après leur mariage sous celle de leur conjoint.

N’ayant pas le droit de vote, elles étaient exclues de la vie politique.

Le mariage n’était pas un choix mais un « état de subordination héréditairement transmis ».

Une fois mariée, la jeune épouse venait vivre au domicile de son mari, souvent dans la maison de sa belle-famille.

Théoriquement « sans pouvoir », la femme jouait un rôle fondamental dans la gestion quotidienne  des avoirs du ménage. 

Sa nouvelle fonction maritale présentait de multiples obligations: 

- garantir la descendance, gage de survie de la main -d'œuvre sur l’exploitation ; Dans le milieu rural les enfants, surtout les garçons, futurs force de travail  représentaient la  richesse familiale.

 gérer le  budget et assurer les tâches ménagères quotidiennes en se mettant  au service de toute la famille dans un cadre de vie ou la cohabitation intergénérationnelle était la règle et ou le pouvoir gérontocratique des grands parents, propriétaires du patrimoine, s'exerçait jusqu’à leur mort. 

- aider  son mari dans les travaux agricoles  au gré des saisons.

Bien que la majorité des hommes de la Terrière aient été anticléricaux, 75 % des femmes allaient à la messe le dimanche. Les relations au sein de la famille étaient tributaires du modèle social imposé par la tradition et l’église. 

Cette dernière  accentuait cette subordination en culpabilisant les femmes si elles n’assumaient pas « leur devoir ».

Tout en supportant les  contraintes  de leur statut, elles subissaient des préjugés dégradant sur leur état de femmes.

Par exemple, au moment de leurs règles, pour ne pas être accusée de « faire tourner la viande ou le vin en vinaigre », on  leur interdisait d'être présente lors de  la mise au saloir du cochon et de pénétrer dans la cave pendant la période de fermentation. 

Privées  de vie publique y compris de leur  présence aux  baptêmes et aux enterrements, leurs  seuls lieux de sociabilité étaient le lavoir, le puit et le marché. 

 LE CADRE DE VIE                                                            

  L’organisation du village

En 1900, l’environnement des habitants de La Terrière se limitait à une étroite  bande de sable cultivable entre les marais inondés une grande partie de l’année et une jeune forêt de pins maritimes récemment plantés pour lutter contre la migration des dunes qui à chaque tempête envahissaient maisons et cultures.

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Le hameau était à l’image de ses habitants sous l’empreinte de l’individualisme. Les maisons et les dépendances étaient construites dans tous les sens. Pas de rue, mais des chemins de sable qui traversaient de façon anarchique de nombreuses cours sans clôture ni limites de propriété. On circulait entre les paillers, les "barges de foin" (meules) et les tas de bois. 

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Autour du village, les successions avaient morcelé les terrains agricoles, «les planches» en de multiples parcelles de quelques ares.

 

 

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Celles-ci étaient séparées par des rigoles,«les raises» où s’écoulait l’eau vers le marais.

 

 

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* Les maisons : Le hameau était constitué de petites maisons basses, construites en «pierres de mer» extraites à la barre à mine de l’estran rocheux du phare et rapportées à chaque marée. Par temps de pluie elles suintaient leur humidité.

 

Seule la façade de la pièce habitable était enduite à la chaux. Parfois une treille de chasselas courait jusqu’aux tuiles «tiges de botte» qui recouvraient des toitures à faible pente.

Cet habitat comprenait le plus souvent une seule grande pièce de 5 mètres sur 6, faisant office de cuisine, de salle à manger et de chambre à coucher familiale.

Les poutres et solives étaient apparentes, à peine équarries, passées régulièrement au lait de chaux.

Plusieurs générations vivaient dans la même pièce.

Chez les familles les plus riches, une seconde pièce était accolée à la première : la chambre des parents et des enfants en bas âge.

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Pour s'abriter du vent d’ouest des tempêtes hivernales, les ouvertures étaient limitées au strict minimum. Ces maisons n’avaient pas de fenêtre.  La salle commune était faiblement éclairée. La lumière du jour pénétrait avec parcimonie par l’unique porte extérieure d’une hauteur souvent inférieure à 1,80 mètre.

Cette porte  était construite en 2 parties : l’inférieure en bois plein, la supérieure, vitrée, était ouvrante.

Le tirage de la cheminée était si mauvais que l'on devait en permanence la laisser entrouverte pour ne pas étouffer dans la fumée. Elle n’était fermée que la nuit.

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Le sol était en terre battue.

Pour «parer la place» (embellir le sol), on allait chercher chaque semaine, dans un trou creusé au pied de la dune, du sable propre, «la dormée», que l’on étalait sur le sol.

 

 

 

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-La cheminée était le cœur de la maison : c’était le point de rencontre quotidien de toute la famille, on s’y réchauffait l’hiver durant les veillées. Vaste et peu profonde, on pouvait y enfourner des fagots entiers de sarments de vigne pour faire une «flambée».On suspendait les chaudrons au-dessus des braises et on entretenait le feu par des bouses pour y cuisiner les repas.

 

On y faisait la vaisselle dans une grande marmite de 40 litres. L’eau était réutilisée, pour faire la pâtée quotidienne des cochons : la «chaudronnaie».

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Sur le linteau en pierre de taille étaient exposés tous les « trésors » de la maison : bougeoirs en cuivre , "lampe  pigeon" , statues pieuses et  rameau de buis béni, vases, photos familiales, moulin à café. Au-dessus, sur un râtelier, trônait le fusil du père de famille

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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À l’intérieur du foyer étaient fixées deux épaisses plaques de fonte :

 – Une verticale au fond, devant laquelle pendait la crémaillère.

 - Une horizontale posée sur 2 blocs de pierre.

 

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Le repas y cuisait dans plusieurs chaudrons en fonte noire de taille variable posés sur leurs trépieds.

 

 

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Sous cette plaque était aménagé un espace fermé par une porte de fonte. Pendant l’hiver on y faisait sécher les chaussures.

 

 

 

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Au printemps la maîtresse de maison y mettait, confortablement installés dans un panier, les poussins de la couvée pour les réchauffer à la sortie de leur coquille.

 

 

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Le foyer était souvent encombré d’une multitude d’ustensiles .

 

 

 

 

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 -La «caramelle», cocotte dotée d’un couvercle et de deux  anses y  restait toute la journée pour cuire à feu doux la "mogette" accompagnée de gousses d’ail.

- La «bouillotte» pour réchauffer les lits. 

- Le «diable» en terre cuite pour griller pommes de terre et châtaignes.

- Les pots en grès de «beurre de pot» et de rillettes et enfin les charniers de lard salé.

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Parfois un réchaud rempli de braises permettait de cuire ou de maintenir chauds certains plats. Les pinces et la pelle à feu, le chauffe-pieds des femmes et la salière en bois pour maintenir le sel au sec complétaient l’équipement.

Pour éclairer la pièce, une lampe à pétrole suspendue au plafond, munie d’une poulie pour régler sa hauteur, n’était pas plus efficace que la chandelle de «roussine» (résine). 

 

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On entreposait les aliments, le beurre,  l’huile et le vinaigre dans «la  clisse», meuble dont la façade était munie d’un très fin grillage.

 

 

 

 

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Dans un renfoncement près de la porte, une pierre creusée avec un léger rebord constituait l’évier qui servait à la fois pour  la vaisselle et  la toilette. Les eaux usées s’évacuaient directement dehors à travers le mur. De chaque côté, trois seaux étaient remplis d’eau :

 

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- L’un d’eau fraîche sur lequel est posée une louche en bois à manche creux, la «cousotte», qui servait à puiser l’eau mais aussi à boire à la régalade.

- Un second utilisé pour la toilette de toute la famille.

- Enfin le troisième rempli de l’eau de vaisselle conservée pour la pâtée des cochons.

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 Le mobilier était restreint: 

 Une longue table et 2 bancs de bois permettaient d'accueillir les hommes et les enfants pour les repas.

Les femmes n’avaient souvent pas le temps de se mettre à table.

Après avoir nourri la maisonnée, elles se contentaient de grignoter, assises au coin de cheminée, assiettes posées sur les genoux .

 

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Un buffet bas dans lequel était rangée la vaisselle de tous les jours : plats et assiettes à soupe creuses, pichets en terre cuite pour l’eau et le vin, pots à mogette et plats à queue pour cuire sur le réchaud.

 

 

Il était surmonté d’un vaisselier ou était exposé la « belle vaisselle », celle utilisée pour les grandes occasions :communions et mariages.

 

 

 

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Situés de part et d’autre de la cheminée, 2 ou 3 lits surélevés «quenouille» ou à «baldaquin» étaient munis d’épais rideaux. La literie était constituée d’une paillasse remplie de feuilles de maïs ou de balle d’avoine qui faisait office de sommier, surmontée d’une couette de plumes recouverte des draps du dessous et du dessus. Traversin et couvre-pieds étaient en duvet d’oie. 

 La disposition des lits par rapport à la cheminée respectait un ordre hiérarchique en fonction de la proximité de l’âtre :

- Celui des grands-parents, le plus proche,

– Puis celui des jeunes parents et lit de bébé posé sur le coffre à portée de la mère,

- Enfin celui des autres enfants.

Les rideaux étaient censés assurer l’intimité de chaque génération mais aussi maintenir la chaleur lors des nuits d’hiver où l’eau gelait dans les pichets après l’extinction de la cheminée.

Les adultes célibataires dormaient dans une dépendance : " la chambre à patates".

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Les vêtements quotidiens étaient entassés dans le coffre situé devant le lit haut.

 

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-  Une grande armoire contenant la réserve de«gros linge» : draps, nappes et torchons qui n’étaient lavés qu’une fois par an lors de la «grande lessive»On y suspendait aussi «les habits du dimanche».

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Dans les familles les plus riches une horloge en forme de lyre, souvent offerte comme cadeau de mariage, trônait près de l’armoire. Elle rythmait la journée de son tic-tac régulier. Son fronton en métal était sculpté, son cadran émaillé.

Son balancier décoré de scènes champêtres et de personnages animés fascinait les enfants.

  Les dépendances

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* La «chambre à patates», dont les murs extérieurs n’étaient pas enduite .  Le plus souvent la pièce à vivre communiquait avec cette  pièce de servitude ou étaient stockées les récoltes : tas de pommes de terre, tresses d’ail et d’oignons. Cette pièce servait aussi de local de travail pour assurer l’entretien du matériel agricole dans la période hivernale où on n’allait pas aux champs.

 

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Le matériel de réparation était très réduit : une hachette, une serpe, une hache et quelques tarières

 

 

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L’outil le plus utilisé était le banc à plane : on y «écorçait» des branches d’acacia pour fabriquer les manches des outils avec un couteau à deux manches : "la plane"

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CaptureLa laiterie

C’était le  domaine exclusif de la maîtresse de maison.

Ce petit local était muni d’une écrémeuse pour la fabrication du beurre, unique matière grasse utilisée pour la cuisine. 

Alors que la production laitière était collectée tous les matins . Après la traite par le laitier d’Angles, celle du dimanche matin était réservée à la consommation familiale.

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Une partie du beurre était soigneusement travaillée dans des moules en bois à fond sculpté de motifs floraux pour être vendu au marché ou à la foire.

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Une autre partie était salée et stockée pour l’hiver  dans de grandes jarres : «le beurre de pot»Rien ne se perdait : le petit-lait était utilisé pour la nourriture des cochons et le caillé pour les poules.

Enveloppée de tarlatane, les fleurs d’artichaut ou de chardons, " la chardonnette ", déposée dans un bol de lait chaud permettait de fabriquer un laitage succulent : «la caillebotte» ancêtre de nos yaourts.

Sucrée et entourée de fraises elle complétait les repas de fête ou de communion.

La vente du beurre,  celle des œufs et de la volaille alimentait «la bourse de la femme» indépendante de l’argent de l'homme qui provenait de la vente de récoltes.

Ce trésor de guerre représentait l’apport de trésorerie nécessaire à l’acquisition de l'épicerie, du sel, des condiments, du pétrole pour l’éclairage et de l’habillage de tout le monde. La femme demandait rarement de l’argent à son mari et disposait du sien à volonté.

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  • * Le four à pain ou le fournil

Certaines familles possédaient leur four à pain.Habituellement il était situé en dehors de la maison dans un appentis voisin de la laiterie et de la cave. Sa surface était réduite à quelques mètres carrés.

 

 

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Le matériel se limitait à un pétrin en bois blanc : «la  maie», la pelle à enfourner, quelques «paillons» où l’on mettait le pain à lever, le tisonnier et le balai à cendre.

 

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 Beaucoup d’habitants de la Terrière ,«les villageats», faute de bois pour alimenter un four, pétrissaient la pâte tous les quinze jours et la portaient chez le boulanger pour la cuisson.

 À chaque fournée une partie, «le levain», était réservée dans une jarre pour ensemencer la fournée de la semaine suivante .

 

 

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Les pains ronds à croûte épaisse étaient stockés, à l’abri des rongeurs, entre  deux  poutres du plafond. 

Ils se conservaient pendant 3 semaines.

 

 

 

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* La chambre à bois et à bouses :Jusqu’en 1870 date de la plantation de la forêt de pins, le chauffage était exclusivement fourni par les excréments séchés des vaches : les «bouses». L’attribution de leur ramassage dans les prés communaux se faisait par mise en adjudication annuelle . 

 

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Le poulailler autre domaine exclusif de la femme

C’était un petit cabanon  au sein d’un enclos grillagé.

Chaque famille possédait un lot de poules , un coq, des canards et quelques pigeons.

 

 

 

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En liberté durant la journée, la volaille  était enfermée de bonne heure le soir pour ne pas tenter les renards.

 

 

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Au printemps, les poules couveuses étaient confortablement installées dans un appentis au calme pendant 28 jours sur une couvée d’une vingtaine d’œufs.

Pour les maintenir sur le nid afin d’assurer la réussite de la couvée, on les entourait d’une abondante quantité de nourriture (blé, salade, son).

 

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Des vieilles barriques ou des caisses en bois abritaient les lapins. Ils étaient nourris d’épluchures de légumes, de feuilles de chou, de pissenlits, de trèfle et d’un peu de son. 

Hormis les grandes occasions (mariage où communion) la volaille et les lapins étaient peu consommés par la famille. 

 

 Ils étaient vendus pour acheter du tissu, des vêtements ou des chaussures ou servaient de monnaie d’échange pour régler une consultation de la sage-femme ou du médecin. À cette époque, faute de Sécurité Sociale, les consultations étaient à la charge des patients.

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 L’écurie et la grange

Compte tenu de la  taille du cheptel réduit à une ou deux  vaches , à un âne ,moyen de locomotion le plus répandu ou un cheval, un seul bâtiment muni d’une porte à double battant faisait à la fois office d’écurie et de grange. Une cloison en bois limitait le box de l’indispensable «bourricot».

 


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L’étable, faiblement éclairée par une petite lucarne : «la calouette», était dotée d’un râtelier et d’une mangeoire.

 Au mur trônait le tabouret à 3 pieds pour traire les vaches et une lampe à pétrole.

 

 

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Le sol pavé de granit présentait une pente vers une rigole par où s’écoulait le purin.

Remplacer la litière par de la paille fraîche et distribuer le foin faisait partie de la tâche matinale de l’homme de la maison.

 

 

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Le fumier était évacué à la brouette vers un tas situé face à la porte de l’écurie.

C’était la cantine de toute la basse-cour.

 

 

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Compte tenu de l’étroitesse des bâtiments agricoles, paillers et barges de foin étaient stockés à l’extérieur.

Ils étaient ceinturés par des fils de fer lestés de grosses pierres pour les protéger du vent.

Le plus souvent " la grange" était utilisée pour abriter la charrette.

 

 En dehors des macreuses, canards marins pêchés au filet sur les bancs de moules, le cochon était souvent la seule source de viande de la consommation familiale.

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 * Le toit à cochons,  dit «té à gorets» était un petit bâtiment de quelques mètres carrés entouré d’un enclos ...

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... muni d’une auge en pierre.

 

 

 

 

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Les plus riches possédaient une truie, "la mère gorette" chargée d’assurer la descendance.

Lorsqu’elle était « en chaleur » on la conduisait pour un séjour de 24 heures chez le  propriétaire d’un mâle, «  le verrat » pour la féconder. Ses portées variaient entre 6 et 8 porcelets.

On en gardait 2 à engraisser et on revendait les autres aux voisins ou on les amenait à la foire aux bestiaux des Moutiers ou d’Avrillé.

 

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Deux fois par jour, la femme de la maison versait dans l’auge « la chaudronnaie», mélange subtil fait d’eau de vaisselle, de pommes de terre bouillies écrasées avec du son ou de la farine d’orge et de lait écrémé. Quelques semaines avant l’abattage, leur régime passait à 3 repas par jour pour accélérer l’engraissement. On tuait en général 2 cochons de 120 à 150 kg par an.

 

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 * La cave

C’était le signe extérieur de richesse que chaque chef de famille faisait visiter avec fierté en vous invitant à goûter sa production.

Pièce « fraîche », on y entreposait durant la saison chaude les poissons, les crabes et coquillages pêchés à la marée. On y accédait par une porte basse qu’on franchissait en inclinant la tête.

 

 

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Il y régnait une odeur particulière faite d’un mélange de celle de soufre, utilisé pour les sous tirage, de vin aigre et de lie de fond de barrique. Deux rangées d’une quinzaine de fûts cerclés de châtaignier, posés sur des «tains» de 40 centimètres de hauteur pour faciliter la vidange, se faisaient face sur toute la longueur de la cave.

 

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La barrique la plus proche de l’entrée était celle «en perce», munie d’un robinet, «le jau», par lequel on tirait l’approvisionnement quotidien. Un petit «barricot» pour faire le pineau était accroché à une poutre. Sa recette se transmettait de père en fils : pour 40 litres de pineau on mélangeait au moment des vendanges 30 litres de moût de Noah pressuré et 10 litres d’eau-de-vie maison à 72 degrés.

 

 On faisait aussi de la liqueur de cassis et de noix pour les femmes.  

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Au fond siégeait le pressoir, dans lequel étaient rangées les hottes à vendanger : «les basses».

Chaque pièce était soigneusement démontée et lavée après la récolte.

 

 

 

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 * Les "calogeats"Chaque habitant possédait une ou plusieurs cabanes construites en brande ou en roseaux : « les Cologeats ». C'est là qu’on entreposait les outils agricoles mais aussi les engins de pêche : les tonneaux à anguilles, les filets : treille, senne et tramails. On y mettait à sécher l’ail, les oignons et échalotes.

 

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 * Les toilettes

Chez les plus évolués, luxe suprême, les «cabinets» se résumaient à une simple planche trouée au-dessus d’un puisard.

 Pour les autres le tas de fumier résolvait le problème.

 

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 * Le puits : Bien que creusé sur un terrain privé,il était souvent partagé avec les voisins qui avaient un droit d'accès et de puisage dûment notifié dans l’acte de propriété. Lieu de rencontre et d’échange : c’était pour les femmes l’endroit où on cancanait en attendant son tour. On parlait, on riait, on chantait en tirant l’eau de la lessive ou de la vaisselle. 

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Le puisage et le transport de l’eau relevaient de la mission des femmes.

Heureusement pour elles, les puits du village étaient peu profonds : la nappe phréatique étant à moins d’un mètre du niveau du sol.

Durant l’été le puits était utilisé comme garde-manger pour tenir les aliments au frais dans des seaux suspendus à la surface de l’eau.

                                   

 

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*Les commerces du village

- La boulangerie : A la Terrière l’emplacement de la boulangerie n’a pas bougé depuis 150 ans. Le  fournil est le seul endroit du village éclairé toute la nuit.

La farine était entreposée à l’étage.  Guidée par un « manche » en tissu elle tombait directement dans le pétrin en chêne. 

 

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Mélangée à l’eau, au sel et à la levure, elle était longuement malaxée à la main.

Pétrie, découpée et pesée la pâte était mise au repos, «à lever», dans de grands tiroirs en bois.

Puis fendue d’un coup de lame de «grigne» la pâte était enfournée pour la cuisson.

 

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Au lever du jour, les premières clientes venaient s’approvisionner.

En 1900 la consommation de pain, aliment de base des Français, était de 900 g /jour/habitant, elle est actuellement de 150 grammes. Chaque foyer consommait quotidiennement plusieurs pains de 4 ou 6 livres.

 

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Pour suivre sa consommation, chaque famille avait «sa coche». C’était une baguette en acacia fendue en 2 parties dans le sens de la longueur (celle du client, celle du boulanger).

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À chaque livraison, on accolait les 2 morceaux que l’on encochait du nombre de pains emportés.Ce moyen simple de double marquage servait à comptabiliser la consommation familiale. La facture était réglée mensuellement.

 

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 - Les cafés-épiceries

Pour ses 300 habitants, La Terrière possédait 3 cafés-épiceries. Coté épicerie, domaine des femmes, les « boutiques » se limitaient à un comptoir muni de nombreux tiroirs, d’une balance Roberval et d’un moulin à café.

 Quelques plaques émaillées pour «la réclame» étaient accrochées en devanture et sur les murs.

  

 

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Ces magasins étaient de véritables fourre-tout. On y trouvait des sacs de café vert qui était torréfié sur place puis moulu, des sacs de poivre en grain ,des vinaigriers et des pots de moutarde.

 

 

 

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Des articles de mercerie : aiguilles, boutons, fil à repriser, élastique… voisinaient avec des bougies et même avec du charbon. Pour les enfants, un présentoir était garni de boîtes de friandises : sucettes au caramel, bonbons acidulés, bâtons de réglisse et poudre de coco.  

 

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Côté café, exclusivement réservé aux hommes, les salles étaient dotées d’un «bar» et de quatre ou cinq tables entourées de chaises.

Ils étaient le lieu de la vie sociale des hommes du village.

 

 

 

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Comme dans les caves, on s’y rencontrait pour refaire le monde, se vanter de ses exploits de pêche ou de chasse, parler politique…

Le plus fréquenté était celui de Félicien GUIEAU. 

 

 

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Le bistrot était le lieu d’effervescence où résonnaient les annonces et les surenchères bruyantes des joueurs de cartes. Le soir, les anciens venaient prendre des nouvelles de l'actualité en faisant une belote ou une partie de «vache» (l’aluette).

   

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Le dimanche, tous venaient prendre une chopine après la partie de boule. Durant la saison pluvieuse, la partie de palets sur une plaque de plomb posée sur le sol devant le comptoir remplaçait celle des boules.

 

 Le tabac y était vendu sous trois formes :   

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- Le tabac à «chiquer» constitué de feuilles de tabac roulées dont on coupait au couteau un morceau que l’on mâchouillait avant de le coincer contre la joue.

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- Le tabac "à priser", finement découpé dans de petites boîtes métalliques, il était déposé dans le creux de la main entre pouce et index et inhalé par le nez.

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– Le tabac «gris» vendu dans un emballage en papier était utilisé par les fumeurs de pipe.

 

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 * Les commerces ambulants

Pour les femmes leur passage dans le village était une attraction qui rompait la monotonie du quotidien.

 

 

 

 CaptureLors des grandes marées de juillet et d’Août ,un boucholeur venait de l’Aiguillon vendre des moules qu’il transportait dans des mannequins ou dans des sacs de jute humidifiés d’eau de mer. 

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Au printemps et durant l’été, une marchande de sardines venait de Jard. Elle signalait son approche par de sonores «A la fraîche, A la fraîche» qui attiraient l’attroupement des enfants. 

  

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En janvier et février des pêcheurs de civelles de Moricq ou de l’Aiguillon proposaient leur marchandise dans de grandes bassines en bois.

Le plus attendu était le colporteur qui allait de village en village.

 

 

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Il s'arrêtait dans la "grande rue" ,étalait sur le chemin sa marchandise  et proposait  bassines casseroles couteaux, vaisselle , ruban, fil, dentelle, boutons, plantes médicinales… et « pommades miracles ».

 

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Sans oublier, un pittoresque marginal spécialiste des cuisses de grenouilles qu’il vendait en brochettes, il ramassait aussi  les peaux de lapin.

                                

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 * La structure familiale: 

En dehors du boulanger, des épiciers aubergistes, du négociant en légumes etdu forgeron, tous les habitants de la Terrière étaient des paysans de la mer.  Ils menaient conjointement deux activités nourricières : agricole et maritime. Chaque membre de la famille avait son rôle dans le fonctionnement quotidien. Les grands-parents, propriétaires de l’exploitation, conservaient jusqu’à leur mort le pouvoir sur la gestion du patrimoine familial.

Faute de retraite ils devaient travailler jusqu’au bout de leur vie .

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Tant qu’il était valide, le patriarche dirigeait l’emploi du temps et l’organisation des travaux des champs tout en limitant progressivement son activité au ratissage des semis par beau temps, au tri des semences et à l’entretien de ses engins de pêche. Surveillant quotidiennement l’état de la mer, c’était lui qui donnait le signal du ramassage de goémon  lors des tempêtes hivernales ou de mise à l’eau de la senne à l’arrivée des bancs de mulets de vendange en septembre.

 

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Les travaux ménagers se faisaient sous la haute autorité de la grand-mère qui restait à la maison pour surveiller les petits et la cuisson des aliments.

 

 

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En dehors du temps scolaire, les enfants devaient participer aux travaux agricoles : ramassage des pommes de terre, tri des haricots, collecte des pommes de pins .

 

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Ils étaient formés très jeune à participer à la collecte alimentaire de crustacés et coquillages et étaient embauchés aux marées de coupe du goémon.

  

 

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Les hommes , porteurs du pouvoir héréditaire de l’ascendance mâle, représentaient l’autorité à l'extérieur de la cellule familiale. Les labours, exclusivement pratiqués à la main, à «la freille» et les transports des pesants sacs de pommes de terre, d’oignons et de haricots faisaient partie de leurs attributions.

 

 

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Une grande partie de leur temps était réservée à leurs activités maritimes : «les villageats» étaient de grands prédateurs.

De jour comme de nuit au rythme des marées, ils parcouraient le rivage. 

 

Les heures passées à la mer et dans leurs caves représentaient plus de la moitié de leurs journées.

Selon les moines venus leur « prêcher la bonne parole », leur image n'était pas très flatteuse.

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Face à son échec « pastoral », DOM FONTENEAU, Bénédictin du monastère de Luçon, les avait même décrits auprès de sa hiérarchie comme des « ivrognes, paresseux, mécréants, avares et féroces passant leur temps à écumer le rivage à la recherche d’épaves, pillant les naufragés, ou à pêcher à la mer, de jour comme de nuit sans respecter le jour du seigneur… »

Il est vrai qu’attachés à leur indépendance, ils avaient toujours refusé l’affairisme des riches abbayes à lever la dîme à leurs dépens. 

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«La patronne»,malgré son titre cumulait les tâches ingrates. Théoriquement «sans pouvoir», la femme jouait un rôle fondamental dans la gestion quotidienne des avoirs du ménage.

 

 

Son statut marital imposait 3 obligations :

Garantir la descendance, gage de survie de la main-d’œuvre sur l’exploitation.

Gérer le budget et assurer les tâches ménagères quotidiennes en se mettant au service de toute la famille dans un cadre de vie ou la cohabitation intergénérationnelle était la règle. Ce travail domestique intégrait les soins aux personnes âgées dans un contexte où le pouvoir gérontocratique des grands-parents, propriétaires du patrimoine, s'exerçait jusqu’à leur mort.

Seconder son mari dans ses tâches agricoles au gré des saisons.

 LE RÔLE DES FEMMES

 Une priorité : assurer la continuité de la lignée.

Le terme de ce mandat n’était considéré comme atteint qu'après le mariage du fils aîné .

Ce rôle reproductif lui faisait assumer les étapes suivantes  jusqu’à la naissance de son premier petit-fils :

*- La grossesse

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Dans une famille rurale les enfants, surtout les garçons, future force de travail pour l’exploitation, représentaient une richesse. Les familles comptaient de trois à sept enfants. Les années de mariage s’écoulaient au rythme des grossesses. Les premiers nés étaient source de fierté mais subir une succession de maternités était parfois à l’origine d’une certaine indifférence à l’égard de la progéniture suivante. Faute de contraception, au-delà du troisième enfant, la femme enceinte acceptait son état avec fatalité (elle «était prise»). Ne pouvant ralentir ni arrêter ses activités, 15 % des grossesses se compliquaient de fausses couches. 

* - L’accouchement

Il se faisait à domicile, souvent devant de la cheminée sur un drap posé sur une litière de paille, le dos soutenu par une chaise renversée, les pieds appuyés sur le bord du foyer.

Bien qu’on laisse les enfants assister à la saillie des animaux et au vêlage des vaches, la naissance restait taboue ou, par pudeur, entourée de mystère.

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Dès les premières contractions, les frères et sœurs étaient envoyés chez la voisine. Le mari partait en charrette chercher la sage-femme de Longeville connue et appréciée de toutes les femmes du village. Les honoraires d’un accouchement par ses soins correspondaient au prix d’un kilo de beurre. L’appel du médecin était réservé, chez les plus aisées, aux femmes ayant présenté des accidents lors d’un accouchement précédent : fausses couches récidivantes ou décès de l’enfant sur mauvaise présentation.

Lorsque l’intensité des douleurs augmentait, les femmes de la famille et les voisines entouraient la future mère en bavardant et en l’encourageant. En attendant l’arrivée de la sage-femme, elles préparaient un bon feu, mettaient à chauffer une grande bassine d'eau pour nettoyer les mains et le sang des couches et préparaient le linge nécessaire pour la mère et l’enfant. Ciseaux et fil pour ligaturer et couper le cordon ombilical, eau-de-vie ou vinaigre pour réanimer le bébé en cas de faiblesse, flacon d’eau bénite , tout était prêt pour l’accouchement.

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Le premier cri poussé et la première toilette faite, l’enfant était langé de la tête aux pieds, comme une momie, jambes serrées l’une contre l’autre pour éviter les boiteries liées à une malformation régionale : la luxation congénitale de hanche fréquente en Bretagne et en Vendée.

Traditionnellement, le cordon et le placenta étaient enterrés dans le jardin au pied d’un arbre.

La déclaration à l’état civil 

Le père accompagné de 2 témoins se rendait le jour même à la mairie de la Tranche pour déclarer le nouveau-né.

La date et l’heure de la naissance, le sexe, le prénom et le nom de famille étaient inscrits sur le registre d’état civil.

Le premier fils prenait le prénom de son père.

*  - Le baptême

Une naissance sans baptême n’était pas envisageable. 

Considérée par l'Eglise comme « impure », la jeune accouchée n’était pas autorisée à participer aux festivités . 

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Le jour même où le lendemain de la naissance, pour être dans le délai des trois  jours imposé par l’Eglise, c’était la marraine ou la grand-mère, accompagnée du père et du parrain, qui portait le nouveau  né sur les fonts baptismaux.

 

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Le bébé était vêtu de la robe blanche précieusement conservée pour les cérémonies de baptême de tous les enfants de la famille et d’un bonnet offert par la marraine.

 

 

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Après l’office, le parrain distribuait des dragées et des pièces de monnaie aux enfants de chœur. Cette offrande stimulait leur énergie pour faire carillonner les cloches.Si le sacrement n’intervenait pas dans le délai imposé, les cloches ne sonnaient pas.

 

* -  Les relevailles

Il  était interdit à la jeune accouchée de reprendre son travail, d’aller puiser de l’eau, de traire les vaches, de couper le pain et surtout de « souiller » son homme avant la cérémonie de « purification » : les «relevailles».

 Seule consolation, pour accélérer sa remise sur pied, on la nourrissait de « bouillon de poule ».

Au dixième jour après son accouchement la jeune mère devait se rendre à l’église pour «se repentir». Cette cérémonie marquait la fin de la période des couches. Accompagnée de sa mère, elle offrait un cierge qu’elle disposait au pied de l’autel puis elle  était bénie par le prêtre.

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Ce n’est qu’après ce cérémonial que, libérée des interdits de la grossesse, elle pouvait alors reprendre le cours de ses activités quotidiennes en assurant désormais ses nouvelles obligations de mère.

 

 -La petite enfance

Suivant les préceptes de l’Église, sous peine d'être une « mère contre nature », l’épouse devait nourrir le nouveau-né au sein.

Emmaillotés jusqu'à l’âge de 6 mois ou plus, les enfants restaient seuls à la maison attachés dans leur lit pendant les heures de travail aux champs. En cas de manque de lait, on faisait appel à une nourrice qui alimentait gratuitement d’autres enfants que les siens.

En raison de l’effet contraceptif de l’allaitement, le sevrage n’avait lieu qu’entre le septième et le quinzième mois, longtemps après la poussée des premières dents. 

Conséquence des habitudes de repas « à la demande », le changement de régime alimentaire était difficile. Pour faire refuser le sein à son bébé et accepter les bouillies ou les soupes de pain, la mère s’enduisait les seins de moutarde, de poivre ou de lait de tige d’artichaut.

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À partir de ses deux ans, elle l’emmenait aux champs. Toujours emmailloté, elle le suspendait à une branche d’arbre proche de son lieu de travail pour le protéger des animaux.

Cet emmaillotage retardait l’âge des premiers pas mais le début de l’autonomie était loin d'être vécu comme une libération par sa mère.

Jusqu’à l’âge de l’école et de sa première culotte, il vivait avec des adultes le plus souvent ses grands-parents.

L’apprentissage de la marche se faisait plutôt à partir de la 2e année en limitant le périmètre de marche. 

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- Soit par la "carriole" qui lui permettait de participer à l'activité familiale sans "déranger"

 

 

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Soit par un ancêtre de nos youpalas : «le promenou»

Soit par un «virrou» : bretelles fixées à une poutre du plafond par une laisse permettant à l'enfant soutenu par les aisselles de marcher en tournant.

 

 À partir du sevrage, on abandonnait les langes pour un large «sarrau» qui lui permettait de «faire ses besoins » à l’air libre sur le sol en terre battue au fil de son inspiration et de ses déplacements.

Faute de jouets, son activité se limitait à pourchasser, un morceau de bois à la main, tel un conducteur imaginaire d’attelage, les animaux qui circulaient dans la pièce : chien, chats et même les poules venues picorer les miettes sous la table.

Franchir la première année demeurait une étape difficile : 25 % des nourrissons décédaient avant leur premier anniversaire.

Les remèdes empiriques, incantations magiques, rites et prières bien que multiples et variés avaient peu de résultats sur les fièvres, les convulsions, les diarrhées et les maladies infantiles : variole, rougeole, coqueluche ou diphtérie qui décimaient le premier âge. 

Le gardiennage de plusieurs enfants en bas âge par la grand-mère était souvent à l’origine d’accidents : s’étouffer dans son lit ou en tomber, se brûler ou s'ébouillanter dans la cheminée, se noyer dans le puits ou l’abreuvoir. La mort infantile était considérée comme une fatalité.

 La scolarisation

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La participation précoce de l’ enfant aux tâches ménagères et agricoles de la mère nuisait à la fréquentation de l’école. Les parents rechignaient à se priver du travail des jeunes gamins : nourrir les poules et les cochons, récolter les pommes de terre ou trier la mogette représentaient des heures de travail.

La loi de 1887 avait rendu obligatoire et gratuite l’école primaire à partir de 5 ans avec une mission claire : apprendre à tous à compter, à parler et à écrire le français. De nombreux enfants s’exprimaient en patois à la maison et en français à l’école.

L’école avait aussi un rôle éducatif : on y prenait conscience de l’hygiène corporelle par le contrôle quotidien de la propreté des mains et des oreilles et  de la propreté en rangeant et en balayant la classe.

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Jusqu’en 1910, année de la création de l’école de La Terrière, les enfants étaient scolarisés à l’école du bourg de  la Tranche distante de 3 kilomètres. 

Quel que soit le temps, du 1er octobre au 31 juillet, les écoliers devaient partir en groupe, à 7 h 30 du matin munis de leurs paniers de repas.

Pieds chaussés de bruyants sabots de bois remplis de paille ou de galoches à semelles de bois clouté, béret sur la tête, munis d’un capuchon imperméable les jours de pluie.

Ils faisaient quotidiennement 6 kilomètres aller et retour.  

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Parfois retardés par les conditions climatiques, la fin du trajet se faisait en courant pour atteindre la cour de l’école avant le signal de la cloche.

Chacun prenait alors sa place dans la file d’attente face à sa classe avant de gagner son pupitre . Les filles étaient habillées de leurs tabliers ouverts devant.

 

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Les garçons portaient des culottes à bretelles et des « sarreaux » gris foncé ou noirs boutonnés dans le dos.

 

 

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Le bureau de l’instituteur installé sur l’estrade permettait de surveiller l’ensemble des élèves.

 

 

 

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Les pupitres faits d’une planche inclinée présentaient une rainure pour empêcher le porte-plume de glisser.

Un encrier en porcelaine était encastré à la droite de chaque place.

 


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Les  salles de classe étaient occupées par 3 rangées de tables : celle des grands du cours moyen, la deuxième pour ceux du cours  élémentaire et celle des petits du cours préparatoire. Des cartes de la France et des tableaux de sciences naturelles recouvraient les murs.

 

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Au centre de la classe trônait un grand poêle à bois.

Un élève de dernière année était désigné pour allumer et entretenir le feu et balayer la classe en fin de journée.

 

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À 11 heures (heure « solaire ») c’était l’heure du déjeuner. Des bancs disposés sous le préau ou dans la cour faisaient office de cantine sauf les jours de très grand froid ou le repas était exceptionnellement autorisé dans la salle de classe chauffée. 

 

On sortait de la musette tout ce qu’avait préparé leur mère avant leur départ : les tartines de beurre, de pâté ou de rillettes, des oignons, des œufs durs, de la mogette froide dans une boîte métallique, des pommes, la petite bouteille d’eau ou même de vin pour certains.

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La cour de récréation était en sable, filles et garçons y  étaient séparés.

Les filles construisaient des maisons, jouaient à la marelle, aux osselets ou à la « puce », au cerceau ou à sauter à la corde.

 

 

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Les garçons préféraient construire des châteaux de sable ou des bateaux, ou jouer à saute-mouton, colin– maillard, sans oublier les toupies en bois ou les billes appelées « marbres » avec de grosses « bombes » en fer. Les punitions de l'instituteur consistaient en des tours de cours en silence et bras croisés, au ramassage des feuilles mortes en automne ou en des pages d’écriture.

 

Le chemin du retour de l'école donnait l’occasion de tirer au lance-pierre sur les moineaux que l’on rapportait fièrement à la maison pour les faire cuisiner.

Les vacances scolaires commençaient à la fin juillet et on reprenait le 1er octobre.

En dehors des 2 jours de la marée de ramassage du goémon les travaux agricoles ne donnaient pas lieu à un arrêt de l'école.

 - L’entrée dans le monde du travail

À 12 ans les enfants devenaient des travailleurs adultes. Rares étaient ceux qui faisaient une année supplémentaire pour passer le certificat d’études. Les garçons suivaient leurs pères aux champs et à la mer.

006 (5)En cas de maladie ou de décès précoce de la mère, la fille aînée restait célibataire et prenait en charge la maisonnée.

Les rares enfants de La Terrière qui, faute de travail sur l’exploitation familiale, devaient se mettre sur le marché du travail proposaient leurs bras durant les foires de la Saint-Jean ou de la Saint-Michel.

Ces enfants « gagés » découvraient d’autres « maisonnées ».

La première rencontre du « petit domestique » ou de la « petite servante » dans la ferme du futur « maître » se faisait accompagnée du père.

Leurs gages annuels se limitaient le plus souvent à la nourriture, au logement, à une chemise et une paire de sabots de bois et à quelques sous d’argent de poche.

Le travail était pénible et l’hébergement souvent spartiate dans une dépendance sans eau ni chauffage.

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Certains garçons partaient en apprentissage chez un menuisier, un charron ou un forgeron.

Les filles qui n’étaient pas placées en ferme apprenaient le métier de lingère ou de couturière et circulaient au gré des commandes, transportant la machine à coudre dans une brouette. Souvent elles travaillaient « à la tâche » tardivement dans la soirée, jusqu’à ne « plus voir clair ».

 

Pour ces adolescents qui avaient dû quitter le domicile familial, le placement ou l’apprentissage leur faisait découvrir un monde nouveau, différent de leur milieu d’origine.

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Pour les garçons, à 19 ans, après le conseil de révision, l’appel sous les drapeaux signait un saut dans l’inconnu loin de leur environnement, de leur travail et de leur famille pour trois  années de service militaire.

 

 

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Libérés de leurs obligations militaires, ils passaient en général quelques semaines d’euphorie à « faire les caves » avec leurs « copains de classe » et à dilapider le pécule de leur solde en boisson.

La mère n’avait d’autres possibilités que d’attendre avec impatience que le jeune pense aux choses sérieuses : se marier pour assurer la relève.

 

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 Les premières fréquentations

 Faute d’autre moyen de locomotion que leurs deux  jambes, leur périmètre d’exploration ne dépassait pas les communes alentours.

Les possibilités de rencontres étaient limitées. Elles avaient le plus souvent lieu dans le voisinage familial lors des mariages qui souvent réunissaient une centaine d’invités, lors des foires ou des sorties du dimanche.

 

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Les premières rencontres avec l’autre sexe étaient sous haute surveillance parentale.

Après des mois de rencontres discrètes, si le projet marital s’affirmait, la jeune fille devait présenter «son galant»à ses parents.

Dans cet environnement restreint, fortune, qualités et défauts du prétendant et de sa famille étaient connus de tous.

 

 

 

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Si l’opinion du père était favorable, la demande se soldait entre hommes par un verre à la cave suivi d’une invitation à  dîner qui permettait à tous les membres de la famille de découvrir la personnalité et le comportement du candidat.

Cet examen de passage officialisait son agrément et lui ouvrait la porte de la maison.

Même l’avis de grands-parents de la jeune fille, propriétaires du patrimoine familial, était incontournable pour fixer le montant de la dote qui lui serait versée.

 

 

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Les fiancailles et les préparatifs à la noce: 

Après quelques mois de fréquentations c’était le temps des fiançailles officielles. Les deux familles se réunissaient chez les parents de la jeune fille pour discuter des moyens financiers du futur ménage et la date du mariage. Le plus souvent, les festivités avaient lieu au domicile de la mariée. Chaque famille faisait la liste de ses invités. Les parents se déplaçaient auprès du parrain et de la marraine, des oncles, tantes et cousins, des amis et des voisins pour les convier à la fête.

 

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Les jeunes invitaient leurs camarades de classe et leurs amis. Le nombre des invités pouvait dépasser cent cinquante personnes. La confection de la robe de la mariée par la couturière imposait de nombreux essayages. Pendant ce temps les copains du futur époux préparaient « l’enterrement de sa vie de garçon » signant théoriquement la fin des soirées entre célibataires dûment arrosées dans les caves.

Les « bans » étaient affichés à la porte de la mairie et la date du mariage annoncée  en chaire lors du sermon des 3 dimanches précédant la cérémonie : le grand jour approchait.

Invitations et organisation des festivités relevaient des jeunes. Les frères et sœurs des mariés, les « camarades de communion », les cousins et les amis se mettaient au travail pour préparer la « salle de noce » où devait se dérouler les festivités. Le plus souvent la grange ou le hangar agricole de l’une des deux fermes familiales était le seul local capable d'accueillir la centaine de convives invités.

Pendant la semaine précédant la cérémonie c’était l’effervescence. Les jeunes femmes après un grand nettoyage, tendaient des draps sur les murs. Sur toute la périphérie de la grange, les amis du futur marié posaient de grandes planches sur des barriques vides pour faire office de tables qui étaient recouvertes de nappes.

Si les places assises manquaient on couchait des échelles sur des caisses et on les recouvrait de planches. On allait chez les voisins emprunter la vaisselle, les bancs et les chaises disponibles. Le centre était aménagé en aire de danse.

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En cuisine l’activité était aussi fébrile : sous la haute autorité des mères et grands-mères, on tuait les poulets, canards ou lapins, on cuisait les rôtis et les pâtés.

Toutes les voisines du quartier donnaient un coup de main.La veille du mariage, les amies de la mariée décoraient les murs. Au printemps et durant l’été elles y accrochaient des centaines de fleurs naturelles. En période hivernale la fabrique de fleurs en papier occupait les petites mains pendant les veillées familiales.

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Les hommes participaient aussi activement aux préparatifs. Après de longues dégustations dans chacune des caves familiales pour choisir les meilleurs vins, ils amenaient les barriques sélectionnées et les mettaient en perce.

 

 

 

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Le boulanger pétrissait une brioche dont le poids pouvait atteindre 20 kilogrammes offerte par le parrain et la marraine destinée à la traditionnelle «danse de la brioche». Tout était prêt pour le grand jour : l’entrée du chemin menant à la maison était ornée de branches de houx ou de sapin et couvertes de fleurs.

 

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* Le mariage : Le matin du mariage, seules étaient admises à l’habillage de la mariée, la couturière qui avait réalisé la robe, la coiffeuse, sa marraine et ses camarades de communion. Le petit-déjeuner rapidement expédié, les premiers invités arrivaient. Le planning était serré car il fallait prévoir le temps de transport, à pieds ou en charrettes pour parcourir la distance  du domicile de la mariée  au bourg de La Tranche. À l’entrée du village, tout le monde se regroupait.

 

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Les cafés du bourg étaient assaillis par les invités de la noce qui attendaient l’arrivée des futurs mariés.La demoiselle d’honneur donnait lecture de la formation des couples et leur ordre dans le cortège.

 

 

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Sur le parcours, les gens devant le seuil de leurs maisons avaient disposé des bouquets sur des chaises. Chacun prenait une fleur pour l’accrocher à sa boutonnière et donnait une obole collectée par le garçon d’honneur.

Certains tiraient des coups de fusil à l’approche des futurs mariés.

 

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En tête du cortège, derrière le violoneux, le père de la mariée conduisait sa fille suivie de la mère du marié au bras de son fils.

 

 

 

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Après un rapide passage à la mairie pour le mariage civil tout le monde convergeait vers l’église dont les cloches sonnaient à la volée. Le mariage religieux était suivi d’une messe chantée au son de l’harmonium.

Les registres signés, le cortège se regroupait sur les marches de l’église après la sortie du jeune couple et de leurs parents.

 

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Par beau temps tout le monde regagnait à pied la maison des parents de la mariée pour le repas de noce.

 

 

 

 

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À la table d’honneur siégeaient les jeunes mariés encadrés de leurs parents, de leurs grands-parents, de leurs oncles, tantes et cousins. Les amis du marié avaient la lourde responsabilité de veiller à ce que les verres soient abondamment approvisionnés.

 

 

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Sous la direction de la cuisinière, le ballet des voisines embauchées pour faire  le service et laver la vaisselle commençait autour des tables.

Pendant des heures les chanteurs se succédaient accompagnés par les musiciens. Plats et bouteilles se vidaient.

Le moment attendu de la danse de la brioche arrivait. 

 

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Le parrain de la mariée devait danser le plus longtemps possible en tenant à bout de bras le gâteau d’une vingtaine de kilos attaché par des rubans sur une planche.

 

 

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Des jeunes relevaient le défi, puis la cuisinière la découpait et distribuait les morceaux pour accompagner le café arrosé d’une « goutte » d’eau-de-vie.

 

 

 

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Les couverts desservis, le violoneux ouvrait le bal : polkas, mazurkas, scottishs… les bouteilles défilaient jusqu'au repas du soir.

 

 

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Dans leur coin les enfants s’initiaient à la danse.

 

 

  

 

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Vers minuit les parents laissaient la place aux jeunes qui continuaient jusqu’à l’aube.

 

Epuisés, leur devoir accompli, ils abandonnaient la fête.

 

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Pour les mères des mariés le mariage de leur aîné mettait un terme à leur mission : c’était maintenant à la nouvelle génération d’assurer la descendance.

 

 

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 La gestion du quotidien au service de toute la famille : 

 La journée d’une femme de La Terrière

Cinq heures du matin, au chant du coq, c’était l’heure du lever des parents.

Allumer le feu et faire une flambée avec des frétilles et un fagot de sarments pour réchauffer le café était la première tâche de la mère de famille.

L’hiver, il fallait aussi dégeler l’eau pour la toilette des enfants.

 

  

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À partir de 5 heures 30, c’était l’heure de la traite des vaches.

- Soit à l'écurie durant l’hiver

- Soit dans les prés de mars à octobre

Assise sur un tabouret à trois  pieds, « la selle » elle assurait la traite des 2 ou 3 vaches du cheptel familial.

 

 

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Pour les vaches ayant récemment vêlé, trois traites par jour étaient nécessaires. Le lait était conservé   pour faire boire le petit veau.

À 6 heures, la traite terminée, elle transportait les seaux pleins sur le  passage de la collecte du laitier.

 

 

 

 

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À 7 heures : - Corvée d’eau pour la vaisselle. La mère préparait le petit-déjeuner des enfants qui comprenait le plus souvent une grande assiettée de soupe de légumes mélangée à du lait et de grandes tartines de pain beurré puis les musettes du repas de midi pour ceux qui allaient à l’école.

À 7 h 30, les enfants en âge scolaire prenaient le chemin de l’école distante de trois kilomètres.

 

Il restait à s’occuper des enfants non scolarisés,  à nourrir au sein et changer les derniers nés.

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À 8 heures après avoir distribué le foin aux vaches, changé la litière et sorti le fumier ,le père rentrait déjeuner. C’était souvent le seul moment de la journée où les parents étaient ensemble. Eux aussi prenaient une soupe de légumes souvent mélangée à du vin ("chabrot ") suivie d’un reste de mogette, ou de choux avec un morceau de lard ou de fromage.Pendant le carême, le lard était remplacé soit par de la morue à la sauce blanche avec des pommes de terre soit par un ragoût de macreuse (canard marin) seule viande autorisée pendant les jours maigres.


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Le père vaquait alors à ses occupations extérieures. En bon paysan de la mer, il ne lui était pas imaginable de manquer une marée de pêche à pied sur l’estran.

 

 

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9 heures : la course contre la montre reprenait. Il fallait maintenant chauffer l’eau pour la vaisselle dans un grand chaudron posé sur un trépied dans la cheminée. Cette eau était réutilisée pour préparer «la chaudronnée » des cochons. Mélangée à des pommes de terre écrasées et à du son elle leur était servie 2 fois par jour dans leur auge. La femme avait aussi la charge de nourrir les poules de la basse-cour et de ramasser pissenlits, luzerne, ou feuilles de chou pour les lapins.

 

 

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10 heures : Le potager avait une place primordiale dans la gestion du budget familial.

Il fournissait tous les ingrédients de la soupe quotidienne : pommes de terre précoces puis tardives, haricots verts puis secs, chou-fleur, artichauts, carottes…

 

Les soins aux animaux terminés, elle passait au jardin pour entretenir les semis, traiter les arbres fruitiers et ramasser les légumes.

 

 

 

22 02 LESSIVE 4

 

11 heures il fallait penser à préparer le repas de la famille. Cette charge relevait de sa responsabilité exclusive. En fonction de la production du jardin et du rendement de la pêche, les repas étaient relativement diversifiés.Les légumes imposaient de longues séances d’épluchage mais constituaient avec le pain et le beurre la base alimentaire de la famille. 

 

Le déjeuner comprenait quotidiennement la soupe faite de pommes de terre auxquelles on ajoutait les légumes du moment : petits pois, haricots. Parfois remplacée par des bettes dont le blanc était cuisiné au beurre et le vert à la sauce blanche servie avec des œufs durs accompagnés d’une salade de mâche appelée localement « boursette ». Suivait la quotidienne embeurrée de mogettes et ses gousses d’ail cuite à petit feu dans la cheminée. Crustacés, coquillages, poissons et macreuses diversifiaient les repas au rythme des marées.

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Les femmes n’avaient souvent pas le temps de se mettre à table. 

Après avoir nourri la maisonnée en restant debout, elles se contentaient de grignoter, assiette posée sur les genoux, au coin de la cheminée.

 

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Les après-midi étaient réservés aux tâches agricoles qui variaient en fonction des saisons.

 

 

 

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Le lundi était le jour de « la petite lessive de semaine » : linge de corps, chemises, pantalons et tabliers.

La procédure de lavage était plus simple que pour la grande lessive annuelle.

Le savon étant inconnu, on lavait à la cendre de bois.

Le linge était mis à tremper avec la cendre dans une lessiveuse posée sur un trépied, mis à bouillir avant d'être frotté, rincé puis étendu.

Pendant des mois on avait entassé le linge sale lourd : draps, nappes et torchons

La « grande lessive » ne se fait en général qu’une ou deux fois par an.  Elle durait 4 jours.

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Le premier jour la maîtresse de maison mettait le linge à tremper après un savonnage rapide près d’un point d’eau.

 

 

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Le lendemain elle allumait un grand feu pour chauffer la lessiveuse pendant de longues heures avec un sac contenant de la cendre de bois et des herbes odorantes. 

Elle la « touillait » pendant 5 ou 6­ heures avec de l’eau bouillante puisée dans un chaudron voisin, puis on la couvrait pour  faire « ressuer » le linge durant une nuit entière.

 

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- Le troisième jour, à genou dans un « carrosse », elle le « tapait » avec une « battoire » pour en faire sortir l’eau de lavage.

Le linge était rincé et mis à égoutter sur des tréteaux ou dans une brouette avant d'être essoré en le tordant et étalé sur un pré pour le séchage.

 

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Le quatrième jour

Repassés avec un fer à braise et pliés, les draps regagnaient pour une année la grande armoire parfumée par des bouquets de lavande.

 

 

 

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La cuisine de cochon :

Souvent seule source de viande qui pouvait se garder toute l’année salée ou fumée, la cuisine de cochon était une fête familiale.On tuait en général deux  cochons de 120 à 150 kg par an à l’entrée de l’hiver et à Mardi gras. Ils avaient soigneusement été engraissés en les alimentant par deux « chaudronnaies » quotidiennes faites d’un mélange d’eau de la vaisselle, des pommes de terre bouillies écrasées avec du son ou de la farine d’orge et de lait écrémé.

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L’arrivée du « tueur » muni de ses couteaux signait le début de la fête.

Avant de commencer, il vérifiait que tout était prêt pour le cérémonial : eau bouillante, bassines, saloirs.

Resté « à jeun » depuis la veille, le cochon, pattes attachées, était maintenu au sol par 3 hommes.

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Imperméable à ses cris de détresse, le tueur, d’un mouvement précis lui entaillait la gorge.

Le sang qui jaillissait des vaisseaux du cou était récupéré dans une casserole par la maîtresse de maison pour faire fressure et boudins.

 

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En le recouvrant de paille ou de frétilles enflammées on grillait les poils puis on raclait la peau et on la lavait à grandes eaux jusqu’à ce qu’elle soit blanche.

 

 

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L’animal était suspendu sur une échelle posée verticalement le long d’un mur pour être égoutté.

Puis, la colonne vertébrale fendue à la hache, on séparait l’animal en 2 parties dont on triait le contenu.

Les viscères (« les tripes ») étaient immédiatement vidés et lavées.

La veille, les femmes avaient soigneusement préparé les pots de grès, les charniers et le grand chaudron de 40 litres.

Les bas morceaux : foie, reins, et poumons («la  pire ») mis en ragoût assuraient le festin du soir auquel étaient invités les voisins venus donner un coup de main.

On réservait la langue et le cœur pour le pot-au-feu du lendemain accompagné de pruneaux ou de châtaignes. 

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Installés dehors, devant la porte les hommes commençaient le débitage.

Ils coupaient les morceaux et remplissaient les charniers de lard pour la salaison.

La grand-mère, femme de la famille la plus expérimentée en cuisine menait rondement son équipe. Les femmes de la maison avaient recouvert la table de la salle commune de grosses toiles blanches et sorti tous les plats dépareillés pour y trier les morceaux suivant leurs destinations futures.

Dans une odeur de lard frais, de thym et d’épices, les femmes préparaient boudins, pâtés et rillettes.

La couenne et les bas morceaux passaient dans le moulin à viande pour la «  fressure » et la « boudine ».

Les quatre jambons frottés à l’eau-de-vie, enduits de salpêtre, poivrés, salés et couverts d’un tapis d’herbes aromatiques étaient cousus dans un drap.

Ficelés, puis mis sous pression pendant un mois ils étaient pendus dans la cheminée ou portés chez le boulanger pour le séchage. Le lendemain, on clôturait la fête par un repas familial en mangeant la tête du cochon.

 3 ) Seconder son mari dans les tâches agricoles

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La troisième mission de l’épouse était de seconder son conjoint dans ses tâches agricoles.

  

 

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-En novembre et décembreIl était temps pour les femmes de ramasser des « frétilles » (aiguilles de pins) et des pommes de pin pour allumer le feu et griller le cochon.

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L’administration des Eaux et Forêt donnait le droit aux veuves de guerre de ramasser le bois mort.

Elle autorisait en outre les habitants à récupérer gratuitement les souches des arbres abattus en forêt domaniale en creusant le sable autour des racines sous condition de remise en état du sol et de le réensemencer avec des graines qui étaient fournies par les gardes forestiers.

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On semait  les fèves  .Après avoir tracé des sillons espacés de 20 cm, on y déposait une graine à une profondeur de 3 à 5 cm puis on tassait le sol au pied.

 

 

 

 

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En février et mars, la coupe du goémon représentait le gros chantier hivernal.

Seul engrais à leur disposition pour fertiliser leurs terres, les algues qui poussaient sur le littoral, considérées comme une des richesses de l’estran, étaient sous haute surveillance 

Appelées localement  « le sart », elles apportaient azote et sels minéraux et transformaient leurs terrains agricoles en riches jardins.

 

Pour sauvegarder le gisement, la collecte n’était autorisée que pendant la basse mer des deux grandes marées d’hiver.

Les jours de coupe étaient fixés par le conseil municipal et son déroulement sous le contrôle du garde champêtre qui donnait le signal du début des opérations.

Tous les habitants du village étaient sur le pied de guerre. Les enfants de plus de 10 ans étaient dispensés d’école. Les femmes avaient passé  « les culottes de travail » de toile resserrées sous les genoux.

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Harnachées de vieilles frusques de rebut, les mains enduites de saindoux pour se protéger du froid, elles coupaient le goémon et le mettaient en tas (« les pilots ») que les hommes chargeaient dans les charrettes.

Puis exténuées, trempées et transies, elles reprenaient les chemins de sable à travers la forêt pour rentrer à la maison.

- De mars à mai c’était la période des semis et des plantations 

Labouré à la main et enrichi par les algues, le sol était prêt.

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À genoux dans leurs planches, coiffées de leurs quichenottes, les femmes semaient haricots, carottes et cornichons, plantaient l’ail ,  oignons et  échalotes.

Traditionnellement, la plantation des pommes de terre dans une terre profondément labourées occupait le couple.

 

En suivant les rangs préalablement tracés, espacés de 75 centimètres, l’homme creusait d'un coup de pelle un trou de 10 centimètres dans lequel son épouse jetait la semence avant de la recouvrir de sable.

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Durant les 3 mois de croissance, l’entretien faisait partie de l’activité journalière des femmes : Il fallait les ratisser puis les « butter » pour favoriser la croissance des tubercules, surveiller les feuilles et retirer à la main les larves de doryphores, traiter le mildiou, lutter contre les courtilières…

 

 - De début juillet à fin août : les récoltes

 

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L’ail : Après l’arrachage et séchage sur le terrain, l’ail était préparé pour la commercialisation : il était « blanchi ». L’ « épibosage », travail de patience était délégué aux femmes : il consistait à retirer la peau noire superficielle. 

 

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Puis les têtes d’ail étaient « aboutées » (alignées) et rassemblées par « poignées » d’une vingtaine de têtes ou mises en tresses. 

 

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Les oignons et les échalotes : Début août, on récoltait les oignons et les échalotes. On les laissait sécher en « pilots » dans les planches.

 

 

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Les femmes les épluchaient avant de les mettre en bottes par ordre de taille pour former « les tricots » (des plus gros en bas aux plus petits en haut).  Elles étaient destinées à l’exportation.

 

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* Les pommes de terre: Fin août, l’arrachage des pommes de terre était un nouveau temps fort de leur activité.

La récolte se faisait entièrement à la main et à genoux.

 

 

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Après une journée de séchage, la mise en sacs, le transport et la livraison aux grossistes en charrette relevait de la responsabilité du chef de famille.

 

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Début septembre commençait la récolte de haricots blancs : la « mogette».

Après l’arrachage, elle était transportée sur les aires communales de battage et protégée de l’humidité par mise en tas de forme conique, « les tourettes ».

 

 

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Après quelques jours de séchage, étalée sur des draps de jute elle était battue suivant 2 techniques :

- Soit manuellement au fléau dit « féat » ,

 

 

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- Soit au rouleau de granit tiré par un cheval.

Pour éviter que le crottin tombe sur les haricots, on lui accrochait sous la queue un panier.

 

 

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Le battage terminé les cosses et les feuilles étaient ramassées au râteau et au balai de tamarin. On transportait la récolte dans un lieu venté, parfois à la plage, pour la tamiser en plein vent avec un crible. Le soir à la veillée, les femmes et les enfants triaient les grains abîmés ou tachés par l’humidité avant l’expédition chez des grossistes par sacs de 80 kg.

 

Une partie était conservée pour la consommation familiale.

 

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- Septembre octobre : les vendanges

Agriculteur ou artisan chaque « villageat » possédait ses vignes de Noah, d’Othello ou de Baccho dans le sable chaud des casses de la forêt. 

Les surfaces cultivées variaient entre 20 et 50 ares de vigne assurant une production familiale qui pouvait atteindre 2000 litres de vin par an. Cette production couvrait la consommation courante, l’excédent était vendu à des négociants pour faire des coupages.

Début septembre sonnait le temps des vendanges.

On observait la maturité des grains, et l’état du ciel pour organiser la cueillette.

Les «basses» en bois et les fûts étaient sortis de la cave, longuement rincés et remplis d’eau pour faire gonfler le bois et refaire l’étanchéité.

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Les vendanges étaient une période de fête.

On invitait avec fierté tous les participants à prendre un verre accompagné d’une tartine de pain et de rillettes apportés par la maîtresse de maison. Amis et voisins qui n’étaient pas eux-mêmes occupés à vendanger venaient donner un coup de main à charge de réciprocité.

 

 

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Chaque famille avait le droit de distiller pour son propre compte 1 000° d’alcool pur, soit 20 litres à 50°. L’eau-de-vie était utilisée pour soigner les plaies des humains et des animaux ou en cuisine pour faire des crêpes et des gâteaux. Pour certains hommes du village, « la goûte du réveil » remplaçait volontiers le café pour commencer leur journée sur le bon pied.

 

 Les rares moments de détente et de sociabilité

Les occasions festives étaient rares pour les femmes.

 1. Le repos du dimanche

Dans le cadre de sa gestion familiale même ses loisirs étaient productifs :

- Au printemps elle ramassait les pissenlits, les asperges sauvages et les escargots,

- En été les mûres pour les confitures,

- En automne les champignons rosés des près, les cèpes et lactaires délicieux en forêt, pleurotes de chardon sur les dunes, les nèfles et les cormes.

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Les jours de grande marée, les femmes avaient pour spécialité  la collecte des coquillages.

 - Soit sur  le platin sableux de La Terrière , appelé « en basse coté » par la pêche aux « avignes » ( tellines)  au ratissoire ou au trou.

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- Soit sur l’estran du phare le ramassage d’huitres, de palourdes et de patelles nommées localement "jambes". 

 

 

 

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2. Les foires et marchés

L’Ascension, la Saint  Michel ou la Saint  Martin étaient les dates des foires de l’Aiguillon, des Moutiers et d’Avrillé.

Elles représentaient les rares occasions de sortir de la monotonie quotidienne en sortant de chez soi et en rencontrant des amies d’enfance.

 

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Levée tôt le matin après une « grande toilette », revêtue de ses habits du dimanche, accompagnée de son mari elle quittait la maison.

Dans la charrette avaient été chargés les produits à vendre : beurre, œufs, volailles et les jeunes porcelets. 

 

 

 

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Arrivés sur place, mari et femme vaquaient à leurs activités : Pendant que son mari garait la charrette près du marché aux bestiaux, lieu de rencontre de la gent masculine entouré de nombreux cafés, elle s’installait sur le marché aux volailles pour écouler sa production d'oeufs .Elle retrouvait parmi la foule des connaissances avec lesquelles elle échangeait des nouvelles.

Le produit de sa vente alimentait sa « bourse de femme », somme dont elle disposait sans l’avis de son mari auquel elle demandait rarement de l’argent.

 

 

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Riche de son pécule, libérée de ses contraintes habituelles elle pouvait flâner.

Elle achetait ce qu’on ne trouvait pas au village : du savon, du tissu, de la mercerie ou des ustensiles de cuisine.

C’était son moment de plaisir.

 

 

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En fin de marché, elle regagnait la charrette en attendant son mari au sein d’une foule affairée devant la buvette du parc aux bestiaux.

 

 

La gâche de Pâques

Le Vendredi Saint, le boulanger et les propriétaires de fours les mettaient à disposition pour cuire la traditionnelle gâche de Pâques.

Après avoir longuement pétri la pâte aromatisée de fleur d’oranger, les femmes la mettaient à lever à la chaleur de l’intérieur d’un lit. Leur pâte levée, elle la transportait en brouette vers les fours. Chacune en avait préparé des petites pour offrir aux enfants du propriétaire du four.

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Les gâches étaient enduites de jaune d'œuf puis enfournées.

Dans la file d’attente devant le fournil, les langues allaient bon train : on échangeait nouvelles et potins en attendant avec anxiété le verdict du four.

Les résultats étaient très hétérogènes : certaines gâches avaient désespérément refusé de « lever ».

La tradition voulait qu’on s’invite les uns les autres le jour de Pâques à déguster de généreuses tranches de la gâche accompagnée de beurre ou de confiture pour les enfants et pour les hommes d’une tournée de Noah.

Dans chaque maison la pâtissière attendait avec humilité le verdict des visiteurs.

   Conclusion :

En 1900 les femmes représentaient 38 % de la population active. Elles allaient prendre une place importante dans la mutation de la société.

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Durant la guerre 1914-1918, elles remplaceront les hommes partis  au front.Elles vont suppléer au manque de main-d’œuvre dans l’industrie d’armement et dans les commerces.

 

 


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Dans l’agriculture, aidée des vieux et des enfants, elles vont jouer un rôle fondamental dans la survie alimentaire du pays.

Après le conflit, les veuves doivent remplacer dans le monde du travail les millions de morts et d’invalides de guerre. 

Jusqu’alors reléguée dans un rôle secondaire, la femme est devenue par nécessité chef de famille. Elle accapare de plus en plus l’autorité et dirige maintenant des affaires jusque-là réservées aux hommes.

 

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Outre la charge de la gestion du ménage, des soins aux animaux et du potager, la femme, souvent secondée par ses filles prend en charge les travaux des champs, les récoltes et la commercialisation sur les marchés, secteurs réservés aux hommes avant le conflit.

Dans cette France rurale d'après-guerre les femmes occupent une place majeure dans le système économique. Elles ont appris à être les piliers du milieu agricole sans leurs maris.

Le retour en arrière n’est plus envisageable. De plus en plus elles contribuent à épauler et à seconder le travail du chef de famille.

Il faudra attendre 1945 pour que leur soit accordé le droit de vote....

 

 

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Histoire Maritime du littoral du sud de la Vendée
  • Né au village de la Terrière en 1946 dans la maison de ses grands-parents, l’auteur y passe toutes ses vacances scolaires jusqu'à son entrée à la faculté de Médecine. Accompagnant, de jour comme de nuit et en toutes saisons, les anciens du village
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